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L’épuisement professionnel est bien réel… et on n’a pas les moyens d’ignorer le bienêtre des enseignant-e-s

Trop souvent, il faut une crise pour qu’on se décide à agir en amont. En cette première Semaine nationale d’écoles saines et en ce Mois national de la santé au travail, le moment est opportun pour parler des appels à l’aide des systèmes d’éducation de partout au pays, qui sont aux prises avec des cas d’épuisement professionnel et une pénurie d’enseignant‑e‑s persistants.

Pour le Réseau ÉdCan (anciennement l’Association canadienne d’éducation, fondée en 1891), ce cycle, c’est du connu. Nos 132 années d’existence nous ont donné amplement le temps de nous pencher sur ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas dans les systèmes d’éducation primaire et secondaire des quatre coins du pays. Nous savons qu’il est crucial d’investir dans des approches systémiques qui favorisent le bienêtre du personnel enseignant pour assurer la réussite des élèves.

Les grands défis auxquels sont confrontés les enseignant‑e‑s du pays existaient avant la pandémie. En 2006, 58 % des enseignant‑e‑s affirmaient vivre énormément de stress; c’est près de 20 % de plus que la moyenne des travailleur‑euse‑s canadien-ne-s. De plus, selon une étude de 2014 (en anglais seulement), 85 % des enseignant‑e‑s estimaient qu’un déséquilibre entre travail et vie personnelle affectait leur capacité à enseigner. Une autre étude menée la même année (en anglais seulement) a d’ailleurs révélé que 30 % des nouveaux membres du personnel enseignant quittent le domaine dans les cinq ans suivant leur embauche.

La pandémie a intensifié la nécessité d’agir et exacerbé les inégalités, tant sur le plan géographique que démographique. Les récents sondages menés par People for Education (en anglais seulement) montrent que le système d’éducation public de l’Ontario est en proie à des tensions très fortes et a urgemment besoin de ressources à l’échelle locale. Effectivement, selon ces sondages, le pourcentage d’écoles n’ayant pas de psychologues a doublé en 10 ans (en anglais seulement), 90 % des directions d’école doivent composer avec une pénurie de personnel persistante, deux tiers d’entre elles sont d’avis que leur degré de stress au travail est excessif et à peine plus du tiers (35 %) estiment disposer des ressources nécessaires à la santé mentale et au bienêtre du personnel. De même, 97 % des répondant‑e‑s à un sondage de 2021 de la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants (en anglais seulement) ont indiqué avoir composé avec une charge physique, mentale et émotionnelle et des exigences professionnelles accrues pendant l’année scolaire 2020‑2021.

S’il vaut mieux prévenir que guérir, il faut aussi des investissements stratégiques. Ces cinq dernières années, ÉdCan a graduellement changé de cap pour se concentrer exclusivement sur le bienêtre dans les systèmes scolaires. Par le truchement de notre programme Bien dans mon travail (site web en anglais seulement), nous militons pour le renouvèlement du système et travaillons avec les conseils et centres de services scolaires de partout au pays, primaire et secondaire compris : nous mettons les conseils et centres de services en lien avec des services de conseil, d’encadrement et de consultation, leur fournissons des ressources en leadeurship, et leur proposons des occasions d’apprentissage professionnel et une communauté de pratique pour échanger entre pairs. Ceux avec lesquels nous avons collaboré – qui auparavant ne savaient plus où donner de la tête – ont réalisé des progrès concrets et se sont dotés d’une approche holistique pour favoriser le bienêtre au travail et ainsi créer des environnements de travail sûrs, sains, accueillants et inclusifs.

Et nous ne travaillons pas seuls. Nos collègues de la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants mènent, en collaboration avec le Centre de toxicomanie et de santé mentale et la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa, une étude pilote visant à mettre à l’essai des programmes d’amélioration du bienêtre et de la santé mentale pour le personnel enseignant et éducatif. Des pôles de recherche, comme le Centre for School Mental Health de l’Université Western (en anglais seulement), contribuent à outiller le nouveau personnel enseignant et à créer des approches fondées sur des données probantes. L’Alliance canadienne des écoles en santé a quant à elle lancé un mouvement pour faire reconnaitre l’importance cruciale du bienêtre du personnel au primaire et au secondaire dans la création d’environnements scolaires globalement sains.

Si l’on veut véritablement faire des écoles des milieux où tout le monde – enseignant‑e‑s, éducateur‑trice‑s, personnel, dirigeant‑e‑s et élèves – peut s’épanouir, il est impératif de collaborer avec les partenaires ministériels, car il faut du temps, de la concertation et un financement stable pour mettre en place des approches systémiques. Dans ce cas-ci, le remède se trouve dans les caractéristiques mêmes d’un système qui fonctionne bien. En effet, une étude de 2019 du Conference Board du Canada (en anglais seulement) évalue que chaque dollar investi dans l’éducation publique en Ontario génère 1,30 $ en retombées économiques. De plus, si le taux de diplomation atteint 90 %, cela se traduira par des économies de 16 millions de dollars dans les systèmes de santé, d’aide sociale et de justice.

Il faut faire ces investissements maintenant; nous en recueillerons assurément les fruits pendant des années.

Julie Wright
Vice-présidente
Réseau ÉdCan

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Julie Wright

Vice-présidente du conseil d’administration du Réseau ÉdCan - Conseillère, Ville de Waterloo

Julie Wright is a City Councillor in Waterloo, Ontario. Previously, she was  Director of Partners for Action, a research initiative at the University of Waterloo that focuses on flood risk and resili...

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