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Engagement, Enseignement, Évaluation, Pratiques prometteuses

La clientèle émergente des cégeps du Québec

Introduction 

Les étudiants en situation de handicap (ESH) ont théoriquement toujours eu accès à l’éducation supérieure au Québec, mais ils n’ont pas toujours eu les services auxquels ils avaient droit. Depuis près de 30 ans, le cégep du Vieux Montréal accueille des étudiants en situation de handicap et leur offre des services pour pallier à leur déficience. Dans cette même perspective, il a reçu le mandat de soutenir les cégeps de l’Ouest de la province.1 En 1995, au Québec, seulement 3502 étudiants avaient accès à des accommodements. Puis, les étudiants ayant des troubles d’apprentissage, des troubles de santé mentale ou déficitaire de l’attention commencèrent à réclamer des services pour pallier leur trouble souvent diagnostiqué dès leur enfance, non reconnu au collégial. En 2007, le gouvernement québécois a financé des projets pilotes visant ces effectifs. Devant l’augmentation significative d’étudiants voulant s’en prévaloir et de nouvelles interventions à privilégier, le ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS) instaure un programme de financement en 2011. Dès son implantation, la question sur la pertinence d’exiger un diagnostic s’est posée et s’il n’y avait pas lieu de le remplacer par un plan d’intervention basé sur le modèle utilisé pour enfants et adolescents à risque.

Ce questionnement a contribué à donner l’impression que seuls les étudiants ayant un trouble diagnostiqué pouvaient recevoir du soutien aux études alors que ceux qui ont des difficultés étaient laissés à eux-mêmes.

Depuis 10 ans, les étudiants en situation de handicap sont de plus en plus nombreux à être admis au collégial.

Trouble et difficulté n’ont pas la même signification. Le trouble est une limitation significative et persistante associée à un diagnostic médical officiel. La difficulté est considérée comme passagère. En fait, il s’agit de deux réalités demandant des besoins différents. Or, des solutions existent pour les deux.

Les étudiants en situation de handicap (ESH) 

Depuis 10 ans, les étudiants en situation de handicap sont de plus en plus nombreux à être admis au collégial. Ceci peut s’expliquer par de meilleurs diagnostics établis dès le primaire et le secondaire et aussi, souhaitons-le, par une plus grande réussite de l’éducation obligatoire auprès des étudiants à besoins particuliers. Représentant près de 10 % de la population en général3, ils sont maintenant près de 5 000 sur un total de près de 150 0004, ce qui équivaut à 3 % de la population étudiante. En 1982, début de l’intégration, les étudiants ayant des troubles sensoriels étaient majoritaires. Aujourd’hui les étudiants ayant un TA, un TDAH ou un TM sont de loin plus nombreux.5 En 2007, on en dénombrait 557 au niveau collégial alors qu’en 2011, ils sont plus de 4 000.6 

Les collèges ont l’obligation d’accommoder l’étudiant qui présente un diagnostic. Les accommodements sont offerts selon le trouble identifié, les besoins et le programme d’étude7. Ce sont les Services adaptés qui déterminent les accommodements nécessaires sur remise d’un diagnostic. Les conseillers rattachés rencontrent les étudiants lorsque ces derniers déclarent leur trouble, soit à la rentrée ou à tout autre moment puisque cela n’est pas obligatoire ni à l’admission, ni à l’inscription.

Lors d’une première entrevue, le professionnel procèdera à l’évaluation des besoins à partir du diagnostic, des recommandations du professionnel et de l’expérience scolaire de l’étudiant. En cours d’études, le conseiller s’appuiera sur ses résultats scolaires en prenant en compte le type d’évaluation avec lequel, il éprouve des difficultés. Sauf exception, l’étudiant ayant atteint la majorité participera à l’évaluation de ses besoins. Puis, un plan de service est mis en place8.

Ce plan définit les accommodements et est revu à chaque session et sera reconduit ou modifié selon les besoins de l’étudiant, son cheminement scolaire et ses réussites. Il sera fourni aux enseignants. Ainsi, l’obligation d’accommoder de l’établissement est transférée à l’enseignant qui ne peut le refuser, à moins de contrainte excessive. Il doit alors en informer le Service adapté qui trouvera avec lui un moyen plus approprié au contexte de sa classe.

La relation avec les enseignants sera quotidienne pour les étudiants et ponctuelle pour les conseillers. Certains étudiants demandent un encadrement plus serré alors que d’autres plus autonomes, requièrent peu de suivis. Cependant, les conseillers sont disponibles tout au long de la session. Pour les étudiants ayant un besoin plus grand d’encadrement, le plan d’intervention sera réalisé, souvent avec la collaboration des enseignants. Mais cette situation est plus rare.

Les étudiants en difficulté

Qu’arrive-t-il aux étudiants qui n’ont pas de diagnostic, mais qui éprouvent tout de même des difficultés à réussir leurs études? Depuis l’année 2000, les collèges ont l’obligation d’élaborer un plan de réussite. Cela leur permet d’évaluer les difficultés et de définir des services de soutien à l’apprentissage. Souvent, les mesures de soutien sont offertes soit par programme, soit pour des effectifs particuliers ou pour des matières particulières.

Conclusion

La distinction entre les services adaptés et les services à la réussite démontre qu’il s’agit de deux types de services pour des étudiants n’ayant pas les mêmes besoins. Un étudiant peut rencontrer des difficultés pour une matière ou un cours et ne pas avoir de trouble. C’est pourquoi il est encore important que cette distinction passe par l’obtention d’un diagnostic pour l’admission aux services adaptés, afin de s’assurer qu’il s’agit d’un trouble et non d’une difficulté. Il sera ainsi plus facile d’assurer l’équité pour tous les étudiants.

Première publication dans Éducation Canada, mars 2013

 

RECAP – Students with disabilities have theoretically always had access to higher education in Quebec, but they have not always had the services to which they are entitled. For nearly 30 years, the cégep du Vieux Montréal has welcomed students with disabilities and offered them services to support their disabilities. Accordinagly, this college was given the mandate to support CÉGEPS in western Quebec. With better diagnoses and accommodation during elementary and high school, and greater success in compulsory education among students with specific needs, an increasing number of students with disabilities are being admitted at the college level. Since the year 2000, colleges have been obliged to develop a success plan, to assess student difficulties and determine learning support services.


1 Le cégep de Ste-Foy a les mêmes responsabilités.

2 Bonelli, Hélène et coll. (2010) Portrait des étudiantes et étudiants en situation de handicap et des besoins émergents à l’enseignement postsecondaire, p.14.

3 OPHQ, 2012.

4 Fédération des cégeps, 2012.

5 Bonelli, Hélène et coll. (2010) Portrait des étudiantes et étudiants en situation de handicap et des besoins émergents à l’enseignement postsecondaire, p.13-14. (TA = trouble d’apprentissage; TDAH = trouble de déficit d’attention avec ou sans hyperactivité et TM = trouble mental).

6 Données internes des CCSI (Centre collégial de soutien à l’intégration).

7 Bonelli, Hélène et coll. (2010) Portrait des étudiantes et étudiants en situation de handicap et des besoins émergents à l’enseignement postsecondaire, p.13-14.

8 Jusqu’en 2011, il n’y avait pas de plan d’intervention pour les étudiants en situation de handicap au collégial; l’actuel plan est très différent de celui mis en place dans les études primaires et secondaires.

Apprenez-en plus sur

Carole Lavallée

Carole Lavallée est directrice adjointe aux études du cégep du Vieux Montréal, responsable de la réussite et du Service d’aide à l’intégration des étudiants et du Centre collégial de soutien à l’intégration auprès des 27 collèges de l’ouest du Québec.

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