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Opinion

Renouveler la gouvernance pour mieux soutenir la réussite des élèves

Cette pièce de blogue fait partie de notre série sur la Loi 86.

Lors du dépôt de son mémoire devant la commission parlementaire chargée d’étudier le projet de loi 86, l’AMDES a lancé un cri du cœur en faveur du redressement de la situation de l’école publique montréalaise et a salué les efforts de réorganisation des structures en vue de rapprocher l’école des lieux de décision et l’instauration d’une nouvelle concertation.

Oui à une augmentation de la marge de manœuvre des écoles

Faire participer les directions d’établissement aux structures de concertation de la commission scolaire est essentiel. Cependant, l’objectif visé doit aussi être d’augmenter la marge de manœuvre s’exerçant localement pour permettre aux équipes-école et aux conseils d’établissement de définir et d’appliquer les approches qui correspondent aux besoins de leur milieu plutôt que de se faire imposer des solutions toutes faites.

En ce sens, l’AMDES a présenté des modifications pour s’assurer que chaque intervenant joue le rôle approprié en fonction de ses compétences, de son expérience et de l’apport qui doit être le sien.

La spécificité montréalaise commande une intervention immédiate

L’Association a insisté sur les caractéristiques particulières de l’école montréalaise, une école en souffrance et sous-financée.

  • Montréal reçoit à elle seule près de 60 % des élèves provenant de l’immigration, des vagues d’élèves en classes d’accueil année après année;
  • Les deux tiers des enfants du primaire et 85 % de ceux du secondaire proviennent de milieux défavorisés, l’équivalent de 29 élèves sur 32 dans une classe!
  • La situation est pire au secondaire parce que le secteur privé draine les élèves dans ses établissements;
  • Montréal accueille aussi la clientèle vulnérable d’élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage provenant d’autres territoires, souvent des cas lourds;
  • À cela s’ajoutent les défis liés à la francisation, aux ententes particulières interministérielles, à une situation financière fortement déficitaire pour la CSDM, au parc immobilier vétuste, etc.

Cette situation extrême commande de façon urgente des interventions vigoureuses et coordonnées. Voilà pourquoi l’AMDES a demandé la mise en place sans délai d’une table de travail, une sorte de taskforce, entièrement dédiée au redressement de l’école publique montréalaise pour réunir tous les intervenants et assurer une coordination maximale des efforts.

Concernant les autres aspects du projet de loi 86, l’AMDES a réaffirmé son désir profond de collaborer à implanter cette nouvelle gouvernance.

Plus de pouvoir au conseil d’établissement (CÉ), mais dans le respect du rôle et de la compétence de l’équipe-école

Que les parents siégeant au CÉ fassent part de leurs commentaires et demandes de modifications est tout à fait légitime. Cependant, contrairement à ce que prévoit le projet de loi, il revient à l’équipe-école de concevoir les projets et de proposer des modifications. Autrement, on pourrait se retrouver dans une situation où les parents en CÉ adopteraient des propositions ayant des incidences sur la pédagogie sans que les enseignants ou le personnel de l’école n’aient été consultés en premier, ce qui est inconciliable avec certaines dispositions de la Loi sur l’instruction publique.

Le rôle fondamental du CÉ est de s’assurer que les propositions de la direction d’école, formulées en concertation avec l’équipe-école, respectent les valeurs et le contexte particulier de l’établissement. Son rôle n’est surtout pas de se substituer à l’équipe-école, ni de formuler des recommandations à incidence pédagogique. À chacun son champ d’expertise!

Dans le même sens, l’AMDES appuie la proposition par laquelle le CÉ adopte le projet éducatif sauf pour la section qui porte sur les moyens. Le choix des moyens pour atteindre la réussite scolaire des élèves est une question avant tout pédagogique qui relève des experts en pédagogie, les enseignants, avec les directions d’établissement.

De plus, l’AMDES considère que les membres du conseil d’établissement ne devraient pas avoir à donner leur avis sur la prestation de travail des directions d’établissement. Celles-ci doivent continuer d’être évaluées par leurs supérieurs immédiats de la commission scolaire, ce qui est conforme aux bonnes pratiques de gestion.

Les directions doivent constamment arbitrer entre les intérêts et les positions des parents, des élèves, du personnel incluant les enseignants, du conseil d’établissement, de la commission scolaire et de la communauté et prendre des décisions qui peuvent être mal reçues. Elles doivent conserver leur pleine indépendance dans la gestion de leur établissement sans craindre d’être évaluées négativement par le conseil d’établissement.

Oui à la concertation au sein du comité de répartition des ressources

L’AMDES s’est réjouie de la création d’un comité de répartition des ressources (CRR) présidé par le directeur général de la commission scolaire et composé majoritairement de directions d’établissement choisies par leurs pairs incluant une représentation pour les directions s’assurant des services dans les établissements dédiés aux élèves HDAA. Il s’agit d’un premier pas vers une plus grande implication des directions dans la prise de décision qu’il faut saluer.

Pour s’assurer de la concertation la plus efficace, l’AMDES a demandé d’augmenter dans les plus grosses commissions scolaires le nombre de comités conjoints de gestion pour ne pas dépasser une quarantaine de participants dans le but d’instaurer une véritable consultation et une gestion favorisant la participation.

Plus de directions sur le conseil scolaire

Le futur conseil scolaire des commissions scolaires serait composé de 16 membres dont deux directeurs élus par leurs pairs. L’AMDES y est favorable, mais considère qu’il faudrait augmenter le nombre de sièges dévolus aux directions d’établissement à une par ordre d’enseignement pour refléter la diversité des milieux. La réalité des écoles primaires n’est pas la même que celle des écoles secondaires et encore moins des centres de formation professionnelle ou des centres de formation générale des adultes ou des écoles pour les élèves HDAA. 

En conclusion, le projet de loi 86 doit permettre : 

  • Une relation renforcée entre la direction d’établissement et le conseil d’établissement qui respecte les compétences et la valeur ajoutée de chacun; 
  • Une relation fondée sur la concertation entre l’établissement et la commission scolaire jumelée à une gouvernance qui favorise les liens directs et le respect de la hiérarchie dans l’évaluation;
  • La reconnaissance de la spécificité montréalaise et la mise en place d’une table de travail gouvernementale pour redresser l’école publique montréalaise.

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helene bourdages

Hélène Bourdages

Hélène Bourdages est Présidente de Association montréalaise des établissements d’enseignement scolaire (AMDES). Détentrice d’une maitrise en administration publique de l’ENAP, elle œuvre dans le secteur de l’éducation depuis plus de 30 ans. D’abord enseignante au secteur des adultes handicapés visuels, puis directrice adjointe et directrice au primaire et au secondaire, elle est engagée depuis longtemps dans la représentation de ses collègues. Athlète d’élite, elle a représenté le Canada en escrime lors des Jeux olympiques de 1992.

Lien twitter: https://twitter.com/BourdagesHelene
Lien du site de l’AMDES : http://amdes.qc.ca/

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