Notes des élèves

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Évaluation, Pratiques prometteuses

Et si on parlait des notes des élèves?

100%, 77%, 55%…

Cet article invite les enseignants à réfléchir sur de nombreux aspects qui influencent leurs pratiques d’évaluation. On y revoit les véritables objectifs de l’acte pédagogique d’évaluer ainsi que la valeur et la fiabilité des notes. Les auteurs offrent en réponse une marche à suivre efficace en ce qui concerne une pratique d’évaluation juste, motivante et représentative des compétences des élèves.

Qui ne se souvient pas d’avoir été accueilli à la maison avec cette question : « Et puis, cet examen, combien as-tu eu ? » On se rappellera le sourire d’un parent devant une note de 100 %. À l’inverse, on préfèrera oublier la réaction de l’autre à un 44 % ! Quelles prennent la forme d’un pourcentage de 0 à 100 comme dans le système scolaire québécois, d’un résultat de 0 à 20 ou de 1 à 5, les notes ont depuis longtemps fait la navette entre l’école et la maison, au bonheur ou au malheur des enfants et… de leurs parents.

Que mesurent-elles ?

« Élément de discours par lequel on communique, en le condensant, le résultat d’un jugement appréciatif1 », la note peut aussi bien figurer dans le haut d’un examen que vis-à-vis du libellé « mathématique » sur le bulletin. Dans un cas comme dans l’autre, on souhaite qu’elle témoigne le plus justement de l’apprentissage qui a eu lieu chez l’élève. C’est pourquoi, comme nous le rappellent les docimologues, il vaut mieux « évaluer […] le rendement de l’élève, sans tenir compte de ses comportements (effort, participation, respect des règles de classe, etc.)2. »

À quoi servent-elles ?

À la façon d’un feu de circulation, les notes signalent dans le courant de l’année scolaire si l’élève peut avancer vers les apprentissages suivants ou s’il doit s’arrêter un instant pour remédier aux notions mal assimilées. Si un résultat de 80 % à un examen n’a pas à inquiéter l’enseignant, il lui faut en revanche réagir vivement dès qu’un élève se trouve en difficulté : reprendre les explications de départ, jumeler l’élève avec un pair aidant, lui offrir un exercice additionnel, etc. En fin d’année scolaire, les notes sont dédiées à d’autres fonctions : passage ou non à l’année supérieure, diplomation ou non, etc.

Sont-elles dignes de confiance ?

L’importance qu’on leur accorde aussi bien à l’école que dans les familles rend légitime la question de leur fiabilité. Les notes sont-elles fiables ? La réponse à cette question en décevra plus d’un : des études docimologiques déjà anciennes ont démontré que « la notation de copies n’est jamais stable ni constante […] et que de nombreux facteurs, souvent connus sous le terme de “critères parasites de la fidélité”, y contribuent3 ».

Pour s’en convaincre, imaginons Nina, une élève de 5e année, qui obtient une note de 77 % à une épreuve d’écriture corrigée par Mme Victoire, son enseignante. Aurait-elle eu le même résultat si Mme Christine, l’enseignante de la classe voisine, avait été responsable de la correction ? Si sa composition n’avait pas été précédée d’une copie exceptionnelle dans la pile de correction ? Et le questionnement va bien au-delà. Si Nina avait passé l’épreuve un lundi matin plutôt qu’un vendredi après-midi ? Si Mme Victoire avait choisi un autre thème que « mon animal préféré » pour faire écrire les élèves ? Dans chacun des cas de figure, il est probable que la note de Nina aurait fluctué à la hausse ou… à la baisse.

Des pistes de solution

Avec le manque avoué de fiabilité de la notation, que faire des notes ? Les remplacer par des émoticônes (smileys) (J), lettres (A+) ou couleurs (Vert : c’est réussi !) ? Dans les systèmes d’éducation où les notes sont encore les « points de repère commodes4 » prescrits par les autorités pour renseigner sur les apprentissages des élèves, la solution réside plutôt dans une série d’actions que l’enseignant peut mettre en place pour améliorer la qualité de la notation. En voici parmi les plus fécondes qui peuvent d’ailleurs s’appliquer aux autres façons « alternatives » de noter, énoncées précédemment :

  • Il faut offrir à l’élève plusieurs occasions de montrer ses apprentissages dans des tâches variées. La fiabilité de la notation s’en portera mieux, car les erreurs de mesure d’une évaluation à l’autre auront tendance à s’annuler.
  • L’enseignant doit soigner sa correction. Se fier à un barème de notation, cacher le prénom d’un élève au moment de corriger sa copie, autant de petits gestes qui amélioreront la fiabilité de la note au bout du compte.
  • Parce que la note n’informe en rien de ce qui a été réussi ou manqué par l’élève, il faut voir à l’accompagner d’annotations sur la copie de l’élève ou de commentaires sur le bulletin. On se rappellera que tout commentaire n’est pas bon à dire : les expressions comme « Mauvaise réponse ! » ne remplacent en rien les « Tu as fait une erreur de calcul ici. 3 et 4 font 7. » qui, elles, aident à progresser.
  • Comme on l’a dit plus haut, la note d’un élève en mathématique doit refléter… ce qu’il sait faire en mathématique. Ni ses efforts, son manque d’efforts ou autres ne doivent en rien servir à la faire augmenter ou diminuer.
  • Il en va de même pour toute tentative de hausser les notes des élèves pour bien faire paraitre l’école ou la commission scolaire (par exemple, de 22 % à 50 %). Ces manipulations, qui n’ont rien à voir avec le fait de donner un point à un élève pour qu’il atteigne la note de passage, sont à proscrire parce qu’elles masquent les réels besoins d’aide des élèves.
  • L’enseignant doit veiller à ce que les évaluations reflètent au mieux ce qui a été enseigné en classe. Il faut abandonner les questions pièges qui, en plus de démotiver les élèves, font chuter leurs notes.
  • De l’atelier d’une journée à la formation créditée offerte par une université : toutes les occasions sont bonnes pour se former à l’évaluation. Comment rédiger une bonne consigne ? Comment concevoir un bon barème de notation ? Plus la qualité des outils en amont sera bonne, plus la note s’en ressentira.

Pour conclure au sujet des notes des élèves, voici peut-être le plus profitable des conseils à partager : il faut que l’enseignant se fasse confiance au moment de noter. N’est-il pas le mieux placé pour témoigner des apprentissages de l’élève ? Poser la question, c’est y répondre !

 

Illustration : Dave Donald

Première publication dans Éducation Canada, mars 2019


1 Hadji, C. (2014). L’évaluation est-elle condamnée à être une calamité sociale ? Dans P. Maubant, D. Groux et L. Roger (dir.), Cultures de l’évaluation et dérives évaluatives (p. 181-209). Paris, France : L’Harmattan, p. 203.

2 O’Connor, K. (2012). 15 solutions pour améliorer nos pratiques évaluatives (M. Ouellet et I. Dommange, Trad.). Saint-Laurent, Canada : ERPI, p. 10.

3 Tagliante, C. (2005). L’évaluation et le Cadre européen commun. Paris, France : CLE international, p. 12.

4 Hadji, C. (2015). L’évaluation à l’école pour la réussite de tous les élèves. Paris, France : Nathan, p. 27.

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Marie-Hélène_Hébert

Marie-Hélène Hébert

Professeure, Université TÉLUQ

Éric Frenette

Professeur titulaire, Université Laval

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