Teacher laughing with group of students

|
Enseignement, Leadership, Pratiques prometteuses

Le retour à l’humain

Et si…

Quelle année nous venons de vivre! Et si tout ce que nous vivons présentement était en train de nous préparer à dispenser l’éducation que nous espérons depuis si longtemps? À mon humble avis, dans l’optique d’un retour à la normale, nous sommes à une croisée des chemins déterminante. Quand on pense au niveau d’engagement des élèves, au taux de réussite ou à la quantité non négligeable d’élèves ayant un rythme d’apprentissage différent avant et pendant la pandémie, quand on pense à la santé mentale des adultes et des élèves présentement, je me dis qu’il serait sage de réfléchir et de repenser la place et le sens de l’éducation. Le sens. Que visons-nous en éducation? On a souvent l’impression que les élèves viennent à l’école pour entrer dans le moule, pour obéir, pour faire le travail ou pour performer. À certains moments de l’année, on peut aussi avoir l’impression que les élèves viennent à l’école pour regarder les adultes travailler. Il faut répondre aux exigences du système après tout. Et si le système était au service des êtres humains qui le fréquentent? Pour créer l’école de l’après-pandémie, il importe de réfléchir aux finalités de l’éducation. Et si la visée ultime du système était de propulser l’être?

Voici, selon mon expérience en tant qu’accompagnateur, cinq concepts importants et quelques questions de fond pour propulser le système d’éducation dans l’après-pandémie :

Intégrité 

Il va sans dire qu’un système d’éducation de qualité nécessite un leadership d’impact. Pour moi, le leadership, c’est l’effet positif que nous avons sur notre devenir et sur le devenir des personnes autour de nous. Dans mon vécu, le point de départ en leadership, c’est l’intégrité. On ne peut pas exiger des autres ce qu’on n’exige pas de soi-même. Les gens apprennent davantage de nos actions que de nos paroles. Qu’avons-nous modelé jusqu’à présent depuis le début de la pandémie? De façon bien constructive, la question se pose parce que les adultes et les élèves autour de nous nous regardent et, depuis un an, ils apprennent comment agir et réagir en contexte de pandémie. Être modèle, ça ne veut pas dire essayer d’être quelqu’un d’autre. C’est être pleinement soi-même et vivre intentionnellement selon ses valeurs.

Quelles valeurs guideront nos actions au quotidien dans l’après-pandémie?

Humilité 

Dans Awaken The Giant Within, Tony Robbins affirme : « La qualité de votre vie reflète la qualité des questions que vous vous posez ». Habituellement en éducation, nous nous posons peu de questions, car nous « savons ». Dans la dernière année, nous avons eu une occasion en or d’être des modèles d’apprenants pour nos élèves. C’est probablement la chose la plus importante que nous ayons enseignée à nos élèves. Qu’est-ce qu’on fait quand on ne sait pas? Nous devons avoir l’humilité de reconnaître que nous ne savons pas tout. L’humilité favorise la remise en question et le travail d’équipe. Dans le doute, aurons-nous l’humilité de nous poser des questions comme :

Qu’est-ce qui nous échappe présentement?

Interdépendance 

Si la pandémie nous a appris une chose, c’est que nous sommes interdépendants. Ce n’est qu’ensemble que nous pouvons la combattre. Nos actions ont un impact sur la réalité des autres et sur l’environnement. Qui ne se rappelle pas avoir vu les images de Venise où nous pouvions voir le fond de l’eau après très peu de temps d’inactivité humaine. Comment cette situation se transfère-t-elle à l’éducation? Pour voir clair, il faut parfois prendre une pause pour réfléchir. Comment mes gestes ont-ils un effet sur les autres et sur notre environnement de travail? La transformation de l’éducation, ça commence par soi. Je dois donc prendre soin de moi, pour toi, pour nous. Et tu dois prendre soin de toi, pour moi, pour nous.

Comment allons-nous prendre soin de nous afin d’améliorer l’éducation?

Persévérance 

En regardant le chemin parcouru jusqu’à maintenant, il est raisonnable d’affirmer que nous avons tous été déstabilisés par la pandémie. Mais quelle persévérance nous avons démontrée! Par exemple, certains disent qu’on a fait en quelques mois dix ans de progrès en matière d’intégration du numérique. D’autres affirment que la collaboration entre collègues n’a jamais été aussi présente. La pandémie nous aura permis de nous rallier autour de notre « pourquoi ». Parce que le « comment », lui, a changé. En effet, bon nombre de nos façons de faire ont été remises en question. Notre « pourquoi », quant à lui, donne son sens à tout ce que nous faisons et n’a jamais eu autant d’importance. Il est beaucoup plus facile de persévérer lorsque le « pourquoi » est clair.

Quel pourrait être notre « pourquoi » dans l’après-pandémie?

Innovation 

Le monde de l’éducation a changé de trajectoire en 2020. Des choses considérées comme immuables ont été les premières à bouger. Rappelons-nous, les épreuves ministérielles et les examens de fin d’année ont été annulés rapidement. Cette année, les systèmes éducatifs poursuivent dans la même veine. On diminue l’importance de la performance et on se donne le temps d’apprendre. On donne une place à la trajectoire. Comme dans la gestion de la pandémie, la courbe est plus importante que les données du jour. La trajectoire, la progression des élèves est plus importante que leurs résultats un jour donné. Est-ce ça innover? La pandémie nous ramène à l’essentiel, au processus : l’humain en devenir. Les humains ne sont pas faits pour être isolés et mesurés. En personne ou en ligne. Bref, on ne réduit pas les humains à leurs résultats. Pour devenir qui ils sont, pour réaliser leur potentiel, les humains ont besoin d’être placés dans des conditions favorables à leur épanouissement. L’innovation en éducation, nous le vivons, ce n’est pas une question d’outils ou de ressources. C’est une question de relations humaines, de processus et de pédagogie.

Dans l’école de l’après-pandémie, qu’est-ce qui change pour l’élève?

Le retour à la normale 

L’école de l’avant-pandémie n’existe plus. Or, nous en avons appris des choses au cours de la dernière année. Des choses que nous ne pouvons pas ignorer. En ce sens, j’aime bien cette citation de Platon : « On peut aisément pardonner à l’enfant qui a peur de l’obscurité; la vraie tragédie de la vie, c’est lorsque les hommes ont peur de la lumière ». Dans mon vécu en éducation, la peur nous prive du progrès beaucoup plus que les obstacles et les échecs.

Et si le retour à la normale signifiait un retour à l’humain?

N’ayons pas peur. Propulsons l’être.

Photo : Adobe Stock

Première publication dans Éducation Canada, juin 2021

Apprenez-en plus sur

Marius Bourgeoys

Marius Bourgeoys

Cofondateur d’escouadeÉDU, conférencier, coach et consultant

Marius est présentement conférencier, coach et consultant. Il met sa passion pour le leadership au service de l’éducation. Sa mission est d’aider et d’inspirer les leaders à exprimer leur pl...

Découvrir

Il vous reste 5/5 articles gratuits.

Mon compte Rejoignez notre réseau