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Bien dans mon travail, Bienêtre, Leadership

Directeurs en santé, écoles en santé

Soutenir le bien-être des directeurs

 

Lorsqu’on pense au bien-être dans le domaine de l’éducation publique, celui des directeurs d’école a tendance à passer en dernier. Certaines parties prenantes souscrivent à la notion selon laquelle les directeurs doivent s’attendre à subir un certain degré de stress et de complexité au travail, et qu’ils sont récompensés pour la responsabilité et le risque accrus qu’ils reçoivent par des salaires plus élevés, des avantages supplémentaires et un plus grand prestige social. Plusieurs diraient également qu’après les étudiants, la santé et le bien-être des enseignants viennent au deuxième rang des priorités, car ils sont largement considérés comme les travailleurs de première ligne du secteur de l’éducation. Étant donné qu’il y a plus d’enseignants que de directeurs, cet argument pourrait d’autant plus être fondé sur le volume. En conséquence, il semble que les directeurs d’école soient devenus moins prioritaires. Je dirais toutefois qu’il est tout aussi important et opportun de prendre en compte le bien-être des leaders d’établissements scolaires.

Bien que le système d’enseignement public compte moins de directeurs que d’enseignants, cela ne signifie pas nécessairement qu’ils ont moins d’influence sur la réussite des élèves. Comme le soutient Ken Leithwood, spécialiste de l’éducation, « il n’y a pas de cas documenté d’école qui réussit à inverser la trajectoire de réussite de ses élèves en l’absence de leaders talentueux1. » Les directeurs qui sont aux prises avec l’épuisement professionnel ou confrontés à leur bien-être personnel sont moins en mesure de soutenir l’enseignement et l’apprentissage dans leurs écoles.

Dans ce contexte, le « bien-être » désigne non seulement l’absence de toute détresse liée à nos fonctions cognitives, notre état émotionnel, nos interactions sociales ou notre santé physique, mais également le sentiment de joie, de satisfaction, d’épanouissement, de bonheur et d’accomplissement2. Les directeurs d’école ont une grande fierté et une grande joie dans leur travail, même lorsqu’ils éprouvent simultanément des symptômes d’épuisement professionnel. Par exemple, dans une étude que j’ai menée en 2013, 78 % des directeurs ontariens interrogés ont indiqué qu’ils étaient la plupart du temps satisfaits de leur emploi, 91 % estimaient que leur école était un bon lieu de travail et 92 % estimaient leur travail fait une différence significative dans la communauté scolaire3.

Bien que la plupart des directeurs d’école de l’Ontario soient satisfaits de leur travail, cela ne signifie pas que leur travail est facile. Malgré les perspectives positives des chefs d’établissement, ces derniers travaillent de longues heures : les directeurs d’école en Ontario travaillent en moyenne 59 heures par semaine et, dans certains autres pays, ils travaillent plus. Les directeurs exécutent également un plus grand nombre de tâches régulières associées à leur poste. Par exemple, alors qu’ils ont toujours été impliqués dans des problèmes de discipline, ces problèmes deviennent de plus en plus complexes et impliquent de nouveaux défis tels que la cyberintimidation. Outre le nombre croissant de tâches quotidiennes traditionnelles, les directeurs ont désormais des rôles supplémentaires liés au bien-être des élèves.

En outre, les progrès des technologies de l’information et de la communication impliquent que les directeurs travaillent dans des environnements plus rapides, avec des attentes et des exigences plus élevées – un processus appelé « intensification du travail ». Encore plus inquiétant, 21 % des directeurs interrogés ont déclaré que s’ils avaient pu revivre leur carrière, ils seraient restés enseignants ou auraient poursuivi une carrière dans un autre secteur.

Les directeurs ressentent les effets de ces changements dans leur travail. Une participante de l’étude explique d’ailleurs que :

« C’est un rôle qui ne diminue jamais. Rien ne sort jamais de l’assiette. C’est juste plus qui y est ajouté. La limite est seulement déterminée par la largeur de l’assiette. Il y a une limite de ce que vous pouvez y mettre dessus. »

L’épuisement professionnel est un symptôme significatif de l’intensification du travail des directeurs. Un directeur a décrit l’impact de ces exigences de travail sur leur bien-être physique et mental comme suit :

« Je vais demander un déménagement, simplement parce que je constate que je suis fatigué, personnellement. Je veux dire que j’attends beaucoup de moi et que ce que j’estime être acceptable pour moi – et j’ai l’impression que je n’agis pas à plein rendement. C’est pour moi une faiblesse… j’ai seulement l’impression de ne pas être aussi efficace qu’il y a deux ou trois ans. C’est constant. »

Notre étude a notamment révélé que plus les directeurs consacraient de temps à la discipline et à l’assiduité des élèves, à la collaboration avec les parents et aux comités de bureau du conseil scolaire de district, plus le travail risquait de les mettre dans des situations épuisantes sur le plan émotionnel. Les directeurs d’école ne consacrent en moyenne que cinq heures par semaine au programme et à l’enseignement – un nombre que 82 % des directeurs d’école de 2013 souhaiteraient voir augmenter.

Les directeurs ont plusieurs façons de gérer leur charge de travail. Certaines sont des stratégies d’adaptation individuelles similaires à celles recommandées à toute personne travaillant dans un environnement stressant : passer du temps avec ses proches, être actif physiquement et pratiquer des loisirs en dehors du lieu de travail, par exemple. Sur la base d’études récentes, il existe toutefois des stratégies et des pratiques spécifiques au rôle de direction que les chefs d’établissement peuvent utiliser pour promouvoir et gérer leur propre bien-être.

Pour découvrir 5 moyens de contribuer au bien-être des directeurs d’école, téléchargez notre affiche disponible gratuitement plus haut.

 

Illustration : Dave Donald

Publiée pour la première fois dans Éducation Canada, septembre 2017

Cet article a été traduit de l’anglais.  Voir l’article original “Healthy Principals, Healthy Schools” de Katina Pollock, Ph. D.


1 Kenneth Leithwood et al., “School Leaders’ Influences on Student Learning: The four paths,” in The Principles of Educational Leadership and Management, eds. T. Bush, L. Bell, and D. Middlewood (London: Sage, 2012), p. 1.

2 Nic Marks and Heten Shah, “A Well-Being Manifesto for a Flourishing Society,” Journal of Public Mental Health 4 no. 2 (2004): 9–15.

3 Katina Pollock, Fei Wang, and Cameron Hauseman, The Changing Nature of Principals’ Work: Final report (October 2014): 1–42. www.edu.uwo.ca/faculty-profiles/docs/other/pollock/OPC-Principals-Work-Report.pdf

4 Katina Pollock and D. Cameron Hauseman, “The Use of Email and Principals’ Work: A double-edged sword,” Leadership and Policy in Schools (2017).

5 Kenneth Leithwood and Vera N. Azah, Elementary Principals’ and Vice-Principals’ Workload Studies: Final report (2014) : 1–100. www.edu.gov.on.ca/eng/policyfunding/memos/nov2014/FullElementaryReportOctober7_EN.pdf

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Dr. Katina Pollock

Associate Professor of Educational Leadership and Policy in the field of Critical Policy, Equity, and Leadership Studies at the Faculty of Education, Western University

Dr. Katina Pollock is Associate Professor of Educational Leadership and Policy in the field of Critical Policy, Equity, and Leadership Studies at the Faculty of Education, Western University. Katina Pollock, Ph. D., est professeure agrégée de leadership et de politique éducatifs dans le domaine des études critiques de politique, d’équité et de leadership à la Faculté d’éducation de l’Université Western.

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