Ralentir?
Les courants en arts naissent souvent en réaction et parfois en opposition au courant précédent. Après la Seconde Guerre mondiale et le courant architectural de l’Art nouveau est arrivé le brutalisme. Ce courant architectural tient son nom de l’utilisation du béton brut (et non d’un lien avec le mot brutal).
Certaines écoles construites après 1950 évoquent ce style épuré aux formes géométriques massives et anguleuses. L’idée du progrès, de la concentration des élèves et des étudiants ainsi que de la productivité est au centre de ces bâtiments. Le stakhanovisme académique est à la mode. Le brutalisme est démoralisant, fade, froid et stérile.
La psychologie est une science récente; grâce à elle, et à d’autres sciences, nous savons aujourd’hui que la lumière manque dramatiquement à plusieurs personnes à l’automne, que le contact avec la nature est bénéfique pour tous, que la violence diminue dans un environnement plus vert. Et que trop d’entre nous continuent d’enseigner dans des blocs de béton.
Toutefois, de plus en plus d’initiatives de « verdissement » émergent des milieux scolaires : l’école extérieure de Maple Ridge en Colombie-Britannique, la Garderie Nature à Saguenay au Québec et les écoles Jeunes du Monde et Marguerite-Bourgeoys de la ville de Québec qui ont installé des classes extérieures. Il s’agit de quelques exemples qui me viennent rapidement en tête; je suis convaincue que les projets de ce type se comptent par milliers à travers le pays. Je ne saurais dire si ces initiatives sont en opposition ou en réaction au brutalisme; si elles relèvent du désir de protéger l’environnement ou du besoin criant de vivre dans un cadre plus harmonieux. Je sais seulement que ces initiatives sont applaudies, avec raison d’ailleurs!
Entre l’écoanxiété, l’infobésité et les statistiques alarmantes sur la santé mentale de nos jeunes et de l’ensemble de la population, le verdissement et l’écologisation des écoles répondraient-ils à un besoin criant de ralentir? Ralentir pour prendre le temps de grandir et d’apprendre; ralentir pour prendre le temps de travailler avec les élèves comme on le souhaite; ralentir pour retrouver un rythme calme et harmonieux.
Nous l’oublions peut-être trop souvent; la nature est la vie. Et si nous apportions à nouveau un peu de vie dans nos écoles?
Photo : Dave Donald
Première publication dans Éducation Canada, mars 2020