ipad au secondaire

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Design technopédagogique

L’utilisation de l’iPad en classe au secondaire

Retour sur plus de cinq ans d’expérimentation

Dans le cadre d’une recherche visant à documenter l’utilisation de l’iPad par des enseignants d’une école secondaire du Saguenay–Lac-Saint-Jean, 15 enseignants ont participé à une entrevue semi-dirigée afin de faire le point sur plus de cinq ans d’utilisation de cet outil. Les résultats montrent que l’iPad est fort avantageux, entre autres, pour varier les formules pédagogiques et favoriser la créativité des élèves.

 Introduction

Depuis 2012, une école secondaire québécoise favorise l’intégration pédagogique de l’iPad. Chaque élève possède son propre appareil mobile, lequel est utilisé en classe et à la maison. Dès le début, une équipe de l’Université du Québec à Chicoutimi s’est jointe au projet à des fins de recherche et d’accompagnement pédagogique. En 2017, quinze enseignants ont participé à une entrevue semi-dirigée afin de décrire l’évolution de leur utilisation de la tablette en classe. L’article qui suit dresse un portrait, du point de vue des enseignants, des principales retombées de l’utilisation de l’iPad pour l’enseignement et des défis rencontrés relativement à son implantation. Les enseignants interrogés proposent également quelques recommandations afin d’optimiser l’utilisation de cet outil technologique dans leur classe.

Principales retombées de l’utilisation de l’iPad pour l’enseignement

Selon les enseignants rencontrés, la tablette facilite les communications et le partage de documents, permet de varier les formules pédagogiques tout en suscitant la créativité des élèves et soutient la vulgarisation de certains concepts.

Plusieurs enseignants utilisent le portail de l’école comme moyen de communication et de dépôt de documents pour leurs élèves. À cet égard, ils apprécient le caractère portable de la tablette, sa légèreté et le fait qu’elle soit toujours accessible. Cela leur permet d’interagir rapidement avec leurs élèves, de répondre à leurs questions, de communiquer des informations supplémentaires ou de dernière minute, de les avertir d’un évènement spécial, etc. Les élèves ont dès lors accès sur leur tablette, en tout temps, à leurs enseignants ainsi qu’aux documents utiles pour leurs cours. Les documents déposés sont principalement des exercices ou des notes de cours préparés par l’enseignant. Selon eux, ces documents permettent aux élèves d’avoir moins de notes à prendre et donc de se concentrer davantage en classe.

Plusieurs enseignants mentionnent aussi que la tablette permet de varier les formules pédagogiques. Par exemple, pour évaluer les acquis des élèves de façon formative, plusieurs vont utiliser certaines applications ou des sites Internet (ex. : Kahoot, Plickers), dynamisant dès lors leur enseignement. La tablette permet également l’utilisation de médias d’enseignement plus variés (ex. : vidéos, extraits sonores, exemples visuels) et la diversification des moyens utilisés par les élèves pour réaliser leurs travaux, favorisant ainsi leur la créativité (ex. : une vidéo pour un projet visant le développement de compétences orales, le photoroman pour présenter un contenu historique, une vidéo de type « stop motion » pour un projet artistique).

Dans le même ordre d’idées, principalement pour les enseignants en science et technologie et en mathématique, la tablette semble particulièrement utile pour vulgariser certains concepts plus abstraits à l’aide de vidéos ou d’animations issues d’applications. Un enseignant raconte à cet égard : «L’an passé, quand j’ai enseigné Pythagore, j’ai découvert une vidéo, que j’ai gardée, qui m’a permis de vraiment mieux faire comprendre aux jeunes ce qu’ils cherchaient.»

 Défis rencontrés relativement à l’implantation de l’outil

Depuis le début du projet, les enseignants avouent avoir rencontré quelques défis, dont le manque de temps et de connaissances technologiques et le maintien de l’attention des élèves.

Le manque de temps pour s’approprier la tablette ou des applications demeure la principale difficulté rencontrée par les enseignants. Ce long processus, qui engendre une certaine insécurité, constitue un ajout à une tâche de travail déjà lourde, ce qui peut contribuer à ralentir la transformation des pratiques. Ces enseignants témoignent toutefois de l’effort mis en place par leur direction afin d’offrir des formations de qualité leur permettant de mieux s’approprier leur nouvel outil de travail. Par exemple, des formations adaptées selon le niveau d’aptitude avec l’iPad leur sont offertes. Malgré cela, quelques enseignants signalent être encore plus ou moins à l’aise avec la tablette, en connaitre trop peu à l’égard de cet outil pour en faire un usage efficace dans leur classe.

Enfin, pour certains enseignants, le maintien de l’attention des élèves est difficile avec la tablette, et ce, malgré le système de gestion mis en place dans l’école. Des élèves jouent sur leur iPad pendant les cours ou clavardent avec leurs amis, ce qui peut être dérangeant pour l’enseignant et les autres élèves de la classe. Pour les enseignants, l’un des plus grands problèmes reliés à cet outil demeure sa gestion. Selon eux, plusieurs élèves y ont développé une forme de dépendance; à l’école, le jeu est devenu l’une des principales activités sur cet appareil qui devrait, au contraire, être utilisé majoritairement pour les apprentissages scolaires.

Quelques recommandations des enseignants

À la lumière de leur expérience dans ce projet, des enseignants font des recommandations à l’école afin d’optimiser l’utilisation de la tablette en classe. Deux se démarquent par leur récurrence; soit sensibiliser et encadrer davantage les élèves à l’utilisation efficace de la tablette et axer les formations ou l’aide apportée aux enseignants sur le fonctionnement des applications utiles dans leurs domaines respectifs.

D’une part, plusieurs croient que plus de sensibilisation et d’encadrement à l’égard de l’utilisation de cet outil devraient être faits auprès des élèves en vue de prévenir les comportements dérangeants ou inquiétants. Les enseignants aimeraient, par exemple, que des activités de sensibilisation à la dépendance au jeu soient réalisées au cours des cinq années du secondaire. Ils souhaiteraient aussi améliorer leur système de gestion de l’utilisation de l’iPad par les élèves et connaitre des moyens pour intervenir efficacement lorsque ces derniers utilisent leur tablette à mauvais escient.

D’autre part, pour introduire davantage la tablette en classe, plusieurs enseignants demandent de pouvoir participer à plus de formations durant lesquelles ils pourraient s’approprier des applications. Du temps serait ainsi consacré pour explorer les applications afin d’être plus à l’aise de les utiliser en classe par la suite. Un enseignant soutient ainsi cette idée : « C’est certain que si on m’arrive avec une application et qu’on me montre comment elle fonctionne, sans que j’aie à lire ou à bucher pour comprendre, j’aimerais ça.» Cette recommandation permettrait peut-être de combler le manque de temps, un facteur rapporté par la majorité des enseignants et semblant limiter l’utilisation de la tablette en classe.

Conclusion

En conclusion, les enseignants semblent grandement apprécier les avantages associés à l’intégration de la tablette en classe. À cet effet, certains précisent : « Pour ma part, la tablette a changé mon enseignement » et «Même si je ne suis pas très technologique, je ne retournerais pas en arrière». Des difficultés ont cependant été rencontrées par ces mêmes enseignants, notamment par rapport à la gestion de classe et au besoin de maitrise de l’outil. Or, faut-il attendre de maitriser totalement les outils avant de les intégrer en classe? Les étudiants de cette même école encouragent au contraire leurs enseignants à prendre des risques1 et la recherche indique que cette attente de maitrise peut parfois ralentir, voire empêcher, l’intégration efficace des TIC2.

 

Première publication dans Éducation Canada, décembre 2018


1 Giroux, P., Cody, N., Coulombe, S., Côté, L. et Gaudreault, S. (2016). Appréciation et perception du projet d’intégration des tablettes numériques au secondaire par les finissants de 2014-2015. Rapport de recherche. UQAC : Chicoutimi, Canada. Disponible en ligne : http://constellation.uqac.ca/3915/1/Rapportderecherche-QuepensentlesfinissantsduprojetiPad.pdf

2 Gremion, C., Cody, N., Coen, P.-F., Coulombe, S., Giroux, P. et Rebord, N. (2017). 12 commandements contre l’intégration des TIC. 9ème commandement : tu attendras que les enseignants maitrisent parfaitement les TIC avant de les laisser les intégrer dans leur enseignement. Éducateur, (2), 11-12.

Apprenez-en plus sur

Suzie Tardif

Chercheure, ÉCOBES - Recherche et transfert (Cégep de Jonquière)

Suzie Tardif est candidate au doctorat en éducation à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC) et chercheuse à ÉCOBES — Recherche et transfert, un centre de transfert technologique en pra...

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Alice Lemieux

Bachelière en éducation (B. Éd.), Université du Québec à Chicoutimi

Nadia Cody

Professeure chercheure, Université du Québec à Chicoutimi

Patrick Giroux

Professeur, Université du Québec à Chicoutimi

Sandra Coulombe

Professeure, Université du Québec à Chicoutimi

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