Pour une interprétation bien adaptée des résultats du PISA 2009
En 1997, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) s’associait à des pays du monde entier pour élaborer un programme innovateur ambitieux : le Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA). Depuis 2000, tous les trois ans, le programme OCDE/PISA évalue les élèves de 15 ans des pays participants afin d’établir « dans quelle mesure les jeunes ont acquis certaines des connaissances et compétences essentielles à une pleine participation à la société moderne ».[1]
Les résultats du PISA ont constitué une importante partie de ma carrière. Je ne suis pas placée pour les utiliser en pratique, mais ils enrichissent la façon dont je vois l’éducation au Canada et à l’étranger. J’attendais donc impatiemment les nouveaux rapports, mais j’ai été davantage captivée par la réaction publique qui les a accueillis que par les résultats eux-mêmes.
Alors que nous y allions tous de nos interprétations, je me suis mise à me demander si nous savions bien ce que les résultats nous indiquaient (ou non).
J’attribue à l’OCDE elle-même une partie de la responsabilitépour la réaction publique. Il est facile d’être intimidé par l’ampleur des graphiques et des explications découlant de chaque évaluation. Cela n’explique pas isolément, toutefois, l’attention démesurée accordée au classement des 65 pays participants combinant les résultats en lecture, en mathématiques et en sciences. En constatant comment le public s’est approprié les résultats, il est difficile de ne pas croire que le classement des pays du PISA correspond aux Olympiques du monde de l’éducation.
Ces comparaisons internationales peuvent être inestimables. Pour les responsables de l’établissement de politiques, le PISA fournit un nouveau cadre pour dégager les facteurs susceptibles de contribuer à des systèmes scolaires efficaces. Cette année, les auteurs du rapport ont décrit certains pays dont les résultats manifestent des améliorations notables, dont l’Allemagne, qui « à l’annonce de sa performance inférieure à la moyenne et de fortes disparités sociales dans ses résultats lors de la publication du rapport sur le cycle PISA 2000 »,[2] a pris des mesures énergiques qui ont donné lieu à des gains marqués sur les deux plans.
Comme il semble souvent se produire lorsqu’un palmarès est publié, cependant, les comparaisons glissent vers la compétition. Les débats publics au sujet des classements inquiètent particulièrement lorsqu’ils sont au détriment des jeunes (p. ex. « les classements de notre pays seraient plus élevés si seulement nous avions le “bon” type d’élèves ») ou quand les pays doivent endurer des semaines de commentaires stéréotypés rabaissant les classements élevés ou justifiant les faibles résultats.
La fascination du public pour les classements internationaux éclipse souvent d’autres résultats comparatifs importants présentés dans les rapports du PISA. Ainsi, les différences entre les pays ne représentent qu’une fraction de la variation totale du rendement des élèves. En effet, les différences au sein des pays peuvent faire ressortir des écarts équivalant à plusieurs années scolaires entre les élèves obtenant les résultats les plus faibles et les plus élevés.[3]
Le dialogue fait souvent abstraction, également, du fait que les pays varient dans la mesure dans laquelle un rendement élevé s’accompagne d’équité sur le plan des résultats d’apprentissage pour tous les jeunes. À propos des résultats du Canada au sujet du PISA 2009, Freiler indique que le facteur d’équité comporte sans doute plus d’importance pour l’avenir social et économique des jeunes et l’ensemble du Canada que de légères fluctuations du résultat global (c.-à-d. si nous nous classons au troisième, au quatrième ou au cinquième rang).[4]
Enfin, maintenant que le PISA devient une source de confiance d’information sur la qualité de l’éducation, le public doit saisir une réserve importante : le PISA n’évalue pas les connaissances des élèves, ni leur compréhension des matières. En fait, les résultats correspondent à l’effet cumulatif de l’apprentissage formel et informel des jeunes et à la mesure dans laquelle ils peuvent le démontrer dans le contexte de scénarios de la « vraie vie » en lecture, en mathématiques et en sciences. Le PISA n’évalue pas l’atteinte des objectifs des programmes d’enseignement par les élèves et ses résultats ne peuvent être attribués qu’aux écoles.
Cette réserve fondamentale ne limite pas la valeur du PISA. Les données destinées à indiquer à quel point les jeunes sont préparés à « une pleine participation à la société moderne » peuvent nous être très utiles. Toutefois, Sjoberg nous rappelle que nous devons discuter des résultats et les utiliser avec perspicacité, que nous devons savoir ce que l’étude PISA peut nous apprendre – ou non. Elle dit que nous devons élever une voix critique (et non nécessairement négative) en public et dans les débats professionnels et préconiser l’utilisation appropriée des résultats.[5]
[1]T. Knighton, P. Brochu, et T. Gluszynski, À la hauteur : Résultats canadiens de l’étude PISA de l’OCDE (Ottawa, Statistique Canada, Conseil des ministres de l’Éducation (Canada) et Ressources humaines et Développement des compétences Canada, 2010), p. 39.
www.statcan.gc.ca/pub/81-590-x/81-590-x2010001-fra.pdf
[2] Résultats du PISA 2009 : Surmonter le milieu social – L’ÉGALITÉ DES CHANCES ET L’ÉQUITÉ DU RENDEMENT DE L’APPRENTISSAGE, VOLUME II, Programme international de suivi de l’acquis des élèves, OCDE, p. 4.
[3] Ibid, p. 159.
[4] C. Freiler, PISA 2009: Let’s Not Underestimate the Importance of Equity in Education.
[5] S. Sjoberg, PISA and “Real Life Challenges”: Mission Impossible? ” dans PISA According to PISA, eds., Hopmann and Brinek (University of Vienna: Wien Lit-Verlag, October, 2007), 2.