Bienvenue à bord du vol 2022! Nous décollons cette année munis d’une bonne dose de gratitude et de pensées positives, en redressant nos manches et notre fauteuil. Nous avons éteint et rangé tous les dispositifs autodestructeurs, comme l’inquiétude et le négativisme. Notre leadership – activé par l’espoir, les connexions, la planification stratégique et le courage – aidera d’autres passagers à développer leur leadership. Nous allons célébrer nos efforts et profiter pleinement de ce vol!
Pendant le trajet, les chefs de file du secteur de l’éducation s’efforceront de recharger leurs batteries, en se concentrant sur leur bienêtre et leur santé mentale. Comme la Saskatchewan fait partie de la trajectoire de vol, voici quelques précisions.
Le ministère de l’Éducation de la Saskatchewan a mis en place un plan de deux ans visant à aborder les questions de santé mentale et de bienêtre dans les écoles primaires et secondaires. Dirigé par un comité d’administrateurs chevronnés du secteur de l’éducation, en collaboration avec des membres du ministère provincial, ce plan comprend les éléments suivants :
À l’échelle de la division scolaire, les dirigeants des écoles se chargent de soutenir les élèves et les employés en tenant compte de leur contexte local. Les plans de bienêtre en milieu scolaire incluent des initiatives de comités locaux, des programmes précis, des sondages et des partenariats communautaires. Des initiatives à l’échelle du système d’éducation – comme le perfectionnement professionnel, des conférences, des messages stratégiques, des sondages sur les besoins internes et diverses subventions – sont en place pour appuyer les écoles.
Par l’intermédiaire de son programme Bien dans mon travail, qui favorise le bienêtre des employés, le Réseau ÉdCan a été accueilli en tant qu’« allié important » de la Saskatchewan pour l’aider à orienter ses initiatives de santé mentale et de bienêtre :
Les dirigeants du secteur de l’éducation doivent s’épauler pour être en mesure de relever avec sagesse, force et confiance les défis inhérents au bienêtre du personnel et des élèves. Il y a un réel besoin de mécanismes de soutien économiques et proactifs que l’on peut facilement mettre en place et partager. Les dirigeants ont également besoin de savoir si leurs initiatives et les voies empruntées ont vraiment les effets positifs escomptés. La bonne nouvelle, c’est qu’il existe des initiatives phares dans l’ensemble des écoles, des divisions scolaires et des provinces.
Nous avons une occasion unique en 2022 d’établir des relations et des liaisons authentiques et sécuritaires – qu’elles soient en personne ou virtuelles – entre les dirigeants du secteur de l’éducation afin de relever ces défis ensemble. Ces liens sauront nous inspirer et nous aideront à devenir ce phare solide et essentiel pour nos élèves, nos communautés et nous-mêmes à la reprise des activités en 2022-2023.
Bon atterrissage!
Première publication dans Éducation Canada, mars 2022
Parler d’une vision du succès de l’élève pour l’après-pandémie semble prématuré, même si la communauté planétaire marque le deuxième anniversaire de cette crise sanitaire sans pareille. Cela dit, cet article donne la parole aux membres des équipes de direction d’école, car le succès des élèves repose en grande partie entre les mains des personnes qui ont la lourde responsabilité de coconstruire cette vision du succès des apprenants qui fréquentent nos écoles. Depuis la pandémie, les professionnels de l’éducation n’ont pas eu beaucoup de temps à réfléchir à la notion du succès, car la gestion de cette crise sanitaire les a placés dans un mode de survie. C’est à peine s’ils gardent la tête hors de l’eau. Qu’importe, ils n’ont pas perdu l’essentiel : l’élève, ses apprentissages, sa santé et son bienêtre demeurent au cœur de leur quotidien.
La recherche le confirme : après le personnel enseignant, c’est l’équipe de direction d’école qui a le plus d’influence sur la réussite des élèves (Leithwood, 2012; Leithwood, Seashore Louis, Anderson et Wahlstrom, 2004; Waters, Marzano et McNulty, 2003). Cela est d’autant plus vrai dans un contexte sociétal complètement bouleversé comme c’est le cas depuis le début de la pandémie de la COVID-19.
Cet article présente les résultats d’une étude qui a pris naissance dans un contexte de crise sanitaire mondiale. Elle porte sur l’incidence de la pandémie sur les pratiques de gestion, sur la santé et sur le bienêtre des équipes de direction. Elle cherche à établir un lien entre les efforts des équipes de direction et le succès des élèves.
En mars 2020, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) déclarait que l’éclosion de COVID-19 était devenue une pandémie. C’est alors que les autorités dans plus de 190 pays à l’échelle mondiale ont fermé leurs écoles touchant plus de 1,6 milliard d’élèves du primaire au secondaire (Bryant, Chen, Dorn et Hall, 2020). « Horaires de cours déraillés; fermeture de jeu; réorganisation des cohortes d’élèves; sentiments d’insécurité face à l’inconnu : le grand dérangement » (Rocque et Côté, 2021, p. 13)! Onze mois plus tard, en février 2021, la situation sanitaire demeurait aussi précaire et l’impact de la pandémie sur le système scolaire se poursuivait. Le graphique « PORTRAIT COVID-19 : ALBERTA ET MANITOBA » illustre le nombre de cas dans chacune des provinces au moment de la collecte des données : la ligne bleue dentelée indique le nombre de cas en Alberta et la rouge, au Manitoba. Les deux crochets noirs (*) indiquent la période de la collecte. Il était impossible de savoir que les cas dans les deux provinces seraient à leur plus bas à ce moment-là. Qu’importe, les vagues à la hausse se sont manifestées immédiatement après et, malheureusement avec l’arrivée des variants, la tendance est demeurée à la hausse. C’est dans ce contexte que l’équipe de recherche1, en collaboration avec le Conseil scolaire Centre-Nord (CSCN – Alberta) et la Division scolaire franco-manitobaine (DSFM – Manitoba), a mené son étude dont les principaux objectifs visaient 1) à recueillir l’opinion des équipes de direction d’école du CSCN et de la DSFM sur la pandémie et ses effets sur la gestion de l’école et 2) à examiner le niveau de santé et de bienêtre de ces équipes durant la crise sanitaire.
Au total, 63/70 personnes, provenant des équipes de direction du CSCN (n=31) et de la DSFM (n=32), ont participé à l’enquête, donnant un taux de participation de 90 %. Un questionnaire2 portant sur la gestion, la santé et le bienêtre a été envoyé aux participants à la mi-février 2021. Suite à la collecte des données, des analyses ont été réalisées à l’aide d’un logiciel3 qui a signalé les résultats statiquement significatifs (p ≤ 0,10). Le Comité d’éthique de la recherche de l’Université de Saint-Boniface a donné son approbation à l’équipe pour la réalisation de l’étude.
Soucieux de vouloir apporter un éclairage susceptible d’alimenter la réflexion sur la façon dont l’équipe de direction contribue à l’épanouissement des élèves en contexte de pandémie, les auteurs ont choisi de présenter les résultats de l’étude en portant une attention particulière à ces trois questions :
Les élèves réussissent mieux dans les écoles où les équipes de direction accordent une priorité à l’enseignement et à l’apprentissage (Archambault, Garon, Harnois et Ouellet, 2011; Huber et Muijs, 2010). Les pratiques de gestion pédagogiques de l’équipe de direction qui touchent le personnel, et par conséquent qui peuvent être associées à la réussite et à la persévérance des élèves, sont nombreuses dans l’étude :
Parmi cette liste, nous avons retenu les six pratiques qui ont fait l’objet d’un fort consensus parmi tous les répondants à la suite de cette question : « En comparaison à votre situation avant la pandémie de COVID-19 (avant mars 2020), évaluez combien votre temps consacré aux différentes fonctions de gestion a changé (diminué/augmenté) ». Les résultats peuvent être regroupés en deux catégories : a) la gestion des lieux, des espaces et du temps et b) la gestion des relations humaines (figure 1).
Figure 1. Fonctions de gestion pédagogiques et % de répondants qui affirme qu’elles ont augmenté/beaucoup augmenté
* (a) : gestion des lieux, des espaces et du temps; (b) : gestion des relations humaines
Collerette, Pelletier et Turcotte (2013) affirment que l’équipe de direction d’école qui « met beaucoup d’énergie à instaurer un milieu de vie agréable pour les élèves [et qui] fait le nécessaire pour instaurer un environnement calme, ordonné et sécuritaire » (p. 12) contribue à soutenir les enseignants dans leur enseignement et les élèves dans leur apprentissage. En raison des conditions sanitaires changeantes, les répondants de l’étude ont reconnu avoir consacré plus de temps à s’occuper de la sécurité, de la gestion des espaces et de la préparation/révision des horaires, et ce, presque au quotidien.
Fullan (2014; 2021), Leithwood (2013) et Dupuis (2004) ont tous étudié les conseils scolaires performants et les écoles efficaces. La qualité des relations humaines entre la direction et le personnel enseignant est fortement associée à la réussite des élèves. Presque la totalité des répondants (97 %) qui ont participé à l’étude a reconnu qu’en situation de crise, il faut « Préserver le bienêtre du personnel ». « Les encourager » et « les motiver », deux autres fonctions de gestion des relations humaines ont aussi augmenté à 90 % et plus durant la pandémie. Développer des relations de travail saines, ouvertes, chaleureuses et productives à l’intérieur des écoles dans des circonstances exceptionnelles ne peuvent faire autrement qu’appuyer les enseignants qui se soucient de l’apprentissage de leurs élèves.
L’étude s’intéresse à la perception des membres des équipes de direction d’école des deux autorités scolaires sur leur bienêtre et leur santé mentale en effectuant leur travail durant une crise sanitaire. Il est pertinent de s’y arrêter, car la recherche l’affirme depuis longtemps : les conséquences du stress, d’une mauvaise santé et d’un haut niveau d’anxiété qui perdure mènent à un éventuel épuisement émotionnel, à une déshumanisation des relations interpersonnelles et à une diminution du sentiment d’accomplissement (Poirel, 2009). Selon la durée de ce mauvais état de santé, « [c]ette spirale de détérioration du rendement aurait comme conséquence une perte de productivité pouvant conduire à la dépression nerveuse (Shirom, 2003, cité dans Poirel, 2009).
Face à une montagne de données, nous avons dû effectuer des choix judicieux. C’est pourquoi nous présentons les réponses statistiquement significatives en fonction des années d’expérience des membres des équipes de direction pour illustrer leur bienêtre et leur santé mentale. Le tableau 1 nous présente les figures portant sur six différents indicateurs de bienêtre et de santé :
Chaque indicateur nous aide à brosser un portrait global des répondants. Les résultats démontrent que pour l’ensemble des indicateurs, à l’exception de la description de l’état de santé (figure 6), les membres des équipes de direction ayant moins d’expérience font moins bonne figure que ceux ayant plus d’expérience. Le niveau d’estime de soi (figure 7) est tout de même favorable chez les deux groupes (70 % et 89 %), cependant, chez les répondants ayant moins d’expérience, 13 % sont « incertain » et 17 % sont « en désaccord » avec l’affirmation : « j’ai une haute estime de soi ».
Tableau 1. Portrait global du bienêtre et de la santé mentale en fonctions des années d’expérience (données statistiquement significatives)
Figure 2. Résultats en % en fonction des années d’expérience : ne jamais avoir assez de temps pour faire le travail au quotidien | Figure 3. Résultats en % en fonction des années d’expérience : je suis la plupart du temps détendu |
Figure 4. Résultats en % en fonction des années d’expérience : j’ai beaucoup d’énergie | Figure 5. Résultats en % en fonction des années d’expérience : j’ai un bon équilibre famille/travail |
Figure 6. Résultats en % en fonction des années d’expérience : décrivez votre état de santé | Figure 7. Résultats en % en fonction des années d’expérience : j’ai une haute estime de soi |
Le dernier indicateur retenu est celui de la présence de l’anxiété et de sa fréquence dans la vie des participants (figure 8). Nous constatons que 80 % des membres des équipes de direction d’école éprouvent de l’anxiété durant la pandémie, cependant, seuls 18 % affirment qu’elle se manifeste « la plupart du temps ou toujours ».
À la lecture des résultats présentés, nous voyons que la pandémie a eu une incidence sur : 1) le temps consacré aux pratiques de gestion pédagogiques et administratives; 2) le bienêtre et la santé mentale et 3) la présence de l’anxiété dans la vie des membres des équipes de direction des autorités scolaires de l’Alberta et du Manitoba. Malgré le fait que 80 % des répondants affirment vivre dans l’anxiété, 97 % d’entre eux consacrent plus de temps à « préserver le bienêtre de leur personnel » et 90+ % à « encourager/motiver les enseignants » durant cette crise sanitaire. Ces pratiques de gestion axées sur la qualité des relations interpersonnelles entre l’équipe de direction et le personnel enseignant contribuent sûrement à maintenir un environnement qui permettait le maintien d’un certain engagement de la part des élèves, et ce, à l’intérieur d’une organisation qui a subi d’importantes transformations de fond en comble depuis l’arrivée de COVID-19.
Cette tranche de l’article propose quelques éléments pratico-pratiques. D’abord, les répondants ont reconnu l’importance de gérer leur stress afin de maintenir une gestion de leur établissement, et un accompagnement des gens qui les fréquentent, en contexte de pandémie. La figure 10 illustre ces différentes façons. L’activité physique et la méditation/pleine conscience se trouvent au haut de la liste tandis que la thérapie individuelle/de groupe et l’automédicamentation s’y retrouvent au bas.
Figure 10. Résultats en % : façons de gérer le stress (ordre décroissant)
Le tableau 3 présente différents aspects de gestion des pratiques pédagogiques et de bienêtre, tant pour les enseignants que pour les membres des équipes de direction, ainsi que des actions prises pour les illustrer. La communication se voulait fréquente, accueillante et favorisant une approche consultative. La gestion se voulait simplifiée, malgré la complexité des exigences, collaborative, rassurante et stratégique selon les priorités. La technologie servait d’outil d’appui et les répondants se souciaient de leur bienêtre ainsi que de celui du personnel en cherchant un équilibre à leur vie.
Tableau 3. Aspects de gestion des pratiques pédagogiques/bienêtre et actions
Aspects | Actions concrètes |
COMMUNICATION |
|
STRATÉGIES DE GESTION |
|
TECHNOLOGIE |
|
BIENÊTRE |
|
La pandémie de la COVID-19 aura fait bien des victimes humaines, regrettablement. Mais que fera-t-elle des structures et des organisations, telles que le système d’éducation et la redéfinition du succès des élèves qui les fréquentent? Cet article cherchait à démontrer l’incidence de cette crise sanitaire sur les membres des équipes de direction qui soutiennent les responsables de l’enseignement. En adaptant leurs pratiques de gestion pédagogiques aux nouvelles réalités et en se préoccupant du bienêtre de leur personnel, les autorités scolaires ont donné de nouvelles formes à l’enseignement et à l’apprentissage. L’expérience des équipes de direction de ces autorités scolaires offrira-t-elle un éclairage partiel sur les nouveaux défis à relever quand viendra le véritable « après pandémie »? C’est alors qu’il sera possible de s’ajuster et de répondre aux attentes qui se pointeront à l’horizon pour nos élèves et les membres du personnel de nos écoles.
Photo : iStock
Première publication dans Éducation Canada, mars 2022
1 Jules Rocque, chercheur et Cynthia Côté, assistante de recherche.
2 Questionnaires adaptés de Derogatis (1987) et St-Germain (2011).
3 Statistical Package for the Social Sciences (SPSS, version 27).
4 Anxiété : une émotion désagréable qui combine des symptômes physiques (battement accéléré du cœur, difficulté respiratoire, sueurs, tremblements, étourdissements, mains moites, muscles tendus) et des pensées anxieuses (inquiétudes, ruminations, obsessions, doutes, craintes). Adaptation de la définition de l’Association des médecins psychiatres du Québec (https://ampq.org).
Archambault, J., Garon, R., Harnois, L, et Ouellet, G. (2011). Diriger une école en milieu défavorisé : Ce qui ressort des écrits scientifiques et professionnels (mise à jour du document 2006). Université de Montréal et Programme de soutien à l’école montréalaise (MELS), 17 p.
Bryant, J., Chen, L.-K., Dorn, E. et Hall, S. (2020). School-system priorities in the age of coronavirus. McKinsey & Company.
Collerette, P., Pelletier, D. et Turcotte, G. (2013). Recueil de pratiques des directions d’écoles secondaires favorisant la réussite des élèves. Recueil de pratiques. Université du Québec en Outaouais.
Derogatis, L. R. (1987). The Derogatis Stress Profile (DSP) : quantification of psychological stress. Dans G. A. Fava et T. N. Wise (dir.), Advances in Psychosomatic Medicine : Vol. 17. Research Paradigms in Psychosomatic Medicine (30-54). Karger.
Dupuis, P. (2004). L’administration de l’éducation : quelles compétences? Éducation et francophonie, 32(2), 133-157.
Fullan, M. (2021). Les moteurs efficaces de la réussite systémique. Centre for Strategic Education.
Fullan, M. (2014). The Principal. Three Keys to Maximizing Impact. Jossey-Bass.
Huber, S. G., et Muijs, D. (2010). School leadership effectiveness: the growing insight in the importance of school leadership for the quality and development of schools and their pupils. In S. G. Huber (dir.), School leadership – International perspectives. Springer Science.
Leithwood, K. (2013). Les conseils scolaires performants et leur leadership. Une étude commandée par le Council of Ontario Directors of Education et l’Institut de leadership en éducation.
Montgomery, C., Bujold, N., Bertrand, R. et Dupuis, F. (2002). Les caractéristiques psychométriques des indicateurs de stress et de la capacité de résolution de problèmes sociaux chez les étudiants en enseignement en milieu majoritaire et minoritaire francophone; une comparaison entre deux contextes. Étude.
Poirel, E. (2009). Le stress professionnel des directions d’école au Québec : sources du stress, vécu professionnel et ajustements (Thèse de doctorat, Université de Montréal).
Rocque, J. et Côté, C. (2021). COVID-19, les équipes de direction d’école en milieux francophones minoritaires (Alberta et Manitoba). Impact sur la gestion, la santé et le bien-être. Rapport de recherche. Université de Saint-Boniface.
St-Germain, M. (2011). Le leadership et la gestion du temps. Dans J. Rocque (dir.), La direction d’école et le leadership pédagogique en milieu francophone minoritaire – considérations théoriques pour une pratique éclairée (p. 219-256). Presses universitaires de Saint-Boniface.
Les effets de la pandémie de COVID-19 montrent à quel point les écoles jouent un rôle fondamental dans la santé et le bien-être des élèves et du personnel. Il est plus que jamais évident qu’une approche coordonnée à tous les niveaux du système d’éducation est nécessaire pour s’attaquer aux questions de santé mentale, de sécurité et d’appartenance dans les écoles. L’approche globale de la santé en milieu scolaire est de plus en plus reconnue par les conseils scolaires au Canada pour promouvoir le bien-être des élèves, du personnel enseignant et d’autres membres de la communauté scolaire.
Accroître le savoir, la compréhension et les compétences de la communauté scolaire au moyen d’occasions d’apprentissage formel et informel :
Établir des politiques, des lignes directrices et des façons de faire qui :
Travailler en collaboration avec :
Lorsqu’on adopte une approche globale de la santé en milieu scolaire, ce sont des communautés scolaires entières qui peuvent profiter d’un bien-être amélioré, de lieux éducatifs plus sains et de meilleurs résultats d’apprentissage pour les élèves. La recherche montre cependant que les écoles doivent investir du temps et des ressources dans la création d’un milieu propice à la santé qui soutient le bien-être des élèves et du personnel. Bien que cela puisse sembler être une tâche colossale, toutes les parties prenantes – dirigeants scolaires, collègues, parents et membres de la communauté – peuvent apporter leur petite contribution pour susciter un changement. Comme première étape importante, nous devons continuer de nous sensibiliser et de sensibiliser les autres à l’approche globale de la santé en milieu scolaire et à ses avantages.
La bienveillance revient de façon récurrente dans les discours, les textes et les programmes. Devrait-on y voir une carence en matière de bien-être de l’élève? Peut-être. C’est en tout cas ce que révèlent de nombreuses études sur le système scolaire à l’international.
Ce sentiment de mal-être est malheureusement corrélé à la baisse quasi systématique des résultats en français et en mathématiques depuis quelques années et tend à renforcer des inégalités et de l’anxiété chez une grande partie des élèves. Et sans confiance, une résilience moindre (Algan et coll., 2018) pour apprendre. Derrière des pratiques de classe encore très hétérogènes sur ce que peut être la bienveillance en classe, bien des malentendus et des quiproquos sur les attendus professionnels demeurent. Pourtant, le lien entre environnement affectif favorable et construction du cerveau (Toscani, 2020) est aujourd’hui bien connu mais les pratiques qui en découlent peuvent encore rester opaques pour certains et certaines.
Le cadre de la bienveillance avant tout intellectuel, mais aussi émotionnel et matériel propice aux apprentissages se décline en trois axes : la différenciation, l’évaluation et le suivi des élèves. Avant de pouvoir entrer sur ces trois axes, un point majeur à penser; le regard sur l’élève. Impossible de différencier, d’évaluer ou de suivre correctement les élèves sans les connaître, sans savoir ce qui les intéresse, les anime ou les ennuie et ouvre les portes à leur résilience.
Or ce n’est pas toujours sous l’angle du regard porté à l’élève et de sa connaissance en tant qu’individu singulier que les rentrées scolaires se font. On applique et on met en œuvre des méthodologies et des dispositifs sans penser d’abord à la qualité de la relation. Si je ne sais pas qui est l’Autre comment m’adresser à lui correctement ? Et pour apprendre à connaître, la question de l’intention derrière le regard porté est fondamentale.
Le postulat d’éducabilité est central, « Un regard qui scrute pour trouver la marque du manque impose à l’enfant un statut péjoré. Un regard qui ne cherche en l’enfant qu’un devenir instaure une dynamique de rencontre » (Henri Wallon). Alors comment ancrer une observation positive au quotidien qui sorte des seules vérifications, corrections et filtrage par l’erreur ? Comment enclencher avant toute traque des dysfonctionnements, une observation attentive absoute de tout préjugé ou jugement de valeur ?
Le préalable à cette bienveillance mise en action réside déjà dans la volonté et la capacité de savoir regarder ce que l’élève est. Ses points forts, ses habitudes, ses attitudes. Apprendre à découvrir ses liens avec les autres élèves et avec son environnement est un incontournable pour comprendre les dynamiques de classe et faire fonctionner correctement le collectif.
Il est en principe facile de noter ce que l’on observe à condition d’en prendre le temps. Pour aller plus loin, se fixer des contraintes peut aider à voir autrement les élèves. Une grande différence dans le regard porté sur l’élève peut résider dans l’obligation de se fixer l’objectif de noter exclusivement les éléments positifs et de les lister scrupuleusement.
Pour réellement prendre le temps de découvrir ce qui n’est pas accessible au premier coup d’œil (actes de générosité spontanée, de prise d’initiative…), concentrer son attention sur peu d’élèves en même temps est déjà un gage de réussite de cet exercice. Le regard particulier porté sur deux élèves par semaine dans un groupe, inscrit dans le quotidien du suivi ordinaire de chacun, semble un objectif déjà largement ambitieux. Cela signifie que même et surtout pour les élèves qui ne sont pas dans le cadre de ce que l’école exige d’eux, l’enseignant va prendre le temps de muscler son aptitude à adopter un regard positif. Ce sera l’occasion également de comprendre et d’apprendre à passer outre certains freins qui peuvent nuire à la qualité de la relation.
Finalement, se concentrer sur deux élèves par semaine dans un groupe, c’est consacrer deux semaines d’observation entière pour chacun, au cours d’une année.
Recevoir une rétroaction concrète, complète et conséquente fait partie intégrante de l’apprentissage. Un retour constructif et positif aide les élèves à apprendre en les engageant plus fortement dans leur quotidien d’apprenant. Les élèves ne doivent pas seulement entendre parler des erreurs, ils ont besoin de savoir où ils en sont dans leur connaissance des concepts, s’ils ont amélioré certains points, et où ils se situent par rapport aux objectifs de ce sujet ou de ce travail. Ils ont également besoin de voir clairement leurs forces. Mais pour dépasser les commentaires génériques tels que « bon travail » ou « continue à travailler dur » qui sont positifs, mais non significatifs, les temps d’observation longs représentent une aide précieuse pour noter ce qui est à valoriser, ce qui représente un levier dans leurs apprentissages ou une source de motivation intrinsèque. Les commentaires positifs aident les élèves à renforcer leur confiance en eux et leur motivation, et facilite surtout la connaissance qu’ils vont développer de leurs propres modes de fonctionnement. Les commentaires significatifs fournissent des éléments qui aident les élèves à devenir des apprenants autonomes et résilients. Ils savent par quels chemins passer, lorsque les défis sont là. Enfin, se centrer uniquement sur des éléments significativement positifs peut éviter les altérations du message envoyé lorsqu’il est automatiquement contrebalancé dans la foulée par des remarques pointant les manquements. Le « c’est bien, mais… » peut ruiner tout un entretien individuel en entraînant l’élève malgré lui vers une attention exclusive portée à ce qui fait défaut.
La richesse des observations au long cours réalisées par l’enseignant ou l’enseignante peut représenter le socle d’un dialogue constructif et positif avec les familles. Encore aujourd’hui, les familles peuvent n’être jointes par l’établissement scolaire ou le personnel enseignant que dans le seul objectif de parer aux difficultés rencontrées. Pour certains élèves, le positif n’existe pas. La communication reste centrée sur des incidents ou les obstacles rencontrés.
La communication positive est pourtant l’outil le plus significatif pour engager les familles dans une relation de co-éducation constructive. Une bonne communication permet d’informer, de rassurer et d’intéresser les parents. Une seule conversation, qu’elle soit positive ou négative, peut donner le ton et influencer l’opinion qu’une famille a de l’établissement ou de l’enseignant ou l’enseignante et inversement.
Une communication et des relations positives avec les familles contribuent à instaurer la confiance. Cette confiance est un élément important pour s’assurer qu’un partenariat est bien présent pour travailler en équipe et aider les enfants à atteindre leurs objectifs et à effectuer leurs apprentissages sereinement.
Alors après une semaine complète d’observation, la réception d’un message de la part de l’enseignant ou de l’enseignante qui n’a d’autre objectif que de donner le meilleur de ce qui sera réalisé et noté en classe sera la bonne surprise qui pourra permettre aussi à certains parents de voir autrement leur enfant et d’être un levier d’une communication renouvelée entre les élèves et leur famille.
La bienveillance comme posture professionnelle est un incontournable qu’il n’est pas toujours facile de mettre en application.
Prendre le temps de poser un regard positif systématique sur chaque élève en listant au quotidien les réussites, les progressions, la résilience, l’initiative, les interactions pour aider, accompagner, amène à développer une croyance forte en l’éducabilité de chacun et chacune.
Prendre le temps de communiquer ces observations positives aux élèves, c’est leur montrer qu’ils sont pleinement considérés, c’est leur dire autrement qu’ils ont une place particulière et qu’ils existent individuellement au sein du groupe classe. Tout cela favorise le sentiment de sécurité affective si propice aux apprentissages.
Enfin, prendre le temps de communiquer aux familles par écrit, c’est l’assurance d’un dialogue porteur et d’une inclusion de fait à la communauté éducative. C’est aussi parfois casser la chaîne de communication depuis toujours centrée sur le problème ou la difficulté.
Tout ceci n’est pas inné et demande des efforts, autres que ceux portés à la programmation des contenus et à la construction des activités ou des évaluations.
C’est par là que tout devrait commencer, apprendre à observer pour trouver le meilleur en chaque élève et les révéler à eux-mêmes.
Gueguen. C, (2018). Heureux d’apprendre à l’école. Les Arènes, Robert Laffont.
Robinson. K. et Aronica, L. (2009). Finding the element. Penguin Publishing Group.
Saillot.E., Piot.T. (2018). La bienveillance en éducation : approches compréhensives et critiques, Questions vives, 29. doi.org/10.4000/questionsvives.3001
Morin.V. (2020). Mathématiques : la France, dernière élève des pays européens. Le Monde. Publié le 8 décembre 2020 à 10 h 10 – Mis à jour le 8 décembre à 13 h 20 Mathématiques : la France, dernière élève des pays européens (lemonde.fr)
Algan.Y., Huillery.E. et Prost.C.(2018). Confiance, coopération et autonomie : pour une école du xxie siècle. Cairn info.
Toscani, P. (2020). Les conditions propices aux apprentissages. Mission Laïque Française.
Au printemps 2020, c’est plus d’un milliard et demi d’élèves dans le monde qui ont vu leur scolarisation interrompue en raison des mesures sanitaires liées à la crise de la COVID-19 . Dès le début de la crise, l’UNESCO (2020) observait d’ailleurs déjà plusieurs conséquences majeures : réduction du filet de protection des enfants, exacerbation des inégalités sociales et éducatives, accès insuffisant aux technologies, stress sur les familles, etc. À ce jour, alors que la majorité des élèves ont pu retourner sur les bancs d’école, il demeure certain que l’année scolaire 2020-2021 s’est accompagnée de nombreux défis, et qu’on ne connait pas encore la mesure des effets de la situation sur les acteurs de l’éducation.
C’est pourquoi la Chaire UNESCO de développement curriculaire (CUDC), en partenariat avec le ministère de l’Éducation du Québec, a lancé une étude visant à mieux comprendre les retombées potentielles de la crise de la COVID-19 sur les milieux scolaires au Québec. Plus spécifiquement, le projet vise à décrire les impacts de la COVID-19 sur : 1) l’organisation et les établissements scolaires; 2) les élèves; et 3) le personnel enseignant, ainsi qu’à croiser les données éducationnelles et épidémiologiques en cas d’éclosion dans les milieux scolaires.
Les résultats préliminaires présentés dans cet article concernent l’objectif 2 et proviennent des données recueillis par questionnaire en décembre 2020 et janvier 2021 auprès de 743 élèves du premier cycle du primaire au deuxième cycle du secondaire de trois Centres de services scolaires (CSS) de la grande région de Montréal. Il est à noter que l’article se termine par des éléments de mesures qui pourraient être mises en place dans les milieux scolaires, à la lumière des résultats préliminaires d’abord présentés.
Bien que l’étude soit toujours en cours, à la lueur des résultats préliminaires, des observations peuvent d’ores et déjà exprimer des tendances au sujet de certaines catégories d’élèves. Notamment, les élèves du deuxième cycle du secondaire et les élèves en situation de handicap ou avec des difficultés d’adaptation ou d’apprentissage (HDAA) semblent particulièrement vulnérables aux impacts de la COVID-19, alors que les filles et les garçons semblent vivre différemment ces impacts.
Les résultats préliminaires montrent que les élèves du deuxième cycle du secondaire (environ 15-17 ans) sont particulièrement vulnérables en cette année scolaire singulière. De manière générale, ils sont les plus inquiets par rapport à la COVID-19, et le sont significativement plus que les élèves du troisième cycle du primaire (10-12 ans) et du premier cycle du secondaire (12-15 ans). De plus, alors que tous les élèves du secondaire ressentent généralement moins de bienêtre que ceux du primaire, ce sont encore ceux du deuxième cycle qui se distinguent négativement. Ils rapportent le plus faible niveau de bienêtre, en plus de rapporter de plus hauts niveaux d’anxiété et de dépression que tous les autres élèves. Finalement, les résultats préliminaires indiquent une tendance à la démotivation au secondaire en général et au deuxième cycle en particulier : ces élèves tendent donc à accorder moins de valeur à toutes les matières évaluées et à avoir moins d’attentes de succès.
Près d’un quart des participants vivent avec un trouble d’apprentissage ou une situation de handicap. Depuis le début de l’année, ils ont reçu diverses formes d’aide pour les soutenir dans leurs apprentissages (plan d’intervention adapté ou services d’un(e) spécialiste : orthopédagogue, enseignant(e)-ressource, psychologue, psychoéducateur, éducateur spécialisé, etc.). Les résultats préliminaires laissent entendre que les élèves en situation de HDAA ressentent systématiquement plus d’impacts négatifs que les élèves sans besoins particuliers, et ce, pour toutes les dimensions évaluées. Ils sont plus inquiets en lien avec la COVID-19 que leurs camarades, ressentent plus d’anxiété et de dépression, et moins de bienêtre. Par ailleurs, ils sont moins motivés que les autres élèves tant en mathématiques qu’en français et en sciences. Ils constituent ainsi un deuxième groupe vulnérable (avec les élèves du deuxième cycle du secondaire) en raison des impacts de la pandémie sur les milieux scolaires. Considérant que ces élèves présentent davantage de besoins particuliers, il sera important de surveiller de près leur réponse et leur adaptation à la situation.
On compte parmi les élèves participants 52,6 % de filles et 45,8 % de garçons, et on note qu’ils ressentent différemment les impacts de la COVID-19 (sauf pour ce qui est du bienêtre scolaire, où il n’y a pas de différence significative liée au genre). Alors que les filles sont plus inquiètes et présentent plus de manifestations d’anxiété et de dépression que leurs camarades masculins, ceux-ci tendent à être moins motivés qu’elles en français et à accorder moins de valeur qu’elles aux mathématiques et aux sciences. Ces résultats ne sont guère surprenants : plusieurs études menées avant la pandémie dénotent une moins grande motivation chez les garçons et plus de difficultés d’adaptation intériorisées chez les filles (Graber, 2004; Bergeron, Valla, Smolla, Piché, Berthiaume et St-Georges, 2007; Réseau réussite Montréal, 2021).
Puisque cette étude s’inscrit dans une perspective annuelle, une deuxième collecte de données par questionnaire a eu lieu en mai-juin 2021. Il est donc important de noter que ces résultats préliminaires doivent être considérés comme étant un point de comparaison pour les données subséquentes. De plus, pour permettre une perspective plus large et plus approfondie des impacts de la COVID-19 sur les milieux scolaires, les données de questionnaires (des élèves et des enseignants) issues des deux passations doivent être mises en relation avec des données tirées d’entretiens et de groupes de discussion avec des membres de l’administration, des directions d’écoles et des enseignant(e)s des CSS participants, ainsi qu’avec les résultats scolaires des élèves pour les années scolaires 2018-2019, 2019-2020 et 2020-2021. L’étude pourrait également se poursuivre dans les années scolaires subséquentes pour vérifier les impacts à plus long terme.
Quoi qu’il en soit, les élèves sont là et pour plusieurs leurs besoins sont criants, maintenant. À l’issue de l’étude, nous espérons que les résultats participeront à la mise en place de mesures d’aide adaptées pour les élèves, particulièrement pour les groupes les plus vulnérables. En effet, il existe déjà des initiatives qualifiées comme probantes pouvant être implantées sans réserve et sans délai. Ces mesures très concrètes peuvent aider l’ensemble des élèves sur les dimensions du bienêtre, de la gestion du stress et du sentiment d’appartenance, et elles prédisent une meilleure adaptation socioémotionnelle. Par exemple, certaines mesures pourraient déjà s’insérer à l’intérieur du programme École en santé du ministère de l’Éducation au Québec. Premièrement, mettre en place une offre hautement bonifiée des activités parascolaires (sports, arts et culture) dites structurées dans l’ensemble des écoles (Archambault et coll., 2019; Brière, Imbeault, Goldfield et Pagani, 2020). Ensuite, favoriser autant que possible les activités physiques extérieures, en commençant par une simple marche de 10 minutes (Brière, Yale-Soulière, Gonzalez-Sicilia, et al. 2018; Hunter, Gillespie et Yu-Pu Chen, 2019). Puis, pour favoriser la persévérance et la réussite scolaire des jeunes garçons du secondaire scolarisés en milieux défavorisés, des initiatives s’inspirant du programme Bien dans mes baskets semblent pertinentes (CREMIS, 2021). À cet égard, il faut cependant demeurer très prudents et rappeler les risques de stéréotypes en ce qui concerne les interventions éducatives ciblant un genre en particulier.
Enfin, comme toute étude, celle-ci comporte ses limites. D’abord, le contexte de recherche difficile d’une situation de crise globale et sans précédent a rendu impossible l’établissement d’un portrait préalable de la population étudiée sur le plan des dimensions spécifiques évaluées. Ensuite, bien que des centaines d’élèves (et autres acteurs éducatifs) aient participé à l’étude, il n’en demeure pas moins qu’ils représentent un très faible pourcentage, non représentatif, de la population totale d’élèves québécois. Finalement, l’enquête ayant été transmise par courriel, il est permis de croire que parmi les participants potentiels, ceux qui ont répondu à l’appel ont un profil commun : majoritairement francophones, ils font partie de familles organisées possédant une bonne connexion Internet. Nous posons alors l’hypothèse que le profil des participants ait pu biaiser les résultats. Ainsi, il est difficile de généraliser nos constats, et il demeure possible que la situation soit pire que ce que nous avons pu observer.
Ce projet a été financé par le Conseil de recherche du Canada en sciences humaines (CRSH) et le ministère de l’Éducation du Québec, dans le cadre du programme Engagement partenarial – initiative spéciale COVID19.
Photo : iStock
Première publication dans Éducation Canada, septembre 2021
1 REMERCIEMENTS : Ce texte a été rédigé par Marion Deslandes-Martineau, Patrick Charland, Olivier Arvisais, Marie-Hélène Bruyère, Yannick Skelling-Desmeules, Jonathan Bluteau et Isabelle Plante. Les auteur.e.s tiennent à remercier les partenaires du ministère de l’Éducation et des centres de services scolaires concernés, de même que les collègues, cochercheur.euse.s, collaborat.eur.trice.s à l’étude : Isabelle Gauvin, Stéphane Cyr, Tegwen Gadais, Éric Dion, Joanna Trees Merckx et Jay S. Kaufman.
2 Le 2ᵉ cycle du secondaire dure trois ans et comprend la 3ᵉ, la 4ᵉ et la 5ᵉ année du secondaire.
Archambault, I., Eccles, J. S., et Vida, M. N. (2010). Ability self-concepts and subjective value in literacy: Joint trajectories from grades 1 through 12. Journal of Educational Psychology, 102(4), 804.
Archambault, I., Janosz, M., Goulet, M., Dupéré, V., et Gilbert-Blanchard, O. (2019). Promoting student engagement from childhood to adolescence as a way to improve positive youth development and school completion. Dans J. Fredricks, A. Reschly et S. Christenson (dir.). Handbook of Student Engagement Interventions: Working with Disengaged Youth. New York: Wiley. 13-29
Bergeron, L., Valla, J.-P., Smolla, N., Piché, G., Berthiaume, C. et St.-Georges, M. (2007). Correlates of depressive disorders in the Québec general population 6 to 14 years of age. Journal of Abnormal Child Psychology, 35(3), 459-474. doi: 10.1007/s10802-007-9103-x
Brière, F. N., Imbeault, A., Goldfield, G. S. et Pagani, L. S. (2020). Consistent participation in organized physical activity predicts emotional adjustment in children. Pediatric Research, 88(1), 125-130. doi: 10.1038/s41390-019-0417-5
Brière, F. N., Yale-Soulière, G., Gonzalez-Sicilia, D., Harbec, M. J., Morizot, J., Janosz, M. et Pagani, L. S. (2018). Prospective associations between sport participation and psychological adjustment in adolescents. Journal of Epidemiological Community Health, 72(7), 575-581.
CREMIS (2021). Les impacts du programme Bien dans mes baskets. Centre de recherche de Montréal sur les inégalités sociales, les discriminations et les pratiques alternatives de citoyenneté. https://cremis.ca/publications/dossiers/bdmb-2/les-impacts-du-programme/
Eccles, J. S. et Wigfield, A. (1995). In the mind of the actor: The structure of adolescents’ achievement task values and expectancy-related beliefs. Personality and Social Psychology Bulletin, 21, 215–225. doi: 10.1177/0146167295213003
Graber, J. A. (2004). Internalizing problems during adolescence. Dans Handbook of Adolescent Psychology (p. 587-626). John Wiley & Sons, Ltd. doi: 10.1002/9780471726746.ch19
Gresham, F. M., Elliott, S. N., Vance, M. J. et Cook, C. R. (2011). Comparability of the social skills rating system to the social skills improvement system: Content and psychometric comparisons across elementary and secondary age levels. School Psychology Quarterly, 26(1), 27.
Hunter, M. R., Gillespie, B. W. et Chen, S. Y. P. (2019). Urban nature experiences reduce stress in the context of daily life based on salivary biomarkers. Frontiers in psychology, 10, 722.
Liddle, I. et Carter, G. F. (2015). Emotional and psychological well-being in children: the development and validation of the Stirling Children’s Well-being Scale. Educational Psychology in Practice, 31(2), 174-185.
Réseau réussite Montréal (2021). Motivation et engagement (Dossier thématique). Réseau réussite Montréal. https://reseaureussitemontreal.ca/dossiers-thematiques/motivation-engagement/
UNESCO. (2020). Conséquences de la fermeture des écoles. https://fr.unesco.org/Covid19/educationresponse
Dans l’optique d’améliorer l’expérience scolaire de l’élève, nous nous sommes demandé s’il était possible d’explorer le potentiel créatif de chaque élève dans une salle de classe inclusive et équitable. Nos données de recherche avec les partenaires du Réseau CompeTI.CA (Compétences en TIC en Atlantique) semblent converger vers une réponse positive. Dans cet article, nous examinons les exemples provenant de deux études menées par l’équipe du Réseau : l’une, en partenariat avec Labos Créatifs, porte sur le développement de compétences numériques et l’autre, sur la créativité dans un contexte interdisciplinaire axé sur la musique, les mathématiques et la technologie. Ce projet soutenu par le Groupe d’action sur la Commission de l’école francophone (GACEF) a été réalisé en collaboration avec les districts scolaires du Nouveau-Brunswick dans trois écoles du Nord-Est et du Sud de la province.
Depuis les années 2000, une culture de laboratoires ouverts (makerspace), soit des espaces de fabrication équipés d’outils numériques, d’artefacts et de mécanismes de toutes sortes mis en commun pour collaborer (Bosqué, 2015) s’implante dans les communautés en quête d’innovation sociale à travers le monde. Cette culture semble avoir donné une impulsion à de nouvelles pratiques pédagogiques susceptibles d’encourager la créativité dans un espace collaboratif et un contexte authentique, inclusif, équitable et socialement responsable (Lingley et Wong, 2020). Malheureusement freinées par la pandémie, ces nouvelles pratiques pédagogiques, en pleine croissance dans les écoles du Nouveau-Brunswick et d’autres provinces atlantiques, ont mis en évidence le potentiel transformateur de l’art, c’est-à-dire, une recherche par l’apprenant de nouveaux points de vue et de réflexions pour changer sa compréhension des choses (Mezirow, 1990). Ainsi, l’art permet à chacune et chacun de prendre conscience de son potentiel créatif dans une démarche de travail collectif et collaboratif (Tremblay, 2012; Robichaud et coll., 2016). De plus, selon Churchill, 2019, p. 68), l’éducation axée sur la culture et sur les arts ouvre la porte à une interaction dynamique et créative entre l’enfant et le monde qui l’entoure lui permettant d’améliorer ses rapports sociaux, d’augmenter sa participation communautaire active et comme résultat, d’accroître son sentiment de bienêtre.
En nous intéressant, dans ce texte, aux bénéfices potentiels de ces pratiques pour développer le goût d’apprendre ensemble, nous examinons quatre exemples de projets créatifs réalisés par des élèves entre 2017 et 2019 : un modèle réduit d’un village interactif, le Village Minecraft, la fabrication d’un tubulum et un spectacle de Noël 2.0.
Le premier projet s’est déroulé dans une classe de 3e année en immersion française dans une école rurale du Nord-Ouest du Nouveau-Brunswick. Accompagnés de leur enseignante et d’un mentor de Labos créatifs, les élèves ont réalisé un projet collectif de construction d’un modèle de leur village. En équipes, à l’aide de carton et de peinture, les élèves ont bâti de modèles de différents édifices de leur village. Ils ont également préparé une courte histoire qui décrit chaque édifice. Chaque histoire a été audio-enregistrée par un groupe d’élèves. Ensuite, un autre groupe d’élèves a construit un circuit avec un interrupteur de courant intégré dans chaque modèle de bâtiment. Ils ont également effectué un codage associant le son (histoire de l’édifice) et le modèle. Ainsi, une personne qui veut visiter le village peut avoir une visite guidée programmée en écoutant chaque histoire créée par les élèves. Lors de la visite de l’école par notre groupe de recherche, tous ces détails nous ont été expliqués par un groupe de trois élèves qui ont raconté leur histoire à succès de ce projet collectif en vantant leurs idées authentiques, leur joie de travailler ensemble sur un si gros projet, la force de chaque élève qui y a apporté son brin de créativité et aussi de la fierté de leur communauté.
Dans le second projet, un groupe d’élèves de 6e, 7e et 8e année, également d’une école en milieu rural, a réalisé, dans un labo créatif, un projet de construction collaboratif de leur village à l’aide d’une plateforme virtuelle Minecraft. Tout comme leurs camarades de 3e année dans l’exemple précédent, dans les entretiens avec les chercheurs, les élèves ont exprimé leur plaisir de travailler ensemble sur un projet complexe et signifiant. Le travail a exigé beaucoup de temps, de méticulosité et d’effort collaboratif. Une fois le modèle bâti, les élèves pouvaient utiliser leur imagination pour animer le village en créant des personnages et des aventures. Nous avons observé, tout au long de ce travail, les élèves discutant entre eux, se regroupant pour voir et commenter les trouvailles de leurs camarades de classe et pour s’entraider, contribuant ainsi au bienêtre collectif.
Le troisième projet a eu lieu dans le cadre d’une recherche interdisciplinaire incluant la musique, les mathématiques et la technologie. Deux groupes d’élèves de 7e et 8e année d’une école du Nord-Est du Nouveau-Brunswick, respectivement accompagnés par leur enseignant et une équipe de chercheurs, ont fabriqué collectivement un instrument de musique, un tubulum (marimba en tube de PVC) et son support en bois. Ce projet avait trois objectifs :
Lors des séances collectives pour concevoir le tubulum, les élèves en groupe-classe ont généré différentes idées originales, posé des questions, écouté leurs camarades de classe et proposé des pistes de solution. Par la suite, en petits groupes de travail, les élèves ont mesuré chaque tube représentant une note de la gamme, et une équipe d’élèves-luthiers a construit le support en bois et y a apposé les tubes préalablement coupés et ordonnés. Afin d’explorer les rythmes en créant des suites et de la régularité, les élèves ont participé à un atelier de création sonore. À l’aide de cartes représentant des rythmes, ils ont dû créer des patrons rythmiques de leur choix. La créativité dans cet espace collaboratif a été féconde. Pour accompagner leur patron rythmique, les élèves ont réalisé des chorégraphies soit avec leurs mains soit à l’aide de tubes plastiques, parfois même accompagnées de paroles. Les élèves ont confirmé avoir eu beaucoup de plaisir à créer et à faire de la musique avec leurs pairs; ils ont aussi dit avoir appris à tisser des liens entre la musique et les mathématiques tout en étant motivés par l’esprit collaboratif du projet.
Le dernier projet était un spectacle de Noël surnommé 2.0 d’une autre école du Nord-Est de la province. Ce projet, qui a demandé plusieurs mois de préparation, a été conçu à l’aide de technologies numériques par les élèves avec l’appui de leur enseignante de musique et de deux enseignants titulaires. L’un des numéros de ce spectacle a été entièrement conçu par une équipe de trois filles de 5e année. Elles ont imaginé une « bataille » de chant : une élève commencerait à chanter, mais ses deux amies, voulant chanter d’autres chansons, vont lui couper la parole à tour de rôle. À la fin, elles feront la paix et chanteront ensemble une chanson différente aimée par toutes les trois. Chaque chanson était représentée par une canne de Noël géante en carton que les trois élèves avaient fabriquée. Les chansons étaient sauvegardées dans un ordinateur et à l’aide du logiciel de programmation Scratch et du Makey Makey, une chanson s’activait lorsqu’une des élèves appuyait sur la canne appropriée. Le choix des chansons et du mode de présentation se sont faits en commun. Les élèves ont aussi cherché ensemble des solutions aux défis techniques posés par l’utilisation du numérique et ont vécu des moments d’émerveillement et de réussite.
En conclusion, nous constatons que ces quatre exemples permettent d’inspirer une enseignante ou un enseignant qui cherche à multiplier les occasions d’épanouissement créatif pour le bienêtre de chaque élève. Tout d’abord, lors de la réalisation de leurs projets collectifs, la participation de chacune et de chacun est un élément clé du succès : chaque élève y apporte quelque chose, son « grain de sel ». En reconnaissant l’expertise de toutes et de tous, tout le monde se sent valorisé, épanoui, donc bien dans sa peau. On s’appuie ainsi sur une force permettant à chaque élève de s’exprimer librement, ce qui crée un espace sécuritaire de collaboration, de partage et d’entraide (Freiman, 2020). Dans ce contexte de création mutuelle, le matériel est plus qu’un simple outil technologique qui aide à accomplir une tâche particulière; c’est plutôt un agent de libération de l’esprit créatif « in-situ » au moment présent lorsque tous les efforts réunis apportent quelque chose de nouveau, d’inédit; dans ce moment même, se matérialise une idée spontanée, qui n’émerge pas comme un savoir « transmis », culturellement plausible, mais plutôt comme un savoir « créé », nouveau, conçu collectivement et qui garde à la fois les empreintes de la créativité de chacun, de son identité, et de celles d’un groupe uni. Tout le monde qui a contribué s’y reconnait, s’y identifie dans une joie et une fierté d’avoir créé quelque chose d’unique, une vraie œuvre commune. Dans cette dynamique inclusive, des liens communs se tissent par la créativité mettant en lumière les forces créatives, parfois latentes, de chaque membre du groupe. En s’en inspirant, les éducatrices et éducateurs qui font face à toutes sortes de défis liés à la pandémie ou à d’autres obstacles peuvent-ils trouver dans ces moments créatifs, une lueur d’espoir positif d’un monde meilleur que leurs élèves sont en train de construire « dès le moment présent »?
Tout Photos : Fournies par les auteurs
Photo : iStock
Première publication dans Éducation Canada, septembre 2021
Bosqué, C. (2015). Enquête au cœur des FabLabs, hackerspaces, makerspaces : Le dessin comme outil d’observation. Techniques et culture, doi.org/10.4000/tc.7579
Churchill, D. R. C. (2019). Creativity and the arts in early childhood: Supporting young children’s development and wellbeing. Jessica Kingsley Publishers.
Lingley, J. et Wong, J. (2020). Making Green Solutions. Converging classroom projects with the UN Sustainable Development Goals and Canada’s 2030 Agenda. www.edcan.ca/articles/green-solutions/
Freiman (2020). Issues of Teaching in a New Technology-Rich Environment: Investigating the Case of New Brunswick (Canada) School Makerspaces. In: Ben-David Kolikant Y., Martinovic D., Milner-Bolotin M. (eds) STEM Teachers and Teaching in the Digital Era. Springer, Cham. doi.org/10.1007/978-3-030-29396-3_15
Mezirow, J. (1990). Fostering Critical Reflection in Adulthood. San Francisco: Jossey Bass.
Robichaud, X., Freiman, V., Doiron-Pelletier, C., et Pelletier, M.-A. (2016). Développement de la créativité à l’aide des iPads : nouveaux outils pour les enseignantes et les enseignants de musique au primaire. Actes de la conférence CIRTA, www.cirta.org/index.php/50-banque-de-textes-actes-colloque-2016/232-developpement-de-la-creativite-a-l-aide-des-ipads-nouveaux-outils-pour-les-enseignantes-et-les-enseignants-de-musique-au-primaire
Tremblay, J. (2012). Indices de transformation sociale par l’art qui relie une pratique artistique avec et dans la communauté. Éducation et Francophonie, XL(2), www.acelf.ca/c/revue/pdf/EF-40-2-083-TREMBLAY.pdf
L’école se trouve être le milieu où l’élève passe la plupart de son temps. Ainsi, cet endroit s’avère une voie cruciale pour favoriser le bienêtre des élèves, mais là n’est pas sa seule mission. Promouvoir le bienêtre à l’école est une affaire dans laquelle interviennent plusieurs groupes de personnes : personnel enseignant, personnel administratif et même parents.
Débutant en fin 2019, la pandémie de COVID-19 que nous suivions dans les médias partout dans le monde est vite devenue la réalité de la planète entière. Aux quatre coins du monde, la pandémie a bousculé le système d’éducation. La fermeture d’écoles à répétition et l’enseignement à distance ont quant à eux bouleversé le quotidien des élèves, des enseignant.e.s et du personnel scolaire qui devaient, chacun de leur côté, s’adapter à cette nouvelle réalité jusqu’à une date indéterminée. Pour ce faire, plusieurs initiatives prometteuses ont vu le jour afin de permettre la continuité de l’école et des activités d’enseignement : réaménagement des espaces de cours; division des groupes d’élèves; formation à distance; planification des cours et adaptation des contenus; trousses d’enseignement à la maison, etc.
Par ailleurs, la pandémie a occasionné du stress et du mal-être généralisés sur la planète. La situation impose jusqu’à présent des ajustements pour chacun et chacune : télétravail, enseignement et apprentissage à distance, garde des enfants à la maison, licenciement d’employé.e.s, etc. Face à cette situation et à la pression vécue collectivement, le bienêtre des personnes s’avère l’enjeu attirant l’attention particulièrement en milieu scolaire.
Adopter la psychologie positive pour comprendre le bienêtre
Parler de bienêtre semble corréler avec l’essor de la psychologie que l’on appelle positive, d’où les termes « science du bienêtre » ou « champ d’investigation du bienêtre » qu’on lui donne dans les écrits. Bien que l’idée de s’intéresser au positif remonte à plusieurs années, le courant est en émergence depuis une vingtaine d’années et, tout récemment, même si la fin de la pandémie de COVID-19 semble difficile à prédire, la psychologie positive post-pandémique semble gagner du terrain.
Considérant la psychologie comme une discipline ayant préconisé pendant longtemps le travail sur les faiblesses et les aspects négatifs de la personne, la psychologie positive met la lumière sur les aspects positifs de l’être humain et tout ce qui va bien chez lui (Gaucher, 2010). Elle va en effet à l’encontre de l’idée stipulant l’existence d’une psychologie totalement tournée vers les souffrances.
Pour bien comprendre les deux aspects liés à la psychologie positive, Gable et Haidt (2011) l’ont comparée à une médaille qui a deux côtés, soit un négatif et un positif. Cet exemple met en relief le fait que les personnes opérant dans ce champ reconnaissent entièrement l’existence d’aspects désagréables, mais sont attentives à l’autre côté prometteur de la médaille qui fonctionne bien. Plus concrètement, il s’agit de se tourner vers les personnes épanouies et qui ressentent de la joie au lieu de ne se préoccuper que de celles qui souffrent. Cela rejoint les propos de Lecomte (2014) selon lesquels le fait d’adopter la psychologie positive ne consiste pas à voir le monde avec des lunettes roses dans le sens où l’attention ne devrait pas être mise que sur ce qui est idéal et parfait.
Depuis quelques années, tant la communauté de la pratique que celle de la recherche ne cessent de s’intéresser à la question du bienêtre à l’école en vue de promouvoir une santé mentale positive en milieu scolaire. On parle désormais d’éducation positive qu’on perçoit comme une approche fondée sur les compétences psychosociales des élèves autant que scolaires, considérant ces multiples avantages documentés dans les recherches comme susceptibles de promouvoir le bonheur, de favoriser la satisfaction à l’égard de la vie, de l’apprentissage, de la réussite, de la créativité et, à long terme, d’avoir une bonne santé physique. À titre d’exemple, il est admis que les enfants réussissent le mieux quand ils sont encouragés et reçoivent des compliments de leurs parents.
L’Organisation mondiale de la Santé considère une bonne santé mentale comme un état de bienêtre qui permet à la personne de surmonter les tensions quotidiennes de la vie, d’accomplir du bon travail et de servir sa collectivité. De fait, à n’importe quel moment, toute personne peut faire face à un élément perturbateur ou à une difficulté qui affecte son bienêtre. La santé mentale peut être envisagée comme un continnum1 de couleur à trois zones :
Ainsi, il semble que globalement les élèves passent à un moment ou à un autre en zone jaune et parviennent à regagner la zone verte par la suite. Cela dit, ils peuvent se trouver à un moment donné en période difficile qui s’avère généralement passagère du fait qu’ils arrivent à surmonter la situation et ressentent à nouveau du bienêtre, processus qu’on nomme dans les écrits « l’adaptation » ou « l’ajustement ». Pour comprendre ces situations, il s’avère incontournable de se pencher sur ce qui a aidé l’élève à éprouver du bienêtre par le biais d’une observation approfondie visant à démystifier les changements qui ont pu avoir lieu entre-temps. Plus spécifiquement, il s’agit de cibler les stratégies personnelles employées par l’élève pour traverser la situation stressante. À titre d’exemple, un élève pourrait se contenter d’évitement ou de repli sur soi pour oublier la situation et passer à autre chose alors qu’un autre pourrait demander l’aide de son enseignant ou enseignante ou de ses parents.
D’après le conseil supérieur de l’éducation du Québec2, les nombreux et sérieux facteurs impliqués dans la santé mentale exigeraient la planification de mesures comblant les différents domaines d’influence soit l’école, la collectivité, le/la jeune, ses camarades et sa famille tout au long du cheminement scolaire. Ainsi, écoles et / ou parents doivent trouver les meilleures façons de soutenir le bienêtre des élèves. Pour ce faire, voici quelques pistes d’action :
Considérant le nombre grandissant d’initiatives et de pistes prometteuses en ce qui concerne le bienêtre des élèves dont quelques-unes sont citées plus haut, l’école constitue un lieu clé pour assumer ce rôle. Surtout dans un contexte de pandémie, il devient de plus en plus urgent de se mobiliser pour favoriser le bienêtre. Ainsi, il ressort que le bienêtre est la priorité de tous mais surtout la responsabilité de tous. C’est donc en travaillant ensemble, familles et écoles, que nous pourrons envisager le bienêtre de chacun, celui des élèves et de leur entourage.
Photo : iStock
Première publication dans Éducation Canada, septembre 2021
Gable, S. et Haidt, J. (2011). Qu’est-ce que la psychologie positive (et pourquoi) ? Dans C. Martin-Krumm et C. Tarquinio, Traité de Psychologie Positive: fondements théoriques et implications pratiques (pp. 30-40). Bruxelles : De Boeck.
Gaucher, R. (2010). La psychologie positive: Ou l’étude scientifique du meilleur de nous-mêmes. Éditions L’Harmattan.
Lecomte, J. (2014). Introduction à la psychologie positive. Dunod.
Dans le cadre de notre étude sur les besoins de formation des enseignants et enseignantes à l’éducation préscolaire réalisée en 2020-2021, les participants et participantes ont souligné l’importance de développer leurs propres compétences sociales et émotionnelles pour favoriser leur bienêtre et celui des enfants. Nous avons alors ciblé des besoins spécifiques au développement de ces compétences et ainsi nous avons mis l’accent sur les contenus à aborder dans la formation initiale ou continue. Par exemple, des besoins de formation en vue d’assurer la sécurité émotionnelle des enfants ont émergé dans un contexte où l’affectif est essentiel à la relation avec les enfants de 4 ou 5 ans. Cet article amène donc des réflexions quant aux interventions en contexte scolaire qui favoriseraient le développement des compétences sociales et émotionnelles des enfants et qui contribueraient à leur bienêtre.
Pouvant être définies comme des savoirêtre acquis, enseignés et évalués et qui prédisent le bienêtre individuel et social (Minichiello, 2017), les compétences sociales et émotionnelles contribueraient à une relation de qualité avec les tout-petits (Coutu et Bouchard, 2019). Pour développer les compétences sociales et émotionnelles des enfants, l’enseignant doit donc les avoir développées lui-même. Faute de consensus sur une définition précise des compétences sociales et émotionnelles, nous proposons qu’elles touchent l’expression, la compréhension et la régulation de ses émotions et de celles des autres (Denham et Brown, 2010).
La promotion de ces compétences auprès des enfants peut prévenir l’apparition des difficultés liées à la santé mentale et les interventions concernant le développement de celles-ci sont efficaces dès la maternelle (Durlak et coll., 2011). En effet, la petite enfance représente une période où les enfants acquièrent les habiletés de base reliées aux émotions et ces dernières sont déterminantes pour leur adaptation sociale et scolaire future (Fredriksen et Rhodes, 2004).
Comme en témoigne une enseignante interrogée dans notre étude, pour développer les compétences sociales et émotionnelles des enfants et ainsi favoriser leur bienêtre, il importe d’avoir une relation de qualité avec eux et de connaitre avant tout le développement des enfants de leur âge. L’enseignante affirme qu’à 5-6 ans, les enfants n’ont pas tous les mots pour dire ce dont ils ont besoin et que ce sont des petites boules d’émotions : « On met la technicienne en éducation spécialisée là-dessus et c’est beau. On met un plaster, mais ça saigne toujours en dessous ». Elle ajoute que l’enseignant ou l’enseignante doit être conscient.e que c’est un être humain que l’on accueille.
Les compétences sociales et émotionnelles reposent effectivement sur la conscience de soi. En tant qu’adulte qui intervient auprès de l’enfant, il convient de considérer que nos réactions, nos paroles, nos gestes ont beaucoup d’impact sur les situations émotionnelles futures que vivra l’enfant. Il importe aussi de se questionner sur nos compétences sociales et émotionnelles en tant qu’intervenants et intervenantes, plus précisément quant à notre propre vocabulaire émotionnel. Comme en témoigne une autre enseignante, nos interventions face à des situations émotionnelles vécues chez les enfants peuvent grandement influencer leur bienêtre. Elle trouve que la sécurité émotionnelle, c’est-à-dire le bienêtre des enfants, se sentir respecté et accepté par le personnel enseignant est tout aussi important que la sécurité physique. Elle ajoute qu’il importe que l’enfant puisse être accompagné par quelqu’un de fort, qui est à sa place, qui se sent bien et efficace pour accueillir tout ce qu’il est émotivement.
On constate que les enfants de la maternelle n’ont pas nécessairement acquis le vocabulaire émotionnel qui leur permettrait d’exprimer ce qu’ils désirent ou ressentent. Verbaliser ses émotions n’est pas quelque chose qui apparait spontanément chez les enfants. Il s’avère important de leur donner les outils pour mieux communiquer leurs émotions. Un enfant apprendra alors à utiliser des mots associés à ses états affectifs (Coutu et Bouchard, 2019), ce qui contribuera à son bienêtre. De plus, il ne s’agit pas uniquement de recevoir l’expression émotionnelle, mais il faut aussi y répondre. Rimé (2009) soutient alors l’importance du réconfort non verbal (p.ex. poser la main sur le bras, s’en rapprocher physiquement). Il y a donc lieu de se questionner sur la place de l’affectif dans cette relation avec les tout-petits sachant qu’en période de la COVID, des enseignants interrogés dans notre étude rapportaient ne pas pouvoir « toucher » aux enfants, même pour les consoler. Sachant que les enfants ont pu présenter pendant la pandémie des difficultés psychologiques comme la peur d’être infectés ou même la tristesse de ne pas être en contact avec leurs amis ou leur enseignant ou enseignante (Wang et coll., 2020), il convient plus que jamais de se rappeler de l’importance de les accompagner en leur apprenant à nommer leurs émotions (Carignan et coll., 2020).
C’est par le questionnement des adultes entourant les enfants qu’il sera possible d’amorcer un échange avec eux (Grossenbacher et Riva, 2018). Ainsi, l’enseignant ou l’enseignante doit leur faire reconnaitre leurs propres émotions, ce qui est à la base des apprentissages socio-émotionnels. Puis, au fur et à mesure de leur développement, ce partage se fera plus spontanément. Il y aurait donc un apprentissage autour de la verbalisation des émotions et ces apprentissages se font par le soutien des adultes et les relations qui entourent l’enfant (Grossenbacher et Riva, 2018). Outre la qualité de la relation et le soutien de l’adulte, quels moyens peuvent alors être concrètement mis en place pour contribuer au développement des compétences sociales et émotionnelles des tout-petits?
Voici quelques pistes d’intervention pour développer les compétences sociales et émotionnelles des enfants du préscolaire tout en contribuant à leur bienêtre.
Les enseignants et enseignantes interrogés se disent préoccupés par la sécurité émotionnelle des tout-petits pour qui une relation de qualité est essentielle à leur développement. Ils reconnaissent d’ailleurs que leurs propres compétences sociales et émotionnelles s’avèrent essentielles pour contribuer non seulement au bienêtre des enfants, mais aussi à leur propre bienêtre. Dans le cadre de nos recherches actuelles, nous constatons qu’il existe peu de programmes de formation qui se concentrent sur le développement des compétences sociales et émotionnelles des futurs enseignants et même des enseignants en exercice. Nous avons ici présenté des besoins plus spécifiques au développement de ces compétences pour mieux outiller le personnel enseignant, mais également les personnes qui interviennent dans le cadre de la formation initiale ou même continue. Le personnel enseignant doit reconnaitre ses propres forces et défis par rapport aux situations émotionnelles qui pourraient se vivre dans la classe. Un enseignant ou une enseignante qui ne se connait pas émotionnellement de l’intérieur peut manquer de vigilance quant à son propre comportement (Latry, 2004). Reprenant les propos de Lacourse et Leroux (2016), il convient de se rappeler qu’un enfant de 4 ou 5 ans ne veut pas déplaire, mais il ou elle cherche peut-être plutôt à répondre à un besoin.
Photo : iStock
Première publication dans Éducation Canada, septembre 2021
April, J. et Charron, A. (2013). L’activité psychomotrice au préscolaire : des activités nécessaires pour soutenir le développement global de l’enfant. Chenelière Éducation.
Carignan, I., Beaudry, M-C. et Cohene, K. (2020). L’enseignement-apprentissage à la maison en période de pandémie en mettant sa casquette de maman-enseignante-chercheure : un défi de taille. Formation et profession, 28(4 hors-série), 1-11.
Coutu, S. et Bouchard, C. (2019). Apprendre à gérer ses émotions, à s’affirmer et à se faire des amis. Dans C. Bouchard, Le développement global de l’enfant de la naissance à 6 ans en contextes éducatifs (2e édition, p. 297-336). Québec : Presses de l’Université du Québec.
Denham, S. A., Bassett, H. H. et Wyatt, T. (2007). The Socialization of Emotional Competence. Dans J. E. Grusec et P. D. Hastings (dir.), Handbook of socialization: Theory and research (p. 614-637). New York : The Guilford Press.
Denham, S. A. et Brown, C. A. (2010). Plays nice with others: Social-emotional learning and academic success. Early Education and Development, 21, 652-680.
Durlak, J. A., Weissberg, R. P., Dymnicki, A. B., Taylor, R. D. et Schellinger, K. B. (2011). The impact of enhancing students’ social and emotional learning: A meta-analysis of school-based universal interventions. Child Development, 82(1), 405-432.
Fredriksen, K. et Rhodes, J. (2004). The role of teacher relationships in the lives of students. New directions for youth development, 103, 45-54.
Grossenbacher, A.-L. et Riva, N. (2018). Comment les émotions sont-elles prises en compte en milieu scolaire : de la théorie des émotions à leur application sur le terrain. Étude comparative de trois enseignants expérimentés et trois enseignants débutants. (Mémoire inédit). Université de Lausanne.
Lacourse, F. et Leroux, J. (2016). La gestion de la classe à l’éducation préscolaire. Dans C. Raby et A. Charron, Intervenir au préscolaire. Pour favoriser le développement global de l’enfant (2e édition, p. 209-220). Anjou : Les Éditions CEC.
Latry, F. (2004). Les enseignants ont aussi des émotions. Paris : Economica.
Minichiello, F. (2017). Compétences socio-émotionnelles: recherches et initiatives. Revue internationale d’éducation de Sèvres, 12-15.
Rimé, B. (2009). Le partage social des émotions. Presses universitaires de France.
Wang, G., Zhang, Y., Zhao, J., Zhang, J. et F., Jiang. (2020). Mitigate the effects of home confinement on children during the COVID-19 outbreak. The Lancet, 395, 945-947.
Longtemps perçue au Québec comme « la voie de la dernière chance » pour les élèves en difficulté, la formation professionnelle du secondaire, qui mène à la pratique d’un métier spécialisé, bénéficie aujourd’hui – et fort heureusement! – d’un regard plus positif. Selon de récentes études, une majorité d’apprenants et d’apprenantes qui évoluent au sein des différents programmes d’études de la formation professionnelle ne s’y retrouve pas à défaut de meilleures options de formation ou par manque de capacités à poursuivre des études plus avancées (Beaucher et Breton, 2020), mais dans bien des cas, parce que ce programme constitue, tout naturellement, la voie d’accès privilégiée au métier qu’ils rêvent d’exercer.
Néanmoins, et c’est tout aussi vrai pour l’ensemble des autres secteurs de formation, les parcours scolaires des élèves du professionnel ne se vivent pas toujours sans heurt et il arrive que la motivation, la persévérance et les processus d’apprentissage soient mis à rude épreuve. Une situation financière précaire, des obligations parentales rendant plus difficile la réalisation d’études, une problématique de santé physique ou mentale ou une faible estime de ses capacités de réussir sont autant de facteurs reconnus comme des freins potentiels à la réussite et au bienêtre de ces élèves. La pandémie de COVID-19 aura malheureusement exacerbé plusieurs de ces défis vécus par les élèves de la formation professionnelle aux plans social, motivationnel et psychologique, en plus d’affecter la qualité de la formation qui, souvent, pouvait difficilement s’offrir dans une modalité d’enseignement à distance ou en respectant les mesures sanitaires imposées par la santé publique.
Le contexte postpandémique actuel devrait ainsi inciter les centres de formation professionnelle (CFP) à réfléchir aux moyens de favoriser le bienêtre de leurs élèves durement éprouvés durant les derniers mois. Car bien que les freins potentiels à la réussite et au bienêtre nommés précédemment semblent à première vue relever davantage de la sphère personnelle que scolaire, il serait toutefois regrettable de sous-évaluer l’influence du rôle joué par l’école et ses différents acteurs (personnel enseignant, professionnels, membres de l’administration scolaire, etc.) sur le bienêtre des élèves. En effet, l’école constitue un lieu de première importance dans la vie de ces derniers : espace déterminant au plan des processus de socialisation, jeunes et moins jeunes y développent leurs croyances personnelles et y façonnent une pluralité de buts éducatifs et professionnels. Sans surprise, les expériences vécues dans le cadre des études professionnelles et les contacts avec les membres du personnel enseignant sont ainsi susceptibles de jouer un rôle considérable dans la qualité de vie globale et le développement personnel de l’individu.
Les recherches sur le bienêtre des élèves ont démontré le lien crucial entre le bienêtre et le sentiment de contrôlabilité ressenti par l’élève envers sa réussite. L’exemple qui suit en illustre les mécanismes : si une élève du programme de Secrétariat se sent complètement démunie et impuissante devant sa sixième tentative à réaliser un bilan financier avec le logiciel Excel, elle ressentira un niveau élevé de stress et aura tendance à se résigner, puis à abandonner la tâche sans tenter de mobiliser l’ensemble de ses compétences. Vécu de façon répétitive, ce sentiment de ne pas être en contrôle de sa réussite peut mener l’apprenant ou l’apprenante à ressentir des symptômes d’anxiété et de dépression qui influent ainsi sur sa santé physique et son bienêtre psychologique. Déjà, dans les années 70, une étude réalisée par Seligman illustrait bien ce phénomène de « résignation apprise ». Bien que cet exemple puisse sembler manquer de délicatesse pour décrire ce que vivent les élèves, il demeure toutefois utile de le détailler afin de comprendre le phénomène en question. Dans l’étude de Seligman, des chiens, emprisonnés dans une cage et sans possibilité de s’évader, reçoivent des chocs électriques. Si, lors des premières décharges, les pauvres animaux essaient de trouver une solution au problème et de s’échapper de la cage, au bout d’un certain temps, constatant qu’ils ne peuvent rien changer à leur sort, ils se résignent et finissent par se coucher et attendre passivement le prochain choc. Le plus surprenant, c’est qu’une fois libérés de leur cage, ces chiens continuent de démontrer la même passivité et ce, même s’ils ont en réalité la possibilité de fuir. Malheureusement, à l’instar de ces chiens, les élèves peuvent aussi apprendre à se résigner, au fil des difficultés et des échecs vécus, s’ils ont le sentiment de n’avoir que peu de maîtrise sur leur environnement. Lorsque c’est le cas, la motivation scolaire et le bienêtre s’en trouvent durement touchés et il est alors essentiel de leur démontrer qu’ils peuvent reprendre les rênes de leur réussite.
Le concept du sentiment d’efficacité personnelle (SEP), même s’il n’est pas nouveau, prend ici tout son sens. Contrairement au phénomène de résignation apprise, le SEP permet plutôt à l’élève de devenir un sujet actif de son développement et de s’engager pleinement et avec confiance dans ses apprentissages (Vianin, 2018). Défini par son créateur, l’illustre psychologue canadien Albert Bandura, comme l’ensemble des jugements et des croyances que possède un individu à propos de ses compétences, de ses ressources et de sa capacité à réaliser avec succès une tâche particulière, le SEP serait – rien de moins! – au fondement de la motivation, des accomplissements et du bienêtre de l’être humain (Bandura, 2019). En agissant sur l’autorégulation des processus cognitifs, de la motivation ainsi que des états émotionnels de l’élève, l’efficacité personnelle perçue contribue fortement à sa performance et ce, quelles que soient ses aptitudes réelles! Si nous reprenons l’exemple mentionné précédemment en lien avec le programme d’études de Secrétariat, cela voudrait donc dire que deux élèves possédant des aptitudes absolument identiques pourraient avoir un rendement de niveau très différent lors de la réalisation de leur bilan financier en fonction de leurs croyances d’efficacité respectives. Ainsi, ce qu’il faut comprendre de la théorie du SEP de Bandura, c’est que pour réussir, il ne suffit donc pas d’être capable, mais encore faut-il se croire capable! L’élève qui se croit capable s’engagera plus activement dans son travail et aura tendance à persévérer face aux difficultés plutôt que de baisser les bras, augmentant par le fait même ses chances de réussite.
Le rôle des croyances d’efficacité du personnel enseignant dans la construction du SEP des élèves et de leur bienêtre.
S’il est important de cultiver des croyances d’efficacité positives chez les élèves afin de favoriser leur réussite et de promouvoir leur bienêtre, il est tout aussi important d’assurer un fort SEP chez le personnel enseignant puisque ce qui est vrai pour l’élève l’est aussi pour celui ou celle qui l’accompagne! L’enseignant ou l’enseignante qui se croit capable s’engagera plus activement dans son travail et aura moins tendance à se résigner devant les défis rencontrés, augmentant ainsi ses chances de succès dans le cadre de ses différentes fonctions professionnelles.
C’est au cours des années 80 qu’un vif intérêt est développé pour le « sentiment d’efficacité du personnel enseignant » définit par Gibson et Dembo (1984) comme la croyance que possède un enseignant ou une enseignante en sa capacité d’influencer les apprentissages de ses élèves. Lorsque l’élève qui se croit capable est en plus accompagné d’une personne qui, elle aussi, se croit capable de le guider vers la réussite, le pouvoir du SEP s’en trouve alors décuplé, laissant présager un scénario des plus encourageants!
Fort de plusieurs décennies de recherche, le SEP du personnel enseignant a été maintes fois lié à la qualité des pratiques pédagogiques et des interventions en gestion de classe. En outre, l’enseignant ou l’enseignante ayant un SEP élevé s’avère plus susceptible d’adopter des pratiques novatrices et efficaces en cohérence avec les besoins de ses protégés. Certaines recherches ont même pu établir un lien entre de fortes croyances d’efficacité chez le personnel enseignant, la réussite des élèves dans certaines matières scolaires ainsi que leur motivation.
À la lumière de ce qui vient d’être énoncé, il n’est pas surprenant de constater que les croyances d’efficacité des enseignants et des enseignantes ont une incidence sur le bienêtre des élèves. En effet, si un fort SEP leur permet d’exploiter leurs ressources efficacement et de les mettre au service des élèves, il influence également positivement la perception qu’ils se font de leur compétence et de leur savoir-être. Cela contribue à favoriser un climat de classe favorable donnant lieu à des interactions positives et significatives, assurant ainsi le bienêtre, autant chez la personne enseignante que chez l’élève (Galand et Vanlede, 2004). En résumé, un SEP élevé chez le personnel enseignant favorisera l’utilisation de stratégies pédagogiques pertinentes et appropriées qui elles, auront un effet sur le SEP et par conséquent, sur la réussite et le bienêtre des élèves qui, à leur tour, viendront alimenter les croyances d’efficacité de l’enseignant ou l’enseignante, accroitre son bienêtre et ainsi de suite, laissant deviner une sorte d’engrenage circulaire qu’il importe de garder en mouvement!
En raison des liens considérables qui unissent le SEP du personnel enseignant et celui des élèves, il est crucial de se demander, en tant qu’enseignant et enseignante, de quelles façons il est possible de nourrir ces fameuses croyances d’efficacité. À ce sujet, une étude menée auprès de 22 nouveaux enseignants et enseignantes de la formation professionnelle nous donne des pistes de réponse. À partir de leur témoignage, quatre catégories de stratégies leur servant à maintenir et à développer leur SEP ont pu être identifiées. Peut-être sauront-elles inspirer et faire réfléchir les membres du personnel enseignant qui souhaitent accroitre leur SEP et ainsi, favoriser le bienêtre de leurs élèves!
Les élèves qui évoluent aux côtés d’enseignants et d’enseignantes qui savent tirer profit du soutien et de l’expertise des différentes personnes qui les entourent se sentiront davantage épaulés et bénéficieront potentiellement d’un enseignement de meilleure qualité. Voici les principales stratégies de mobilisation de ressources relevées par les enseignantes et les enseignants consultés :
• Solliciter le soutien de ses pairs afin de bénéficier de leurs conseils et de leurs rétroactions par rapport à divers aspects de ses pratiques enseignantes
• Procéder à l’observation de l’enseignement de collègues expérimentés
• Faire appel aux différentes personnes-ressources de son CFP (conseiller pédagogique, orthopédagogue, travailleur social, etc.)
• Mobiliser son réseau professionnel de métier afin de bénéficier du soutien ponctuel de « spécialistes de terrain » pour des questions plus pointues (exemple : équipements spécifiques utilisés en industrie ou normes en vigueur dans les milieux de pratique)
Certaines des stratégies utilisées par le personnel enseignant consulté renvoient directement aux actions mises en place dans leur enseignement. Comme elles permettent d’optimiser le choix et l’effet des stratégies d’enseignement-apprentissage et favorisent la différenciation pédagogique, elles sont indubitablement au service du bienêtre de l’élève. Voici les trois stratégies principales notées par les participants et participantes :
• Bien planifier son enseignement afin d’anticiper les difficultés ou les imprévus, réfléchir à leurs solutions en amont de la période d’enseignement et assurer une bonne fluidité et continuité dans le processus d’enseignement-apprentissage
• Utiliser fréquemment l’évaluation formative pour valider l’efficacité des méthodes d’enseignement et d’apprentissage utilisées, obtenir des informations cruciales au sujet des besoins des élèves, orienter ses interventions futures et éviter les pertes de temps
• Instaurer et entretenir de bonnes relations avec les élèves afin de les connaitre, de comprendre leurs défis et de leur apporter l’aide et le soutien dont ils ont besoin
Dans le but de se sentir efficaces dans leur vie professionnelle, plusieurs enseignants s’efforcent d’adopter des attitudes ou des comportements associés au bienêtre. Voici quelques-unes des stratégies mentionnées par les personnes participantes à la recherche :
• Aborder ses tâches avec entrain et se centrer sur les aspects positifs de son travail, surtout dans les moments plus difficiles
• S’engager dans les tâches et la vie de son CFP afin de se sentir utile, valorisé et important (exemples : participation à des comités ou à des activités promotionnelles de son CFP
• Pratiquer un sport ou un loisir que l’on affectionne particulièrement afin de maintenir un niveau d’énergie adéquat pour enseigner et préserver un équilibre entre sa vie personnelle et professionnelle
Afin de se sentir efficaces, les enseignants et enseignantes de l’étude ont également fait part de l’importance d’assurer leur perfectionnement professionnel. Les stratégies qu’ils ont répertoriées touchent autant l’aspect pédagogique que disciplinaire du travail enseignant :
• Suivre des formations et s’autoformer afin de rester près du métier enseigné et de mettre à jour ses connaissances
• Faire partie de regroupements stratégiques comme être membre d’un conseil d’administration d’une entreprise ou d’une association de métier, ce qui permet de « garder un pied sur le terrain »
Ces stratégies offrent l’occasion au personnel enseignant de demeurer à l’affût des changements et des nouveautés associés à leur champ d’expertise. En plus de garantir une formation de qualité répondant aux besoins du marché du travail, le fait de demeurer relativement près de son ancien univers de travail permet de mettre plus facilement en contact des employeurs potentiels et des élèves finissants. En ce sens, nul doute que ces stratégies influencent le bienêtre des élèves!
Le bienêtre de l’élève est touché de près par le sentiment d’efficacité personnelle du personnel enseignant qui intervient auprès de lui. L’étude sur les croyances d’efficacité des nouveaux enseignants et enseignantes de la FP a permis de retenir quatre familles de stratégies utilisées par les enseignants du milieu de la formation professionnelle pour augmenter leur SEP. Précisons que ces stratégies peuvent servir plus largement à tout projet dans la communauté éducative s’intéressant au sentiment d’efficacité personnelle et peuvent inspirer tout particulièrement les enseignants et enseignantes à la recherche de moyens pour augmenter leur SEP et ce, quel que soit le niveau scolaire (primaire, secondaire, collégial, universitaire) dans lequel ils œuvrent. Mais peu importent les stratégies employées, gardons en tête que favoriser le développement du SEP du personnel enseignant aura des incidences non négligeables sur son bienêtre et sur celui des élèves.
Photo : iStock
Première publication dans Éducation Canada, septembre 2021
Bandura, A (2019). Auto-efficacité. Comment le sentiment d’efficacité personnelle influence notre qualité de vie (3e édition). De Boek Supérieur.
Beaucher, C. et Breton, S. (2020). Formation professionnelle. Les élèves de moins de 21 ans ont-ils un projet professionnel qui les anime? Éducation Canada, 60(2). https:// edcan.ca/articles/formation-professionnelle/?lang=fr
Galand, B et Vanlede, M. (2004). Le sentiment d’efficacité personnelle dans l’apprentissage et la formation : quel rôle joue-t-il? D’où vient-il? Comment intervenir? Savoirs, 5 (hors série), 91-116.
Gibson, S. et Dembo, M. H. (1984). Teacher efficacy: A construct validation. Journal of Educational Psychology, 76, 569-582.
Vianin, P. (2018). Le bien-être de l’élève et l’autoefficacité. Dans N. Rousseau et G. Espinosa (Dir.), Le bien-être à l’école. Enjeux et stratégies gagnantes (p. 85-108). Les Presses de l’Université du Québec.
Réguler ses émotions exige que l’on puisse les reconnaître et les nommer lorsqu’elles se manifestent (p. ex. la joie, l’excitation, la frustration, la colère), et que l’on comprenne leurs effets sur notre corps, nos pensées, notre comportement et nos expressions. Il nous faut aussi savoir ce qui nous amène à nous sentir ainsi et disposer de stratégies pour mieux composer avec elles. La recherche démontre que la régulation des émotions est une compétence qui peut être enseignée et se développer au fil de notre vie.
Il est important d’aider les apprenants à prendre conscience de leurs émotions et à les nommer. Vous pouvez par exemple les aider à reconnaître les émotions de personnages dans des livres et à les relier à leur expérience personnelle à l’aide de questions telles : « Comment se sent le personnage? Pourquoi se sent-il ainsi d’après toi? Que pourrait-il faire pour se sentir autrement? Et toi, que ferais-tu? »
Il est utile d’enseigner un large éventail de stratégies de régulation émotionnelle telles que la respiration consciente, la relaxation musculaire progressive, la pensée positive et la réévaluation positive (c.-à-d. recadrer une perspective négative à l’égard d’une chose pour la rendre positive). Commencez par enseigner des stratégies accessibles sur le coup (comme la respiration consciente) et que les élèves connaissent déjà. Expliquez en quoi consiste la stratégie, et pourquoi, comment et quand elle peut être utilisée.
Mettez les stratégies en pratique lorsque les élèves sont calmes plutôt que sous le coup d’une émotion. Lorsque les jeunes sont plus réactifs sur le plan émotionnel, il leur est difficile de penser de manière rationnelle. Dans une classe, cela peut vouloir dire d’intégrer chaque jour quelques minutes de pleine conscience durant l’heure du cercle ou de la réunion de classe. Cette pratique aide les élèves à se familiariser avec la stratégie et permet l’établissement de voies neurales qui rendront les stratégies plus accessibles au besoin.
Intégrez le soutien à la régulation émotionnelle au quotidien (p. ex., en cas de conflit, vous pouvez aider les apprenants à mettre en pratique les stratégies enseignées). Vous pourriez aussi fournir aux élèves des espaces où ils pourront se réfugier pour retrouver leur calme au besoin. Il est important pour les enfants et les adolescents de pouvoir choisir et d’utiliser les stratégies avec lesquelles ils se sentent à l’aise et qui répondront le mieux à leurs besoins.
Il est important d’être attentif à la façon dont nos comportements donnent des directives implicites et influencent le développement des compétences des élèves. Il pourrait être utile que les adultes décrivent certains des processus de régulation afin que les enfants puissent voir et entendre comment réguler les émotions. En situation difficile, il est aussi essentiel que les adultes utilisent eux-mêmes ces stratégies pour rester calmes afin d’aider les autres à réagir efficacement à la situation.
Les parents et le personnel enseignant jouent un rôle essentiel pour soutenir les élèves et leur enseigner les compétences et les stratégies nécessaires pour réguler leurs émotions. La recherche a démontré que lorsque les élèves sont en mesure de bien réguler leurs émotions, ils ont tendance à ressentir une amélioration de leur santé et de leur bienêtre, à faire preuve d’une plus grande résilience sur le plan affectif (c.-à-d. bien réagir aux situations stressantes), à avoir des interactions plus positives avec leurs camarades et à réussir mieux à l’école et à la maison.
*Dans ce document, le masculin est employé comme genre neutre.
Dès la fermeture des écoles en mars 2020, les parents d’élèves ont été aux premières loges, souvent désemparés, pour constater les effets de la pandémie et des changements dans la fréquentation scolaire sur leurs enfants. Dans ces circonstances exceptionnelles, les parents ont entre autres observé un manque de motivation des jeunes, des difficultés d’adaptation à l’école à distance et une baisse des résultats scolaires après la réception du premier bulletin, selon les résultats de sondages réalisés par la Fédération des comités de parents du Québec (FCPQ) depuis le début de l’année scolaire 2020-2021. À titre d’exemple, des parents dont les enfants réussissent bien à l’école en temps normal ont constaté une baisse des résultats scolaires de leurs jeunes, qui ont souffert du manque de socialisation et d’activités motivantes. Ces parents, sans offre de soutien supplémentaire pendant plusieurs mois, se sont sentis isolés et impuissants pour accompagner leurs enfants vers la réussite.
Dès mai 2020, 63 % des 43 000 parents ayant participé à un sondage de la FCPQ indiquaient ne pas pouvoir offrir un encadrement et un soutien adéquats à leurs enfants dans un contexte d’école à distance. Les parents ont rapidement tiré la sonnette d’alarme pour demander du soutien au milieu scolaire et au gouvernement.
Nous devons toutefois souligner que, malgré les difficultés et les choix effectués dans le reste du pays, le gouvernement québécois a pris la décision de rouvrir les écoles primaires à l’extérieur du Grand Montréal au printemps et a priorisé de garder toutes les écoles ouvertes depuis la rentrée 2020-2021, sauf en cas d’éclosions. Pour les parents, l’école en présence est garante d’une plus grande réussite des élèves, notamment des élèves en difficulté ou ayant des besoins particuliers. En effet, le personnel scolaire est davantage en mesure de remarquer les difficultés et d’offrir du soutien et des services lorsque les élèves sont physiquement à l’école. L’école assure aussi un filet social pour les élèves vulnérables qu’il est primordial de garder en place. Lorsque les écoles ont fermé au printemps 2020, de nombreux élèves bénéficiant de services éducatifs et de soutien personnalisés se sont retrouvés sans cet accompagnement.
Les élèves de 3e à 5e secondaire (10e et 12e année) qui n’étaient physiquement à l’école qu’un jour sur deux ont été particulièrement touchés par les baisses de résultats et le manque de motivation. L’école à distance a chamboulé les modes d’apprentissage et la concentration, ce qui a eu un effet sur les résultats scolaires et le bienêtre des élèves.
La perspective du retour à la « normale », pour nos écoles et l’ensemble de la société, est donc accueillie avec soulagement par plusieurs. Elle est cependant vue avec appréhension par d’autres. La normale ne signifie pas le meilleur dans tous les domaines et pour tout le monde.
La pandémie a exacerbé des problèmes qui existaient déjà. Nous pouvons penser à la pénurie de personnel scolaire et à la désuétude de bâtiments, qui sont discutées dans l’espace public et qui méritent l’attention des décideurs. Le retour à la « normale » ramène ces défis et plusieurs autres sur la table.
Les comités de parents mettent de l’avant un autre enjeu qui a été mis en lumière pendant la pandémie : les communications entre l’école et les familles. Dans l’impossibilité de se rendre à l’école pour rencontrer les enseignantes et enseignants, beaucoup de parents ont constaté que les communications bidirectionnelles entre l’école et la maison peuvent être difficiles. Il s’agit parfois d’un manque de volonté de communiquer d’un côté ou de l’autre, mais d’autres facteurs peuvent aussi expliquer ces difficultés, tels que le manque de temps, le choix du moyen de communication ou le manque d’information sur l’importance de ces communications.
Pourtant, l’implication et la collaboration de tous les adultes entourant l’enfant est un facteur clé de sa réussite. Chacun a son rôle à jouer pour accompagner les élèves, c’est ce qu’on appelle la coéducation. La compréhension de son rôle et du rôle des autres est primordiale pour mener à bien cette mission. C’est pourquoi il faut défaire les silos entre l’école et la maison, pour le bénéfice des élèves.
Pourquoi la participation des parents est-elle importante? De nombreuses études montrent l’importance de l’engagement parental dans la réussite éducative et une des formes que peut prendre cet engagement est la communication avec l’école (Beauchesne, 2021).
La pandémie est un obstacle qui a perturbé nos façons de faire, mais nous pouvons aussi la voir comme une occasion de cibler des problèmes et d’améliorer les processus dans le milieu scolaire.
Les parents ont leur mot à dire et ont leur place à l’école, en tant que premiers responsables de l’éducation de leurs enfants, mais aussi parce que leur engagement est porteur de réussite pour les élèves. Ce fait démontré est cependant méconnu, non seulement des équipes-écoles, mais aussi des parents eux-mêmes.
Un grand nombre de parents ont toutefois réalisé pendant la pandémie que leur implication dans l’éducation de leurs jeunes et dans le milieu scolaire était nécessaire et que leurs expériences et expertises pouvaient apporter beaucoup.
En conclusion, les parents « après-COVID » voudront faire partie des discussions et des solutions et n’accepteront plus d’être des spectateurs du milieu scolaire. Nous entamons dès maintenant une réflexion sur le retour à la normale de l’école et sur les façons d’améliorer cette normalité en réfléchissant à ces questions :
Les parents veulent et doivent faire partie de cette conversation. La FCPQ consulte les comités de parents qu’elle représente pour préparer le retour à la normale, tirer des leçons de la pandémie et de l’école à distance et ainsi proposer des améliorations au milieu scolaire, pour le bienêtre et la réussite de nos jeunes.
La Fédération des comités de parents du Québec a pour mission, depuis près de 50 ans, la défense et la promotion des droits et des intérêts des parents et des élèves des écoles publiques primaires et secondaire du Québec, en vue d’assurer la qualité des services éducatifs et la réussite de tous les élèves. La FCPQ représente les comités de parents de la forte majorité des centres de services scolaires, dans toutes les régions du Québec.
Photo : Adobe Stock
Première publication dans Éducation Canada, juin 2021
Résultats de quatre sondages réalisés par la FCPQ depuis le début de l’année scolaire 2020-2021 auprès des parents d’élèves, https://www.fcpq.qc.ca/sites/24577/%c3%89tat%20des%20lieux%20-%204%20sondages(1).pdf
Résultats d’un sondage réalisé du 22 au 25 mai 2020 par la FCPQ, https://www.fcpq.qc.ca/sites/24577/CG_30mai2020_Re%cc%81ponses_Sondage-e%cc%81clair.pdf
Beauchesne, R. (mars 2021). Vivre la démocratie comme collaborateur de la gestion de son école. Revue Action Parents, p.4-5. https://www.fcpq.qc.ca/fr/archives/2021/action-parents-volume-44-numero-3
Les employés des écoles primaires et secondaires sont beaucoup plus exposés au stress chronique et à l’épuisement professionnel que ceux des autres professions. Cette situation a des répercussions non seulement sur leur santé, mais aussi sur le bienêtre et la réussite scolaire de leurs élèves. Elle entraîne également des coûts importants pour les conseils scolaires et centres de services et perturbe le recrutement des leaders, en plus de miner le moral des employés. En raison du stress supplémentaire causé par la pandémie, les écoles, les conseils scolaires et centres de services cherchent plus que jamais des moyens de soutenir leur personnel. Elles ont besoin de solutions qui s’attaquent aux problèmes sous-jacents, tels que les lourdes charges de travail et les cultures de travail toxiques.
Depuis 2019, le Réseau ÉdCan dirige une plateforme de sensibilisation appelée Bien dans mon travail afin de souligner la nécessité de faire du bienêtre du personnel scolaire une priorité absolue en matière de politiques et d’investissement. Depuis, notre organisme élargit son réseau et compte des membres en éducation, en recherche ainsi que des représentants de groupes canadiens qui se consacrent à améliorer le bienêtre des employés des écoles primaires et secondaires.
De 2021 à 2023, ÉdCan poursuivra ses initiatives de sensibilisation, mais s’efforcera surtout de catalyser ses interventions de concert avec une grande variété de partenaires de la plateforme Bien dans mon travail 2.0. À l’aide d’une approche non directive, les dirigeants et dirigeantes du milieu scolaire de tout le Canada qui sont prêts à passer à l’action bénéficieront de soutien afin d’élaborer et de mettre en œuvre des stratégies individuelles, organisationnelles et systémiques pour améliorer le bienêtre du personnel de la maternelle jusqu’à la fin du secondaire. Quatre solutions sont mises de l’avant :
ÉdCan remercie les 75 parties prenantes qui ont généreusement consacré du temps pour faire part de leur expertise et de leurs perspectives pendant l’élaboration de ces solutions. Nous sommes impatients de collaborer à nouveau pour accroître la capacité du réseau et coordonner les efforts des leaders du milieu scolaire, leur permettant ainsi de concevoir des actions adaptées à leur contexte qui soutiendront les efforts collectifs à long terme.
Nous communiquerons sous peu des détails sur Bien dans mon travail 2.0. Entre temps, vous pouvez parcourir notre catalogue grandissant de ressources sur le bienêtre au travail à : www.edcan.ca/well-at-work/?lang=fr.
Première publication dans Éducation Canada, juin 2021
Les élèves et le personnel du primaire et du secondaire qui font partie de la communauté BIPOC (Noirs, Autochtones et personnes de couleur) ont un niveau inférieur de bien-être. Pourtant, l’intérêt grandissant à l’égard des démarches de mieux-être comme la pleine conscience, l’apprentissage socio-émotionnel, les pratiques tenant compte des traumatismes et l’autorégulation peuvent causer du tort aux élèves et aux éducateurs racisés et mener à une appropriation culturelle (c.-à-d., adoption de certains aspects d’une culture qui ne font pas partie de la nôtre). Ces démarches de mieux-être négligent souvent les expériences et points de vue uniques des élèves et du personnel de la communauté BIPOC.
Le bien-être est systémique. Quand on aborde le bien-être comme une expérience individuelle, on ne tient pas compte des effets néfastes du racisme systémique, de la suprématie blanche et du colonialisme, qui créent des milieux peu accueillants, discriminatoires et risqués pour les élèves de la communauté BIPOC. Cette approche ne tient pas les différents systèmes responsables d’avoir créé et perpétué des préjudices qui pourraient prendre les formes suivantes :
1) Il n’y a pas d’approche universelle. L’identité – comme la race, le genre, la sexualité, les habiletés, la classe sociale et la foi – doit être au cœur même des démarches de mieux-être.
2) Évitez d’adopter une approche qui attribue à l’individu la source et la solution à son bien-être et adoptez plutôt une approche systémique. Cela signifie d’identifier et d’ébranler les structures et les politiques qui ont des effets disproportionnés sur l’accès à des ressources, les possibilités et les résultats des élèves et du personnel racisés.
3) Tissez des liens significatifs avec les élèves, employés, familles et communautés pour comprendre leur expérience des préjudices institutionnels (p. ex., placement dans un pensionnat indien).
4) Intégrer de nombreuses interprétations et approches du bien-être qui valorisent les besoins physiques, sociaux, affectifs, cognitifs et spirituels des enfants et du personnel.
En omettant de reconnaître la profondeur et l’ampleur du racisme systémique, nous concentrons notre attention sur les symptômes et non sur les causes fondamentales de la réussite et du bien-être. Nous nous attendons à ce que les élèves et les employés surmontent individuellement les nombreux obstacles structurels qui leur barrent la route. Les écoles qui adoptent une approche systémique s’attardent plutôt à cerner et à modifier les façons dont les préjugés contre les Noirs et les Autochtones et d’autres formes de racisme se répercutent sur le bien-être des élèves et du personnel. Chaque élève et chaque éducateur méritent de se sentir en sécurité, appréciés et membres à part entière de leur école.
Dei, G.J.S. (2008). Schooling as community: Race, schooling, and the education of African youth. Journal of Black Studies, 38(3), 346-366.
Dion, S. (2014). The listening stone: Learning from the Ontario Ministry of Education’s First
Nations, Métis and Inuit–focused collaborative inquiry 2013-2014. http://www.ontariodirectors.ca/downloads/Listening_Stone/Dion_LS_Final_Report%20Sept_10-2014-2.pdf
James, C. E. (2012). Students “at risk”: Stereotyping and the schooling of black boys. Urban Education, 47(2), 464-494.
James, C.E. & Turner, T. (2017). Towards race equity in education: The schooling of Black students in the Greater Toronto Area. https://edu.yorku.ca/files/2017/04/Towards-Race-Equity-in-Education-April-2017.pdf?x60002
Thompson, R. (2020, Sept. 29). Addressing trauma in the K-12 workplace: The impact of racial trauma on Black and non-white educators. https://www.edcan.ca/articles/addressing-racism-in-the-k-12-workplace/
Lorsque le début de la pandémie a entraîné la fermeture des écoles et perturbé le quotidien des directions de district comme moi, je me suis jointe à un petit groupe de travail composé du personnel du Réseau ÉdCan et de collègues de notre Conseil consultatif pour participer à un important processus virtuel de planification. Nous avons alors entamé une série de réunions ayant pour objet de trouver les moyens que notre Réseau pourrait prendre pour soutenir au mieux les éducateurs* des élèves du primaire et du secondaire au Canada. Après plusieurs itérations, notre équipe de création a approuvé avec enthousiasme les trois priorités suivantes visant à répondre à l’évolution rapide des possibilités et des défis auxquels font face actuellement nos systèmes d’éducation :
C’est sur ces priorités que portait la réunion virtuelle de décembre 2020 du Conseil consultatif du Réseau ÉdCan. (La toute première réunion du Conseil avait eu lieu en 1891, à Montréal.) Nous continuerons d’explorer les manières dont nous pourrons, tout au long de 2021, harmoniser nos priorités avec les ministères de l’Éducation, les corps professoraux, les directions de conseils scolaires, ainsi qu’avec les directions, les enseignants et les autres membres du personnel scolaire qui nous soutiennent, alors que nous nous efforçons d’augmenter la capacité, l’autoefficacité et le bienêtre de nos 110 000 membres, et par leur entremise, de rehausser le bienêtre de chacun des élèves et les possibilités d’apprentissage significatif à leur disposition, pour les aider à découvrir leur buts et leur voie dans la vie.
* Dans ce document, le masculin est employé comme genre neutre.
Pour obtenir de plus amples renseignements sur la théorie du changement, les retombées prévues et les priorités stratégiques du Réseau ÉdCan, veuillez consulter le site : www.edcan.ca
Pour savoir qui sont les chefs de file en éducation et en philanthropie qui siègent au Conseil consultatif du Réseau ÉdCan, veuillez consulter le site www.edcan.ca/council
Première publication dans Éducation Canada, janvier 2021
Il y a fort à parier qu’en commençant l’année scolaire 2021-2022, la plupart des membres du personnel scolaire, des élèves et des parents se remémoreront les derniers mois, étranges pour tous, stressants et démotivants, pour d’autres. Certains auront vu le reflet de leur réalité dans notre numéro de septembre sur l’instabilité générale et le stress à l’école. Si la plupart estiment avoir perdu des acquis, pris du retard et raté des occasions, en raison de la pandémie, il est probable que personne ne voudra que l’école revienne exactement comme elle était avant. Pourquoi? C’est simple! L’école d’avant était bien, mais pas parfaite. La santé publique qui a forcé tout le monde à fonctionner différemment nous a, malgré nous, fait voir des améliorations possibles.
Il semble y avoir un consensus général sur l’amélioration que l’école peut réaliser en ce moment : réduire les iniquités entre les élèves. Le Magazine ÉdCan a suivi de près cette prise de conscience globale sur l’équité cet automne en publiant en ligne des articles ponctuels sur l’Équité à l’ère de la COVID-19. Dans ce numéro qui réunit ces articles, on peut lire, notamment dans le texte de Thierry Karsenti (pg. 26) la détresse des familles à faible revenu, dépassées par leur rôle d’accompagnement dans le cadre de l’enseignement à distance. De même, on profitera des descriptions de Boutouchent et Fournier (pg. 36) illustrant chacune le quotidien de leur classe en contexte linguistique minoritaire et décrivant les défis accentués par les consignes sanitaires et par le manque de socialisation naturelle nécessaire à la confiance des locuteurs, petits et grands.
Ce numéro ne s’attarde pas uniquement aux défis. Les auteurs offrent de généreuses pistes d’action qui assureront la transition entre une école qui se réinvente par des approches équitables pour tous et la très excitante série d’articles du mois de mars (en ligne de février à avril) qui fera le pont entre les compétences du XXIe siècle à développer chez tous les élèves et les objectifs de développement durable de l’UNESCO. Des objectifs dont la nature pourrait redonner à chacun ce qu’il juge avoir perdu en ces temps d’instabilité en le marquant d’un espoir profond en un monde meilleur.
Photo : Adobe Stock
Première publication dans Éducation Canada, janvier 2021
Envoyez vos commentaires et propositions d’articles à redaction@edcan.ca. Joignez-vous à la conversation en utilisant le #EdCan sur Twitter et Facebook.
Le principe d’empreinte écologique qui permet de mesurer la pression que l’être humain exerce sur la nature nous est tous familier. Puisque nous comprenons désormais que les émotions sont contagieuses et, parmi elles, le stress, nous devons apprendre à mesurer et à régir notre empreinte émotionnelle dans nos milieux de vie, bien avant de demander aux autres de mieux gérer leurs humeurs. Cette notion fait ici référence à la portée et à l’influence des émotions sur notre environnement.
Le stress est contagieux. Sans le savoir, nous pouvons contaminer nos proches et eux, réciproquement, peuvent nous transmettre inconsciemment leurs tensions. Il s’agit de la résonnance du stress. Celle-ci fait partie des découvertes récentes en neuroscience qui ont prouvé qu’il existe bel et bien des relations humaines toxiques et que nous pouvons influencer ces échanges nuisibles en favorisant le bienêtre et la régulation émotionnelle dans nos divers milieux de vie. Plus le lien est signifiant entre les personnes, plus celles-ci sont vulnérables devant le transfert du stress. Ainsi, plus le personnel enseignant passe du temps avec les jeunes dans un espace éducatif, plus il peut les exposer à leur stress et vice-versa. C’est pourquoi les spécialistes en neuroscience nous invitent à apprendre à gérer notre stress et nos émotions avant même d’essayer de neutraliser ceux de nos proches. D’ailleurs, il a été démontré que lorsque les parents ou les enseignants autorégulent leur anxiété, le stress des enfants chute de moitié. Le bienêtre des adultes a un effet direct sur celui des jeunes et il favorise l’apprentissage. Les liaisons émotionnelles et relationnelles qui unissent une personne à son entourage sont assujetties à ses propres états d’âme. Voilà l’importance de mettre en place des approches et des stratégies qui favoriseront de saines habitudes de vie émotionnelles et relationnelles pour TOUS dans les écoles.
L’adoption d’un mode de vie actif et d’une alimentation saine est un facteur déterminant pour être en bonne santé. Pas étonnant que, depuis notre plus tendre enfance on nous martèle, à grands coups de slogans, qu’il faut manger cinq fruits et légumes par jour et faire trente minutes d’activité physique quotidiennement !
Mais depuis quelques années, des chercheurs abordent de plus en plus cette notion de saines habitudes de vie émotionnelles et relationnelles, concept émergent qui doit désormais être intégré au spectre des saines habitudes de vie telles qu’on les connaît déjà. Ces habitudes saines prennent toute leur importance en situation de crise. Elles auraient également une incidence positive sur la santé globale et la longévité. Selon Robert Waldinger, psychiatre de l’université Harvard et 4e directeur d’étude longitudinale sur la santé et le bonheur chez l’être humain, qui a duré 75 ans, c’est la qualité des relations sociales qui nous rendrait heureux et pourrait même contribuer à nous garder en bonne santé. Être proche de sa famille, de ses amis et de sa communauté serait bon pour nous ; ces connexions sociales contribuent à une vie plus longue et saine. Mais pour favoriser des relations de qualité, nous devons apprendre à mieux gérer nos émotions. Voilà pourquoi nous devons intégrer les saines habitudes de vie émotionnelles et relationnelles dans le spectre des saines habitudes de vie en plus de l’activité physique et de la saine alimentation.
On pourrait même se risquer à dire qu’elles sont plus importantes, puisqu’elles motiveront et guideront nos choix à travers l’ensemble des habitudes de vie et nous permettront d’optimiser notre bonheur et de bonifier notre espérance de vie. Alors, pourquoi ne pas faire la promotion des habitudes de vie émotionnelles et relationnelles durant cette pandémie? Pourquoi tant de campagnes gouvernementales sur des programmes de conditionnement physique et une alimentation saine, mais rien sur ces habitudes-là ? Est-ce une phobie collective qui nous empêche de voir notre monde émotionnel et relationnel, si capital à l’équilibre mental ?
De plus, les habitudes émotionnelles et relationnelles saines ont une influence sur l’ambiance au travail, sur la réussite éducative, sur l’engagement en faveur de la culture, de la communauté et, plus largement, de la société. Elles font la promotion de la diversité inclusive entre les personnes, élément essentiel en ce XXIe siècle qui évolue dans un esprit de mondialisation. Elles favorisent une plus grande harmonie familiale, une meilleure communication intergénérationnelle et permettent la mise en place d’approches collaboratives. Bref, elles ne peuvent qu’être positives.
En contexte de pandémie, au-delà des mesures de santé publique, les autorités doivent mettre en place des stratégies collaboratives pour favoriser la bienveillance au travail, car le bienêtre des enfants à l’école passe par celui du personnel scolaire (Goyette, 2019 ; Oberle et Schonert-Reichl, 2016). Les approches collaboratives, intégrées au curriculum de l’école, doivent prioriser le développement des compétences émotionnelles et relationnelles telles qu’une bonne conscience de soi, une bonne gestion des émotions et une valorisation du sentiment d’efficacité personnelle et collective.
Il est plus que temps de renverser la vapeur et de prendre soin de nous en adoptant de saines habitudes de vie émotionnelles et relationnelles. Voici quelques bienfaits :
En offrant des ressources d’aide psychosociale et émotionnelle aux enseignants, nous construisons des milieux bienveillants, positifs et sécurisants pour les élèves. Nous maintenons ainsi un climat sain qui favorise l’apprentissage. La santé mentale des intervenants scolaires doit devenir la priorité des autorités, car quand on prend soin des adultes on soutient les enfants qui leur sont confiés dans leur développement optimal.
https://fondationjasminroy.com/coffre-a-outils/
https://fondationjasminroy.com
Photo : iStock
Première publication dans Éducation Canada, janvier 2021
Goyette, Nancy (2019). Le bien-être et la passion en enseignement : un défi incontournable et réalisable pour les enseignants du secondaire, Conférence présentée à la Commission de l’enseignement secondaire du Conseil supérieur de l’éducation, 15 mars 2019.
Oberle, Eva et Kimberly A. Schonert-Reichl (2016). « Stress contagion in the classroom? The link between classroom teacher burnout and morning cortisol in elementary school students », Social Science & Medecine, 159, juin, p. 30-37.
Depuis plusieurs années, les écoles canadiennes se sont dotées de politiques inclusives pour accueillir la diversité de leurs élèves; elles guident le personnel enseignant vers des pratiques respectueuses de l’Autre ou de l’élève qui diffère de la norme. En principe, l’école est passé d’une culture d’intégration scolaire où l’élève marginalisé est soumis aux mêmes normes que les autres à une culture inclusive dont les pratiques sont respectueuses de l’Autre.
Malgré de nouvelles politiques inclusives, les recherches démontrent que pour plusieurs, l’inclusion scolaire demeure un processus difficile à mettre en pratique. Trop d’élèves se trouvent encore exclus ou marginalisés en raison de leurs différences, entre autres, les élèves ayant une déficience intellectuelle ou une incapacité physique, les nouveaux arrivants qui ne parlent pas la langue d’accueil ainsi que les élèves issus de familles dysfonctionnelles. Si ces iniquités existaient avant la Covid-19, la pandémie risque non seulement de renforcer ces inégalités, mais aussi d’en créer de nouvelles. Pour faire de cette période d’instabilité une occasion de passer des principes inclusifs aux pratiques inclusives, nous proposons dans cet article que le changement doit commencer par notre regard sur la diversité qui est appelé à changer pour devenir plus « dénormalisant », c’est-à-dire, moins fondé sur la norme.
Revenons à la fin des années soixante. Le climat social qui règne à cette époque est à l’origine d’actions collectives et d’engagements politiques qui procurent une lueur d’espoir à ceux et celles qui se trouvent marginalisés par leurs différences. À l’école, les changements sont significatifs. Le mouvement américain des droits civiques devient un fondement important pour l’émancipation des personnes ayant un handicap intellectuel et, par ricochet, pour l’inclusion scolaire. Au fil des ans, on met en œuvre des politiques scolaires qui permettent aux élèves ayant un handicap ou étant en difficulté d’apprentissage ou d’adaptation de fréquenter la salle de classe pour y recevoir une éducation jugée juste et égale à celles des élèves que l’on perçoit comme faisant partie de la norme.
Plus de cinquante ans plus tard, nous nous retrouvons dans un contexte semblable à celui des années soixante. Le mouvement américain Black Lives Matter et les rassemblements contre la discrimination systémique faite envers les peuples autochtones du Canada nous obligent à franchir une étape de plus vers l’égalité et la démocratisation du peuple nord-américain. Encore une fois, notre vision de la société est appelée à changer et l’école n’y fait pas exception. Mais cette fois-ci, le mécontentement politique et social se déroule au beau milieu d’une pandémie mondiale.
En mars 2020, l’éclosion de la COVID-19 ébranle le monde entier. Au sein des écoles, c’est la consternation. Au mois de septembre, pour respecter les mesures de distanciation physique et le fait que certains élèves travaillent à domicile, le personnel enseignant doit rapidement repenser sa préparation et la livraison des cours. Les questions sont multiples, certaines au sujet de la vulnérabilité des élèves reliée à la COVID-19 méritent une réflexion approfondie. Par exemple :
En espérant contribuer quelques éléments de réponses à ces questions, nous entamons notre réflexion avec ces paroles du Président John F. Kennedy, prononcées en 1957 : « Dans la langue chinoise, le mot “crise” est composé de deux caractères – le premier représente danger, le second, occasion ». Dans cet esprit, en raison de la pandémie, est-il logique de dire qu’il existe un « danger » pour l’inclusion scolaire et que ce danger offrirait des occasions de grandir ?
Inspirées du mouvement des droits civiques aux États-Unis et des critiques grandissantes au sujet des écoles spécialisées (Ramel et Vienneau, 2016), les règles établies dans les années soixante visent l’intégration des élèves ayant une déficience intellectuelle légère en classe avec les autres et reflètent les valeurs et les principes de la normalisation. L’intention était d’offrir aux élèves ayant une incapacité mentale ou physique considérés comme éducables les mêmes conditions scolaires qu’aux autres élèves. Ces décisions politiques mirent fin à une certaine forme de ségrégation telle qu’on la connaissait à cette époque et, dans plusieurs écoles canadiennes, il fut compris que dorénavant, l’élève « exceptionnel » aurait le droit d’être intégré au sein de la classe ordinaire à moins qu’il soit démontré qu’il serait préférable de faire autrement.
Le mouvement de l’intégration scolaire s’appuie d’ailleurs sur deux croyances : le placement des élèves à besoins particuliers dans la classe ordinaire contribue à l’épanouissement et au succès de tous les élèves et l’idée que les enfants en situation de handicap sont davantage semblables aux autres enfants qu’ils en sont différents (Lipsky et Gartner, 1989). Mais, on ne peut le nier, en raison de son handicap et par définition, l’élève « exceptionnel » est différent. Au sein de sa nouvelle classe, il est appelé à entrer dans un moule prédéfini par la normativité sociale. Malgré les dispositifs de soutien qui sont mis en place, cet élève risque constamment d’être exclu pédagogiquement et socialement de son groupe-classe. En 1981, Pekarsky nous a fait prendre conscience que le coût que doit payer l’élève vivant en situation de handicap lorsqu’on lui demande constamment de se conformer aux normes de la salle de classe est trop élevé et que cette pratique ne peut plus être tolérée. En d’autres mots, si la normalisation a permis au mouvement d’intégration de prendre son envol, elle cause problème lorsqu’on désire réellement « inclure » parmi les autres élèves celui ou celle qui se trouve en situation de vulnérabilité. Il y aurait sans doute lieu d’affirmer que l’inclusion scolaire était déjà à risque avant la venue de la pandémie.
Depuis les années 1980, le regard que l’on porte sur les différences a évolué et, par conséquent, les nouvelles politiques en matière d’inclusion le reflètent. Si le mouvement de l’intégration était centré sur les incapacités de l’élève, l’inclusion soutient que « les difficultés scolaires d’un élève sont perçues comme une conséquence de ses interactions avec son environnement et non comme une conséquence de ses incapacités » (Beauregard et Trépanier, 2010). L’école inclusive vise à répondre aux besoins de chaque élève et fait valoir que chaque enfant compte. En plus des élèves ayant une incapacité, on tente également d’inclure les élèves à risque d’être marginalisés et exclus en raison de leur différence, soit, par exemple, ceux et celles jugés différents en raison de leur orientation sexuelle, de leur origine ethnique, de leur sexe, de leur religion ou de leur situation économique. Cette liste est longue. D’après nous, la seule chose qui soit normale, c’est que nous sommes toutes et tous différents. Larochelle-Audet et al. (2018), abondent dans le même sens lorsqu’elles disent que :
[…] la diversité humaine n’est pas un problème, ni même une richesse, c’est un état de fait : elle est là sous toute ses formes. C’est la construction sociale négative des caractéristiques, préférences, expériences ou besoins qui en font des problèmes dans un contexte donné. […] En d’autres mots, le problème n’est pas la diversité humaine, mais ce qu’on en fait dans la société et dans le milieu scolaire (p. 10).
Cela étant dit, nous croyons que la normalisation est à l’intégration scolaire ce que la dénormalisation est appelée à devenir pour l’inclusion (AuCoin et Vienneau, 2015). La dénormalisation est non seulement une façon de faire, mais également un état d’être. Cet état nous permet de voir le monde comme un tout et de réaliser que chaque individu y contribue à sa manière en toute dignité. La dénormalisation signifie l’acceptation, la compassion, l’empathie, la tolérance, l’entraide et le respect de l’Autre. Pour faire le lien avec la salle de classe, la dénormalisation nous invite à penser autrement la composition de son groupe-classe. Au lieu de chercher les défis et les incapacités de chacun des élèves, commençons au contraire par trouver ce que l’élève peut accomplir. Sans cela, le concept d’inclusion scolaire, soit celui de permettre à tous les élèves de participer activement et de contribuer au groupe-classe, est en risque de se fragiliser ou, pire, de ne jamais être développé à son potentiel.
Si chaque élément négatif contient aussi du positif, la pandémie pourrait-elle nous offrir l’occasion de franchir une étape de plus vers l’équité et de faire de la dénormalisation une nouvelle norme au sein du système scolaire? Dans cette évolution, voici deux considérations importantes pour nous assurer de ne pas perdre les gains réalisés depuis les cinquante dernières années en matière d’inclusion.
Étant donné que les fondements associés au mouvement de l’intégration scolaire proviennent surtout du monde médical et, de ce fait, se concentrent davantage sur les déficits à combler, pour que l’inclusion soit réussie voici ce que nous devons faire :
Malgré les gains importants qui ont été réalisés dans le domaine de l’inclusion scolaire au cours des dernières décennies, les défis demeurent encore nombreux (UNESCO, 2020). D’après nous, c’est en adoptant un regard plus dénormalisant que nous allons relever ces défis. Voici quelques pistes à suivre :
Pour conclure, la COVID-19 nous a démontré que personne n’est à l’abri de la vulnérabilité et que nous devons pouvoir compter les uns sur les autres pour survivre. Au lieu de voir les différences comme des obstacles, ne serions-nous pas gagnants de les accueillir ? Comme Albert Jacquard (1978), nous sommes d’accord pour dire que « notre richesse collective est faite de notre diversité. L’« Autre », individu ou société, nous est précieux dans la mesure où il nous est dissemblable ». Comment tirer avantage de cette situation précaire pour repenser notre regard sur la diversité? Si on se fie au proverbe « chaque chose en son temps » … en matière d’inclusion scolaire, la COVID-19 nous laisse entrevoir que ce temps est arrivé!
Photo : iStock
Première publication dans Éducation Canada, janvier 2021
AuCoin, A. et Vienneau, R. (2015). L’inclusion scolaire et la dénormalisation : proposition d’un nouveau paradigme. Dans N. Rousseau (dir.), La pédagogie de l’inclusion scolaire (3e éd., p. 65-87). Presses de l’Université du Québec.
Beauregard, F. et Trépanier, N. S. (2010). Le concept d’intégration scolaire… mais où donc se situe l’inclusion ? Dans N. S. Trépanier et M. Paré (dir.), Des modèles de service pour favoriser l’intégration scolaire (p. 31-56). Presses de l’Université du Québec.
Danforth, S. (dir.). (2017). Becoming a great inclusive educator (2e éd.). Peter Lang.
Larochelle-Audet, J., Magnan, M.-O., Potvin, M. et Doré, E. (2018). Les compétences des directions en matière d’équité et de diversité : pistes pour les cadres de référence et la formation. Rapport de recherche : Observatoire sur la formation à la diversité et l’équité. Université du Québec à Montréal.
Lipsky, D.K. et Gartner, A. (1989). Beyond separate education: Quality education for all. Paul Brooks Publishing
Pekarsky, D. (1981). Normalcy, exceptionalty and mainstreaming. Journal of Education. 163,4, 320-334.
Ramel, S. et Vienneau, R. (2016). Des fondements sociologiques de l’inclusion scolaire aux injonctions internationales. Dans L. Prud’homme, H. Duschesne, P. Bonvin et R. Vienneau (dir.), L’inclusion scolaire : ses fondements, ses acteurs et ses pratiques (ch. 1, pp. 25-38). DeBoeck.
UNESCO. (2020). Inclusion and education: ALL means ALL. Global Education Monitoring Report. https://bit.ly/3hVFGga
En cette période de crise sanitaire liée à la pandémie de la COVID-19, les acteurs éducatifs mettent tout en œuvre pour garantir les acquis, poursuivre les apprentissages des élèves et sauver l’école. Les parents d’élèves sont plus que jamais sollicités pour accompagner les enfants dans leur processus d’apprentissage. Cet accompagnement se traduit le plus souvent par l’aide aux devoirs, la clarification de certains contenus d’apprentissage, l’appui à l’utilisation des outils informatiques, etc. Or, afin de pouvoir jouer pleinement ce rôle d’accompagnateur à domicile, les parents doivent avoir un minimum de connaissances de la langue d’enseignement, des outils informatiques et de certains contenus d’apprentissage. Ils doivent également disposer des ressources nécessaires afin de répondre adéquatement au besoin de leur enfant. Tous les parents immigrants remplissent-ils de telles conditions?
Les parents allophones (ne parlant ni anglais ni français) ou défavorisés (désavantagés sur le plan économique, social ou culturel) sont essentiellement issus de l’immigration récente qui constitue présentement l’un des principaux facteurs d’accroissement de la population canadienne. À l’instar des autres pays occidentaux, le Canada a reçu plus de 1,2 million d’immigrants entre 2011 et 2016, soit environ 250 000 personnes par année (Statistique Canada, 2017). Selon ce même organisme, un peu plus du cinquième (21,9 %) de la population canadienne était née à l’extérieur du pays et 47,2 % de ces personnes parlent le plus souvent une langue autre que le français et l’anglais à la maison. Bien que la majorité de cette population déclare connaitre une langue officielle du Canada, ou les deux, il n’en demeure pas moins qu’il existe des familles où ces deux langues ne sont pas d’usage courant à domicile. Alors, comment peuvent-elles accompagner efficacement leur enfant dans leurs apprentissages quand elles ne comprennent pas la langue de la scolarisation? En temps normal, ces familles ont le plus souvent recours à des structures d’accueil qui les accompagnent dans le processus d’établissement à travers, notamment l’apprentissage de la langue et de la culture de leur nouveau milieu ainsi que la découverte des règlements et protocoles sociaux qui peuvent ne pas paraitre évidents pour un nouvel arrivant. Toutefois, le fonctionnement de ces organismes est aussi perturbé par la pandémie et les proches-aidants qui les assistent de manière informelle sont aussi soumis au respect des mesures barrières de distanciation physique et sociale.
En plus de cette situation linguistique défavorable, des études décrivent les conditions socioéconomiques peu reluisantes de certains parents immigrants. Dans une étude menée dans les écoles dites défavorisées de Montréal, Kanouté et al. (2016) ont identifié plusieurs situations caractérisant les familles immigrantes telles que « la sous-scolarisation de certains parents, le chômage d’autres pourtant très instruits, le cumul de vulnérabilités d’un nombre significatif d’entre eux ». Boudarbat et Grenier (2014) soulignent que les parents immigrants sont « surreprésentés parmi les travailleurs pauvres titulaires d’un diplôme universitaire » (p.117) parce qu’ils n’ont pas toujours accès aux emplois correspondant à leurs attentes (Boudarbat et Cousineau, 2010). Pour ces auteurs, le niveau de scolarité de cette catégorie de population n’est pas toujours une garantie contre le risque de faible revenu comme chez les membres de la société d’accueil.
En milieu francophone minoritaire du Canada, la situation semble plus complexe. En plus des contraintes spécifiques au contexte (insuffisance de ressources, emplois limités, etc.), les immigrants vivent généralement dans une situation de « double minorisation ». (Gilbert et al., 2014; Lacassagne, 2010). Veronis et Huot (2019) expliquent ce phénomène par « l’appartenance, à la fois, à une minorité linguistique et, pour la plupart, à une minorité visible ». Dans le contexte minoritaire francophone, comme le peuple acadien, la communauté franco-ontarienne, fransaskoise ou autre, on peut même parler de triple minorisation : minorité culturelle, minorité linguistique et minorité visible.
En tenant compte des différentes réalités des familles immigrantes, des auteurs tels que Javdani, et al. (2012) parlent d’un « niveau élevé de chômage dans l’ensemble et d’un niveau de revenu plus faible que les Canadiens de souche ». La situation est encore plus complexe pour les parents immigrants allophones et monoparentaux. Dès lors, comment faire face aux sollicitations et à certaines exigences de l’école en termes de soutien à l’apprentissage de l’enfant en temps de pandémie quand ils peinent à satisfaire aux besoins primaires (par exemple, besoins physiologiques et de sécurité) de la pyramide de Maslow? Comment fournir des outils informatiques et un réseau Internet de qualité à la maison quand ils vivent dans une situation financièrement précaire et ne sont pas admissibles à l’assurance chômage, par exemple, pour les parents non encore résidents? Il est facile de s’imaginer qu’un enfant déjà défavorisé à plusieurs égards et privé d’outils de base pour apprendre, deviendrait vite anxieux ou pourrait perdre intérêt dans les matières scolaires.
Sans prétendre à une recette magique, la démarche peut s’envisager en trois étapes :
La démarche peut être résumée par le constat, la collecte d’informations, la communication, l’exploration des solutions, la mobilisation des ressources et l’appui. L’école et la société ont tout à gagner en visant l’équité dans l’inclusion scolaire des élèves immigrants. Plus ceux-ci s’épanouiront comme personnes, plus ils seront aptes à contribuer à leur communauté d’accueil.
Photo: Adobe Stock
Boudarbat, B. et Grenier, G. (2014). « L’impact de l’immigration sur la dynamique économique du Québec ». Rapport remis au ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion. http://www.midi.gouv.qc.ca/publications/fr/recherchesstatistiques/ETU_ImmigrProsperite_BoudarbatGrenier.pdf (Consulté le 10 octobre 2015).
Boudarbat, B., et Cousineau, J.-M. (2010). « Un emploi correspondant à ses attentes personnelles? Le cas des nouveaux immigrants au Québec ». Journal of International Migration and Intégration/Revue de l’intégration et De la Migration Internationale, 11(2), 155–172.
Gilbert, A. Brosseau, M; Veronis, L. et Ray, B. (2014). La frontière au quotidien: expériences des minorités à Ottawa- Gatineau, Ottawa, Les Presses de l’Université d’Ottawa.
Javdani, M., Jacks, D. and Pendakur, K. (2012). « Immigrants and the Canadian Economy ». Metropolis British Columbia Capstone Report.
Kanouté, F., Lavoie, A., Guennouni, R. et Charrette, J. (2016). « Points de vue d’acteurs scolaires et d’intervenants communautaires sur les besoins d’élèves immigrants et de leur famille dans des écoles défavorisées à Montréal ». Revista Electrónica Interuniversitaria De Formación Del Profesorado, 19(1), 141-155.
Lacassagne, A. (2010). « Le Contact interculturel francophone de Sudbury (CIFS) : francophones avant tout ! Exemple d’un interculturalisme réussi ». Reflets : revue d’intervention sociale et communautaire, 16(2), 202-213.
Martin, Thibault (2011). « Intégration professionnelle des immigrants francophones dans le secteur des nouvelles technologies : une étude de cas au Manitoba ». Revue du Nouvel-Ontario, 35-36, 107-136.
Statistique Canada. (2017). « Immigration et diversité ethnoculturelle : faits saillants du Recensement de 2016 ». https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/171025/dq171025b-fra.htm.
Veronis, L. et Huot, S (2019). « La pluralisation des espaces communautaires francophones en situation minoritaire : défis et opportunités pour l’intégration sociale et culturelle des immigrants », Francophonie d’Amérique, 46-47, automne 2018, printemps 2019.
L’école est un milieu d’apprentissage, mais c’est aussi un milieu de travail. Dans ce numéro, nous examinons le stress du personnel et des élèves du primaire et du secondaire comme étant les deux côtés d’une même médaille. Nous y abordons les réalités de l’épuisement professionnel du personnel à travers des comptes rendus tirés d’expériences vécues, examinons la relation qui existe entre le stress du personnel et celui des élèves et offrons de nouvelles perspectives et méthodes visant à l’atténuer. Ce thème s’inscrit dans le prolongement de l’initiative Bien dans mon travail du Réseau ÉdCan, qui reconnaît les conséquences néfastes du stress, de l’anxiété, de la violence et de l’intimidation sur les élèves et le personnel scolaire, ainsi que sur l’ensemble de la culture scolaire. La complexité croissante des besoins des élèves, le manque de soutien adéquat accordé aux enfants ayant des besoins spéciaux, les relations difficiles ou abusives (entre pairs, parents-enseignants, directeurs-enseignants, administrateurs-directeurs ou autres), les attentes démesurées ou les traumatismes portent atteinte à la santé mentale de l’ensemble de la communauté scolaire. Le stress et l’épuisement professionnel chez les élèves et le personnel du primaire et du secondaire sont interconnectés, affectant le bien-être des uns et des autres, l’efficacité de l’enseignement et, partant, les résultats scolaires.
Chaque journée passée en classe avec les élèves amène son lot de défis et de frustrations : les imprévus, les crises, les attentes de tout un chacun, les émotions en ébullition, les dossiers qui s’empilent et les moments de doute et de découragement. Comment garder la tête hors de l’eau et apprivoiser chaque moment avec sérénité, lorsqu’il est si facile de s’y perdre ? Les deux autrices suisses, Katia Lehraus et Françoise Stuckelberger-Grobéty, proposent une démarche simple : la pleine conscience.
Ciblant d’emblée les enseignantes et les enseignants du primaire, Bien dans ma classe au quotidien grâce à la pleine conscience démystifie la pleine conscience pour les personnes débutantes en alliant théorie, pratique et méditations guidées. La première partie de l’ouvrage invite à l’établissement d’un diagnostic de l’environnement. Par le biais de fiches d’exploration personnelle et de questions pointues, on identifie les attentes, les contingences, les valeurs, les automatismes et les responsabilités affectant ou influençant le déroulement d’une journée d’enseignement. Cette section est efficace dans sa portée et sa présentation.
Les autrices enchaînent avec la partie pratique de l’ouvrage, où elles expliquent le concept de pleine conscience (mindfulness, dans le texte) et guident pas à pas l’intégration de cette pratique dans une journée d’enseignement. Au moyen de courtes méditations animées, on apprend à s’ancrer dans le moment présent, à vivre ce moment dans sa globalité et à agir sur celui-ci au lieu d’uniquement y réagir. Le chapitre 8 est révélateur car il aide à séparer les pensées des faits avérés, tout en rappelant qu’on ne peut changer une situation, mais qu’on peut changer notre relation à celle-ci. La technique de la pleine conscience étant plutôt simple, cette deuxième section se révèle répétitive et quelque peu infantilisante.
La pleine conscience permet de développer la confiance en soi et la tolérance aux imprévus en fournissant des outils pour gérer les émotions et les doutes inhérents à l’enseignement. L’ouvrage Bien dans ma classe au quotidien grâce à la pleine conscience révèle sa pertinence par l’introspection qu’il propose et par les techniques qu’il met de l’avant. Il s’adresse toutefois principalement aux débutants : si vous connaissez la pleine conscience, pratiquez le yoga ou maîtrisez la respiration océanique et la marche consciente, cet ouvrage vous laissera sur votre faim. Autrement, il s’avère une porte d’entrée intéressante pour qui souhaite apprendre à porter attention au présent et à vivre pleinement.
Lehraus, K. et Stuckelberger-grobéty, F., Bien dans ma classe au quotidien grâce à la peine conscience (Bruxelles : De Boeck Supérieur, 2019).
Photo : Dave Donald
Première publication dans Éducation Canada, septembre 2020