Teacher and student wearing masks and bumping elbows

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Bienêtre, Communauté scolaire, Pratiques prometteuses

Faire du bienêtre de l’élève une priorité pour tous et toutes

Mais comment?

L’école se trouve être le milieu où l’élève passe la plupart de son temps. Ainsi, cet endroit s’avère une voie cruciale pour favoriser le bienêtre des élèves, mais là n’est pas sa seule mission. Promouvoir le bienêtre à l’école est une affaire dans laquelle interviennent plusieurs groupes de personnes : personnel enseignant, personnel administratif et même parents.

Débutant en fin 2019, la pandémie de COVID-19 que nous suivions dans les médias partout dans le monde est vite devenue la réalité de la planète entière. Aux quatre coins du monde, la pandémie a bousculé le système d’éducation. La fermeture d’écoles à répétition et l’enseignement à distance ont quant à eux bouleversé le quotidien des élèves, des enseignant.e.s et du personnel scolaire qui devaient, chacun de leur côté, s’adapter à cette nouvelle réalité jusqu’à une date indéterminée. Pour ce faire, plusieurs initiatives prometteuses ont vu le jour afin de permettre la continuité de l’école et des activités d’enseignement : réaménagement des espaces de cours; division des groupes d’élèves; formation à distance; planification des cours et adaptation des contenus; trousses d’enseignement à la maison, etc.

Par ailleurs, la pandémie a occasionné du stress et du mal-être généralisés sur la planète. La situation impose jusqu’à présent des ajustements pour chacun et chacune : télétravail, enseignement et apprentissage à distance, garde des enfants à la maison, licenciement d’employé.e.s, etc. Face à cette situation et à la pression vécue collectivement, le bienêtre des personnes s’avère l’enjeu attirant l’attention particulièrement en milieu scolaire.

Adopter la psychologie positive pour comprendre le bienêtre

Parler de bienêtre semble corréler avec l’essor de la psychologie que l’on appelle positive, d’où les termes « science du bienêtre » ou « champ d’investigation du bienêtre » qu’on lui donne dans les écrits. Bien que l’idée de s’intéresser au positif remonte à plusieurs années, le courant est en émergence depuis une vingtaine d’années et, tout récemment, même si la fin de la pandémie de COVID-19 semble difficile à prédire, la psychologie positive post-pandémique semble gagner du terrain.

Considérant la psychologie comme une discipline ayant préconisé pendant longtemps le travail sur les faiblesses et les aspects négatifs de la personne, la psychologie positive met la lumière sur les aspects positifs de l’être humain et tout ce qui va bien chez lui (Gaucher, 2010). Elle va en effet à l’encontre de l’idée stipulant l’existence d’une psychologie totalement tournée vers les souffrances.

Pour bien comprendre les deux aspects liés à la psychologie positive, Gable et Haidt (2011) l’ont comparée à une médaille qui a deux côtés, soit un négatif et un positif. Cet exemple met en relief le fait que les personnes opérant dans ce champ reconnaissent entièrement l’existence d’aspects désagréables, mais sont attentives à l’autre côté prometteur de la médaille qui fonctionne bien. Plus concrètement, il s’agit de se tourner vers les personnes épanouies et qui ressentent de la joie au lieu de ne se préoccuper que de celles qui souffrent. Cela rejoint les propos de Lecomte (2014) selon lesquels le fait d’adopter la psychologie positive ne consiste pas à voir le monde avec des lunettes roses dans le sens où l’attention ne devrait pas être mise que sur ce qui est idéal et parfait.

Depuis quelques années, tant la communauté de la pratique que celle de la recherche ne cessent de s’intéresser à la question du bienêtre à l’école en vue de promouvoir une santé mentale positive en milieu scolaire. On parle désormais d’éducation positive qu’on perçoit comme une approche fondée sur les compétences psychosociales des élèves autant que scolaires, considérant ces multiples avantages documentés dans les recherches comme susceptibles de promouvoir le bonheur, de favoriser la satisfaction à l’égard de la vie, de l’apprentissage, de la réussite, de la créativité et, à long terme, d’avoir une bonne santé physique. À titre d’exemple, il est admis que les enfants réussissent le mieux quand ils sont encouragés et reçoivent des compliments de leurs parents.

Comprendre la santé mentale dans une approche positive

L’Organisation mondiale de la Santé considère une bonne santé mentale comme un état de bienêtre qui permet à la personne de surmonter les tensions quotidiennes de la vie, d’accomplir du bon travail et de servir sa collectivité. De fait, à n’importe quel moment, toute personne peut faire face à un élément perturbateur ou à une difficulté qui affecte son bienêtre. La santé mentale peut être envisagée comme un continnum1 de couleur à trois zones :

  • La zone rouge, couleur qui signifie généralement l’urgence, englobe les problèmes de santé mentale les plus graves nommés « maladies mentales », comme la dépression, nécessitant une intervention dans la plupart des cas ou encore de la médication.
  • La zone jaune reflète l’état de détresse ou de stress que peuvent occasionner les pressions normales de la vie quotidienne telles qu’un stress préexamen ou une simple dispute avec un (e) ami(e).
  • La zone verte représente la situation la plus paisible, soit une bonne santé mentale se manifestant par des attitudes positives, de l’assurance et de l’estime de soi. Citant ici le cas d’un(e) élève épanoui(e) dans son entourage, qui participe aux activités parascolaires de son école ou l’élève confiant(e) qui prend souvent la parole en classe ou en groupe.

Ainsi, il semble que globalement les élèves passent à un moment ou à un autre en zone jaune et parviennent à regagner la zone verte par la suite. Cela dit, ils peuvent se trouver à un moment donné en période difficile qui s’avère généralement passagère du fait qu’ils arrivent à surmonter la situation et ressentent à nouveau du bienêtre, processus qu’on nomme dans les écrits « l’adaptation » ou « l’ajustement ». Pour comprendre ces situations, il s’avère incontournable de se pencher sur ce qui a aidé l’élève à éprouver du bienêtre par le biais d’une observation approfondie visant à démystifier les changements qui ont pu avoir lieu entre-temps. Plus spécifiquement, il s’agit de cibler les stratégies personnelles employées par l’élève pour traverser la situation stressante. À titre d’exemple, un élève pourrait se contenter d’évitement ou de repli sur soi pour oublier la situation et passer à autre chose alors qu’un autre pourrait demander l’aide de son enseignant ou enseignante ou de ses parents.

Quelques ressources prometteuses pour promouvoir le bienêtre des élèves

D’après le conseil supérieur de l’éducation du Québec2, les nombreux et sérieux facteurs impliqués dans la santé mentale exigeraient la planification de mesures comblant les différents domaines d’influence soit l’école, la collectivité, le/la jeune, ses camarades et sa famille tout au long du cheminement scolaire. Ainsi, écoles et / ou parents doivent trouver les meilleures façons de soutenir le bienêtre des élèves. Pour ce faire, voici quelques pistes d’action :

Pour les écoles

  • Utiliser la trousse de la santé mentale positive3 élaborée par le Consortium conjoint pancanadien pour les écoles en santé (CCES) qui est une bonne ressource pour la promotion de l’adoption de pratiques et perspectives prometteuses en santé mentale positive à tous les niveaux scolaires. En effet, en plus d’informations pertinentes en la matière, la trousse renferme un outil dont les écoles peuvent se servir pour évaluer les pratiques tout en obtenant des stratégies personnalisées en vue d’améliorer la santé mentale dans les écoles au profit des élèves, du personnel enseignant et du personnel administratif.
  • Créer des espaces de discussions entre les élèves permettant des échanges constructifs afin de chasser l’idée de stigmatisation de la maladie mentale largement documentée en recherche. Ceci afin de permettre à l’élève de demander de l’aide au besoin et surtout d’en parler quand il ne va pas bien.
  • Soutenir le bienêtre du personnel scolaire en vue de promouvoir celui des élèves. C’est d’ailleurs ce que reconnaît le ministère de l’Éducation en Ontario dans son guide « Vers un juste équilibre : pour promouvoir la santé mentale et le bienêtre des élèves »4 qui peut être une bonne ressource à exploiter. Par ailleurs, « Favoriser le bienêtre des élèves et des enseignants » un guide à l’intention du personnel scolaire élaboré par Papazian-Zohrabian et Mamprin est une autre ressource prometteuse en ce sens5.
  • Avoir recours, pour plus de bienêtre en classe, à la méditation de pleine conscience, laquelle s’avère une approche à la portée des enseignants et enseignantes. Le livre Bien dans ma classe au quotidien grâce à la pleine conscience, de Lehraus, K. et Stuckelberger-Grobéty, F. (2019), est un bon guide, particulièrement pour les enseignants du primaire.

Pour les familles et les écoles

  • Miser sur des initiatives permettant le développement du sentiment d’efficacité personnelle (SEP) et la résilience des élèves. La recherche documente la corrélation du sentiment d’efficacité personnelle, perçu selon Bandura comme étant la conviction de la personne en sa capacité à accomplir une tâche donnée avec succès et la capacité de se rétablir après une difficulté et d’aller de l’avant malgré les embûches de la vie, et le bien-être des élèves. En outre, la résilience des élèves semble être un moyen non négligeable d’assurer le bien-être des élèves, et la trousse de la santé mentale positive citée plus haut explore davantage cet aspect en offrant différentes stratégies prometteuses en vue de favoriser la résilience des élèves.
  • Mettre en œuvre des activités qui peuvent favoriser le sentiment de bienêtre. Plusieurs études démontrent que se remémorer de bons souvenirs ou même se projeter positivement dans le futur proche, par exemple, « voyager dans le temps » augmente le bienêtre. À titre d’exemple, créer une boite à souvenirs contenant des écrits comme des lettres ou d’autres objets facilitant le retour aux bons souvenirs et le fait d’anticiper chaque soir des éléments positifs du futur proche, comme le lendemain, s’avèrent être des pistes documentées dans les écrits.
  • Favoriser la bienveillance chez les élèves par le biais d’activités ou de la promotion d’une bonne conduite. La recherche indique que la bienveillance constitue une voie gagnante pour promouvoir le sentiment de bienêtre des élèves. En ce qui a trait aux activités, par exemple, le collège catholique « Mer Bleue » en Ontario a mis en œuvre des ateliers périodiques portant sur la bienveillance6. Au cours de ceux-ci, tous les mercredis, les élèves d’un même niveau travaillent avec le même enseignant ou la même enseignante pendant 75 minutes au développement de la confiance, de l’ouverture, de l’appartenance, de la stabilité et des relations saines et durables.  En ce qui a trait à la promotion de bons comportements, le livre de Jane Nelson La discipline positive : en famille, à l’école, comment éduquer avec fermeté et bienveillance semble être une bonne ressource pour les parents et le personnel scolaire qui souhaitent adopter des méthodes d’éducation positives et aider l’enfant à s’épanouir en milieu familial et scolaire.
  • Favoriser la création de pistes de dialogues entre l’école et les familles pour réfléchir aux meilleures façons de soutenir le bienêtre.

Conclusion

Considérant le nombre grandissant d’initiatives et de pistes prometteuses en ce qui concerne le bienêtre des élèves dont quelques-unes sont citées plus haut, l’école constitue un lieu clé pour assumer ce rôle. Surtout dans un contexte de pandémie, il devient de plus en plus urgent de se mobiliser pour favoriser le bienêtre. Ainsi, il ressort que le bienêtre est la priorité de tous mais surtout la responsabilité de tous. C’est donc en travaillant ensemble, familles et écoles, que nous pourrons envisager le bienêtre de chacun, celui des élèves et de leur entourage.

 

Photo : iStock

Première publication dans Éducation Canada, septembre 2021

 

Références

Gable, S. et Haidt, J. (2011). Qu’est-ce que la psychologie positive (et pourquoi) ? Dans C. Martin-Krumm et C. Tarquinio, Traité de Psychologie Positive: fondements théoriques et implications pratiques (pp. 30-40). Bruxelles : De Boeck.

Gaucher, R. (2010). La psychologie positive: Ou l’étude scientifique du meilleur de nous-mêmesÉditions L’Harmattan.

 Lecomte, J. (2014). Introduction à la psychologie positive. Dunod.

 

Notes

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Zina Kharchi

Doctorante, Université du Québec à Trois-Rivières

Zina Kharchi est doctorante à l’Université du Québec à Trois-Rivières et chercheuse étudiante à la chaire de recherche sur les enjeux de la diversité en éducation et en formation (CREDEF) de l’Université du Québec à Montréal. Elle s’intéresse à la psychologie positive et à l’immigration.

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