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Opinion

Faire confiance aux acteurs du terrain

Pour assurer la réussite de tous les élèves

Cette pièce de blogue fait partie de notre série sur la Loi 86.

Le 4 décembre dernier, le ministre de l’Éducation de l’époque, M. François Blais, déposait un projet de loi ayant comme objectif de modifier l’organisation et la gouvernance des commissions scolaires. Les changements demandés sont importants et commandent un « faire autrement ». Nous avons entendu beaucoup de réactions concernant l’abolition des élections scolaires au suffrage universel. Pourtant, d’autres changements sont proposés et méritent notre attention. Je m’attarderai sur le principe de subsidiarité et son complément, la proportionnalité qui est la toile de fond du projet de loi 86.

Selon Wikipédia, le principe de subsidiarité est une maxime politique et sociale selon laquelle la responsabilité d’une action publique, lorsqu’elle est nécessaire, doit être allouée à la plus petite entité capable de résoudre le problème d’elle-même. Il va de pair avec le principe de proportionnalité, voulant que lorsque les problèmes excèdent les capacités d’une petite entité, l’échelon supérieur a alors le devoir de la soutenir, dans les limites du principe de subsidiarité.

C’est donc le souci de veiller à ne pas faire à un niveau plus élevé ce qui peut l’être avec plus d’efficacité à un autre niveau, c’est-à-dire la recherche du niveau pertinent d’action publique.

Ce principe donne le ton.

N’est-il pas logique que les décisions concernant les élèves se prennent par l’entité la plus près des élèves, afin que la solution soit la plus adaptée et la plus efficace possible? En ce qui nous concerne, l’école.

Car l’école est l’entité au cœur et à la base de notre système d’éducation, celle qui est le plus près des élèves, des parents et de sa communauté. Une école devant être soutenue par une commission scolaire qui comprend son rôle d’accompagnement et de conseil, qui n’est pas en lien hiérarchique avec elle, mais qui fait équipe. Nous parlons d’un changement de culture important pour plusieurs, moins pour d’autres qui ont déjà adopté ces modèles de gestion prônés dans les années 60 et qui ont inspiré notre système d’éducation. Et je cite : « Le directeur d’école doit être un homme de confiance auquel on laisse beaucoup de latitude et dont on espère beaucoup d’initiative. Son rôle premier, c’est évidemment d’organiser l’enseignement, d’en surveiller la qualité, d’en assurer le progrès. Il faut donc lui laisser la plus grande liberté possible… » (Rapport Parent tome 2, no 251). Quelque cinquante années plus tard, nous sommes au même endroit. N’est-il pas temps de passer à l’action?

À l’AQPDE, trois grands principes nous ont servi de fondement dans la réflexion entourant le projet de Loi. Je vous les partage :

1er : L’éducation se fait dans une classe composée d’un enseignant et d’un groupe d’élèves. Cette classe est dans une école ou un centre où les besoins se déterminent, les services s’organisent et les décisions se prennent. La persévérance et la réussite de tous les élèves constituent notre quotidien.

2e : La direction est à l’école ce que l’enseignant est à la classe. C’est au directeur d’école, avec la contribution de son équipe d’enseignants, de professionnels et de son personnel de soutien, que revient le choix des moyens et des stratégies pour assurer la persévérance et la réussite de tous ses élèves.

3e : L’éducation est une responsabilité collective. L’école est située au cœur d’un quartier, d’une municipalité, d’une ville. Elle doit entretenir une relation étroite avec tous les citoyens ainsi que les institutions sociales, culturelles et économiques de son milieu et pouvoir compter sur leur engagement pour assurer la persévérance et la réussite de tous ses élèves. C’est au directeur de faire rayonner son école au cœur de sa communauté.

Diriger une école se fait dans un grand souci d’humanisation. La direction d’établissement a comme unique préoccupation de faire cheminer chaque jeune qui arrive à l’école vers la réussite, en lui offrant un milieu de vie propice aux apprentissages. Faisons confiance à l’école et donnons-lui les moyens de ses ambitions : la réussite de tous ses élèves!

En agissant ainsi, nous protégeons réellement l’école publique et nous la promouvons. Soutenir les intervenants auprès des élèves et leur donner plus de pouvoir, c’est donner plus de pouvoir à l’école publique. Malheureusement, le discours souvent véhiculé confond défense de l’école publique avec protection du modèle traditionnel de gouvernance. Pire, pour sauvegarder le statu quo, on évoque l’incapacité des intervenants du milieu à respecter le principe d’équité. Cet argument contribue à affaiblir la perception de la population de l’école publique et parfois même la perception des intervenants eux-mêmes.

Ceci dit, le défi de la réelle décentralisation s’avère de taille. Elle requiert une révision de la formation des nouvelles personnes appelées à décider, un changement d’attitudes axées sur la collégialité et une façon nouvelle de considérer l’école. Il s’agit pour certains de porter un regard neuf sur la façon de gérer une école et pour d’autres, sur la façon de les aider à le faire. Un beau défi et une opportunité de faire autrement pour la réussite de tous les jeunes!

Apprenez-en plus sur

Danielle Boucher

Présidente de l’Association québécoise du personnel de direction des écoles (AQPDE)

Danielle Boucher cumule 33 années d’expérience à titre d’enseignante , de directrice d’école primaire, secondaire et de présidente de l’Association québécoise du personnel de direction des écoles. Elle siège sur plusieurs conseils d’administration et est membre de différents organismes dont l’Association canadienne d’éducation.

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